Harcelée en ligne et menacée de mort, Marie Laguerre dépose plainte : "Tous les messages sont profondément sexistes"

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Salome Legrand, édité par Anaïs Huet , modifié à
Des messages de haine et d'appel au viol et à la violence plein ses messageries sur les réseaux sociaux, c'est ce que subit Marie Laguerre, la jeune femme agressée cet été dans le 19e arrondissement de Paris depuis qu'elle a dénoncé les faits.
TÉMOIGNAGE

"Marie Laguerre. Tronche de merde. Féministe de merde", "J’espère que tu es stérile et que tu vas crever toute seule. Misérable personne que tu es", "Les femmes s'habillent comme des putes et après elles se plaignent, t'as voulu faire ton bonhomme maintenant ça t'aura servi de leçon, sale bourgeoise de merde." Voici un bref échantillon du déferlement de haine, déversée par paquets de messages ou de commentaires sur Internet, qu'a eu à lire Marie Laguerre. 

Symbole du harcèlement de rue. Cet été, cette jeune femme de 22 ans était violemment agressée dans le 19e arrondissement de Paris pour avoir osé répondre "Ta gueule" à un homme qui venait de la harceler dans la rue. La scène, captée par la caméra de vidéosurveillance, avait été visionnée sept millions de fois en à peine cinq jours et eu un fort écho médiatique, en plein mouvement #MeToo. Le 4 octobre, son agresseur, âgé de 25 ans, a été condamné à six mois de prison ferme.

Harcelée en ligne et menacée de mort, Marie Laguerre dépose plainte : "Tous les messages sont profondément sexistes"

"Il aurait dû te tuer". Depuis sa mise en lumière, Marie Laguerre est devenue une cible pour les harceleurs sexistes sur les réseaux sociaux. "Ça va du commentaire désobligeant à l'insulte, jusqu'à la menace de viol ou de mort. Des petites insultes du style 'T'es trop moche pour te faire draguer', 'salope'… Puis ça va plus loin : 'va crever', 'il aurait dû te tuer', 'si je vous croise, je vous démolis la mâchoire', 'je te viole'…", égraine avec lassitude et écœurement l'étudiante au micro d'Europe 1. Certains internautes accusent aussi l'ingénieure et étudiante en architecture d'avoir prémédité les faits, orchestré un coup monté pour faire avancer la cause féministe.

La "lâcheté" des harceleurs sous pseudos. Bien décidée à ne pas laisser ces attaques passer, Marie Laguerre a décidé de porter plainte le 5 décembre pour cyber-harcèlement et menaces auprès du parquer de Paris. La plainte est déposée contre X, car beaucoup de ces messages sont publiés sous des pseudonymes. "C'est d'une grande violence, à la fois par le contenu mais aussi par la fréquence. Ces personnes se cachent derrière un écran et c'est très lâche", dénonce la jeune femme, qui tient son ordinateur à disposition des enquêteurs afin qu'ils remontent la piste de chacun des auteurs de ce violent déferlement.

Des messages "profondément sexistes". "À titre personnel, j'aimerais qu'ils soient jugés. J'aimerais les regarder dans les yeux pour voir qui sont ces personnes, pour qu'ils se rendent compte qu'on n'insulte pas quelqu'un, que je suis une personne réelle avec de réels sentiments, et que leurs mots sont violents", explique Marie Laguerre. Très engagée dans la cause féministe, elle assume de faire de son cas un exemple. "J'espère que, si jugement il y a , il enverra un message très fort. Au-delà du harcèlement sur Internet, ce qui est important pour moi est de montrer que tous les messages sont en fait profondément sexistes. Entre les menaces de viol, les gens qui m'insultent parce que soi-disant j'étais habillée d'une certaine manière… C'est très important de ne pas fermer les yeux", insiste la Parisienne.

"Ça suffit". "Ça montre qu'une partie de la population en France est convaincue que l'on n'est pas égaux entre femmes et hommes. Ces messages sont la preuve que, plus que jamais, on doit continuer à se battre", martèle Marie Laguerre. "On doit envoyer un message fort à la fois à ceux qui m'ont insultée et menacée, mais aussi à tous les autres qui se permettent de faire ces actes abjects en toute impunité. Ma plainte, c'est pour dire que ça suffit."