Tinder / Meetic 5:33
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Catherine Blanc
Dans l'émission "Sans Rendez-Vous", la sexologue et psychanalyste Catherine Blanc répond mardi à Sébastien, qui après s'être comparé à ses amis, s'est rendu compte qu'il avait moins de "matches" qu'eux sur les applications de rencontres. Inquiet, il se demande si cela signifie qu'il ne plaît pas.

Faut-il s'inquiéter de ne pas avoir beaucoup de succès sur les applications de rencontres ? Cela veut-il dire que l'on ne plaît pas ? C'est ce que se demande Sébastien, qui voit ses amis enchaîner les "matches" sur ces applications, quand lui en compte peu. Dans Sans Rendez-vous, sur Europe 1, Catherine Blanc, sexologue et psychanalyste, lui répond. Elle estime que se baser sur des photographies n'a rien à voir avec la vraie vie et appelle à ne pas absolument chercher à se rassurer par le succès que l'on rencontre ou non sur ces applications.

La question de Sébastien 

"Quand je discute avec mes amis, je me rends compte qu'ils ont beaucoup de matches sur Tinder et sur d'autres applications de rencontres, alors que pour moi, c'est assez rare. Je commence à me dire que je ne dois pas plaire finalement. Qu'est-ce que vous en pensez ?"

La réponse de Catherine Blanc

"D'abord, rendons-nous à l'évidence de ce qu'est un match. C'est : 'je passe, je passe, je passe, je m'arrête'. Sur une base de quoi ? On se le demande puisque quand même, dans la vraie vie, ça ne se passe pas comme ça. En plus, d'une photo à une autre, on peut être aussi beau que mochissime. Donc ça relève d'une attitude très pulsionnelle. Je regarde et je me demande si j'arrive à capter, si certains arrivent mieux à capter que moi et si ça matche tout de suite. Alors que s'il faut, quand on les voit de plus près, on se rend compte que ça n'est pas du tout satisfaisant.

La question est peut être : 'Pourquoi je me fais transparent ? Qu'est-ce que j'attends dans cet excès d'intérêt des uns et des autres ? Pourquoi je me cherche tellement dans la diversité des matches dans ma direction ?'. On n'est plus dans le sujet de la sexualité mais bien dans le sujet du doute quant à soi, du besoin d'être rassuré dans ce monde où on veut être toujours la star et que les gens nous trouvent beau. Mais dans la réalité, si on devait être au rendez-vous de tous ces matches, on n'assumerait pas une cacahuète. Alors concentrons-nous sur un, ça suffit.

Les photos ne nous définissent pas

On est dans une lecture de l'autre qui est extrêmement limitée. On est presque plus dans l'intérêt de susciter l'engouement pour soi, que dans la vraie curiosité pour l'autre. Et on s'arrête à des détails d'une photo qui ne rendraient absolument pas l'autre ni agréable ni populaire dans notre groupe d'amis. Une relation amoureuse, c'est tellement de choses et de désir. Sans parler d'amour ni de désir sexuel. C'est tellement d'échanges sur des tas de sujets qu'un seul visage ou une photo ne peut suffire pour définir ce qu'est l'autre et ce que je suis moi.

Donc c'est aussi louper des tas d'opportunités de la vraie vie. On ne va pas critiquer les réseaux, ça peut être utile. Il y a des belles histoires, bien sûr, mais à condition d'aller fouiller un peu les relations, de les enrichir et de ne pas en rester à sa première idée d'être des couvertures de magazines pour définir un sens au couple.

Ce n'est pas parce que les autres collectionnent les matches, collectionnent les conquêtes, que ça aboutit à quelque chose. La collection peut aussi rendre compte de la perdition de l'autre, qui se mire dans ce grand nombre et adopte une attitude de Don Juan. Alors que dans la réalité, il ne voit personne d'autre que lui et se cherche désespérément. Donc ce n'est pas nécessairement gage ni de compétences, ni de valeurs de soi, et encore moins de valeurs de la relation.

Laisser son amour propre de côté

Ça pose la question de comment je me présente. Qu'est-ce qui fait que des gens, par exemple, qui ne sont pas plus beaux que moi, paraissent extrêmement lumineux alors que d'autres sont assez éteints. Alors, on peut se dire que c'est une histoire d'être photogénique ou non. Peut-être que certains savent mieux prendre la lumière. Un jour, une personne me disait d'une mannequin qu'il avait rencontrée par ailleurs qu'elle n'avait rien de particulier. Mais dès lors qu'elle était prise en photo, elle était absolument sublime. Donc il y a des gens qui se révèlent en photo, mais sont assez éteints dans la vraie vie. Et d'autres pour qui c'est l'inverse. De temps en temps, il faut savoir laisser son amour-propre dans la poche et voir nos compétences par ailleurs."