LA QUESTION SEXO - Je ne pense qu'à mon travail pendant mes rapports sexuels, que faire ?

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Catherine Blanc
Dans "Sans Rendez-vous", lundi, la sexologue Catherine Blanc répond à Lucas, qui explique ne pas réussir à déconnecter de son travail pendant ses relations sexuelles. Absorbé par ses pensées et par ses missions professionnelles, il ne parvient pas à profiter du moment présent ni à s'accorder des instants de décontraction. 

Comment couper avec le travail pendant un moment intime ? Dans Sans rendez-vous, lundi sur Europe 1, la sexologue et psychanalyste Catherine Blanc répond à la question d'un auditeur qui ne parvient pas à profiter à 100% de ses rapports sexuels. Trop absorbé par son métier, ce dernier n'arrive pas à se déconnecter pour s'accorder des moments de plaisir. Pour la sexologue, la pression liée au début de sa vie professionnelle prend en effet trop de place et l'empêche d'être dans l'instant présent, ce qui peut être mal perçu par ses partenaires. 

La question de Lucas 

J'ai du mal à me défaire de mon boulot et même pendant mes relations sexuelles, je pense au travail et à ce que j'ai à faire. C'est très handicapant parce que je ne profite pas du tout du moment. Je souhaiterais savoir comment y remédier.

La réponse de Catherine Blanc

"Beaucoup de femmes, par exemple, pensent à leur bébé dans ces moments-là, à ce qu'elles ont fait ou non, ce qui les inquiète etc. Donc on est dans quelque chose qui est de l'ordre de l'évaluation de sa valeur et de son devoir d'être à la hauteur de ce qu'on attend de soi. Ça pose évidemment la question de pourquoi autant d'importance est donnée au travail. Et ça fait en général écho à un doute quant à soi. Dans ce cas-là, Lucas a 25 ans, il démarre sa vie professionnelle. Sans doute qu'il y a là un enjeu tellement important pour lui qu'il doit remplir haut la main le sujet. Et la conséquence, c'est que ça lui fait fuir la disponibilité de décontraction. Il n'est plus dans l'ici et maintenant dans le cadre de la sexualité.

Ça peut aussi être une façon de fuir la sexualité quand elle peut être encombrante, inquiétante ou intimidante, pour diverses raisons. Si on a eu par exemple des parents qui mettaient une pression énorme sur la valeur scolaire ou les notes, il peut y avoir le besoin de faire ses preuves parce qu'on rentre dans la vie active et qu'on a besoin de sentir qu'on n'est pas un enfant et qu'on est à la hauteur de l'adulte. Et il n'y a pas de disponibilité à ce moment-là pour autre chose, malgré tout le confort que cela pourrait occasionner.

C'est comme quand on dort. On devrait en profiter, on abandonne, on laisse nos dossiers et on s'assoupit tranquillement pour se détendre, ce qui nous permettra d'être encore plus efficace dès le lendemain. Mais en réalité, on est encore en train de cogiter sur notre sujet professionnel parce qu'on se sent en doute.

Le risque que la sexualité devienne un réflexe mécanique

Lucas est jeune, donc a priori, toute la mécanique devrait fonctionner correctement. Mais ça va engendrer un réflexe conditionné de Pavlov. C'est-à-dire qu'au lieu d'être dans la sexualité et de prendre la mesure de ce qu'on est en train de vivre, on la vit mécaniquement et cela devient une façon de faire sur le moyen ou le long terme. Donc je crois que c'est important de pouvoir lâcher les préoccupations. Exactement comme une maman qui vient d'avoir un enfant et qui n'est pas disponible pour la sexualité parce qu'elle n'arrive plus à retrouver le chemin de la tendresse ou de l'érotisation. 

Du côté du partenaire, ça peut entraîner le sentiment de ne pas compter pour l'autre. J'entends souvent des 'Je ne suis pas désirable. Le boulot l'attire plus. Il ne pense qu'à lui et sa carrière, ses collègues comptent plus'. Donc c'est perçu comme une dévalorisation personnelle alors qu'il n'en est rien. C'est une préoccupation majeure et une anxiété de performance qui fait que Lucas est toujours dans le cadre du professionnel, ou alors une anxiété liée à la sexualité qui profite du cadre professionnel pour fuir la préoccupation sexuelle.

On peut lui conseiller déjà de prendre conscience qu'il fuit le sujet. La sexualité ne va pas lui prendre trois heures. Ça peut n'être que l'histoire d'un quart d'heure ou de dix minutes. La sexualité est délicieuse et elle n'a pas besoin de s'étendre comme si c'était une séance de sport. Donc savoir s'arrêter pendant dix minutes peut être acceptable. Et sinon, on consulte.