Réforme des retraites : ce qu'il faut retenir de la grève du 5 décembre

À Paris, le départ de la manifestation a été retardé en raison du grand nombre de personnes massées en tête de cortège. Une remorque a été incendiée près de la place de la République.
À Paris, le départ de la manifestation a été retardé en raison du grand nombre de personnes massées en tête de cortège. Une remorque a été incendiée près de la place de la République. © Thomas SAMSON / AFP
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avec AFP , modifié à
De nombreux salariés, du privé et du public, se sont mobilisés jeudi pour protester contre la réforme des retraites et la disparition annoncée des régimes spéciaux. La quasi-totalité des trains était à l’arrêt et les transports en commun perturbés dans de nombreuses villes. Les autorités ont recensé 806.000 manifestants.

Une journée noire dans les transports et dans les écoles. La grève de jeudi contre la réforme des retraites a été particulièrement suivie, avec 806.000 manifestants à travers toute la France, selon les chiffres officiels. L’appel à la mobilisation, initialement lancé dans les transports, à la SNCF et à la RATP, a été relayé ces dernières semaines par de nombreuses catégories professionnelles, du public et du privé. Conséquence de cette mobilisation : un trafic quasi nul sur les rails, très perturbés dans presque tous les transports en commun et des écoles fermées.

Les trois informations à retenir :

  • 806.000 manifestants recensés dans toute la France
  • 90% des trains à l'arrêt jeudi, presqu'autant vendredi
  • À Paris, onze lignes de métro sur seize fermées, le mouvement reconduit

806.000 manifestants en France

Le ministère de l'Intérieur a dénombré 806.000 manifestants en France. De son coté, la CGT en évoque plus de 1,5 million. Parmi les mobilisations massives, les autorités ont compté au moins 33.000 personnes à Toulouse, 25.000 à Marseille, 20.000 à Lyon, Montpellier et Bordeaux.

À Lyon, de brefs affrontements entre les forces de l'ordre et des groupes de jeunes cagoulés et de "gilets jaunes" ont d'ailleurs éclaté. Selon la préfecture de région, "des groupes d'individus violents" s'en sont pris à la police et la gendarmerie, jetant des projectiles avant de se prendre des gaz lacrymogènes en représailles. À Nantes, où 19.000 personne sont été dénombrées par les forces de l'ordre, les manifestants ont roué de coups une piñata géante, présentée comme une effigie d'Emmanuel Macron. Sur des images circulant sur les réseaux sociaux, on peut également apercevoir des individus habillés de noir caillasser une boutique SFR du centre-ville.

Dans des agglomérations plus modestes, plusieurs milliers de personnes se sont également rassemblées : 15.000 à Clermont-Ferrand, 13.000 à Lille et Rouen, au moins 10.000 à Tours, Rennes, Brest, Saint-Etienne, Bayonne et Pau, au moins 9.000 à Strasbourg, Perpignan, Limoges, Saint-Nazaire ou Caen. Dans la ville normande, les syndicats évoquent "une première historique". À Nice, on a compté 4.500 personnes selon la préfecture, 9.000 à 10.000 selon la CGT.

À Paris, le cortège ralenti, des débordements place de la République

Le départ de la manifestation parisienne, prévu à 14 heures de la gare du Nord pour rallier la place de la Nation, a été retardé en raison du grand nombre de personnes rassemblées en tête de cortège. La manifestation était encadrée d'un important service d'ordre syndical et de quelque 6.000 policiers et gendarmes (55 unités de forces mobiles et 15 BRAV, les brigades de répression de l’action violente). Malgré tout, des incidents ont éclaté peu avant 16 heures. Une remorque de chantier a été retournée et incendiée, et plusieurs vitrines brisées non loin de la place de la République, où des manifestants sont restés bloqués environ trois heures. Les forces de l'ordre y ont essuyé des jets de projectile auxquels elles ont répliqué par des tirs de lacrymogène. 

remorque

Une remorque de chantier a été incendiée jeudi après-midi aux abords de la place de la République par des black blocs. © Salomé Legrand pour Europe 1

En fin d'après-midi, la CGT faisait état de 250.000 manifestants dans la capitale, 65.000 selon le ministère de l'Intérieur et seulement 40.500 d'après le comptage réalisé par le cabinet Occurence pour un collectif de médias. Pour limiter le risque de casse, les commerces ont été fermés le long du parcours. Selon des informations d'Europe 1, 57 personnes ont été placées en garde à vue.

Une journée de galère dans les transports en commun

À la SNCF, on comptait 55,6% de grévistes en moyenne jeudi (85,7% des conducteurs et 73,3% des contrôleurs), selon la direction, un chiffre jamais vu depuis 2007. En outre, 57% des aiguilleurs étaient aussi en grève. "Avec moins de 10% du trafic habituel sur l'ensemble du réseau", le groupe avait appelé ses usagers à annuler leurs déplacements. Pour la journée de vendredi, le trafic SNCF sera "encore très perturbé" par la grève, a fait savoir la direction. Elle indique que 90% des TGV et 70% des liaisons TER sont déjà annulées.

Côté métro parisien, onze lignes sur les seize qui traversent la capitale étaient fermées jeudi. Seules les lignes 1 et 14, qui sont automatisées, circulaient normalement. La moitié des RER A et un tiers des RER B roulaient, mais seulement aux heures de pointe. Le réseau autobus et tramways était un peu mieux desservi. À la mi-journée, les deux principaux syndicats à la RATP, Unsa et CGT,ont annoncé une reconduction du mouvement dans les transports parisiens jusqu'à lundi inclus. Vendredi, dix lignes de métro seront fermées, seules la 1, la 4 et la 14 fonctionneront.

Par ailleurs, le groupe activiste Extinction Rebellion (XR) a revendiqué jeudi la "mise hors service" de 3.600 trottinettes électriques en libre service, pour dénoncer leur impact écologique et soutenir la grève. L'opération a été menée à Paris (2.020 engins mis hors d'usage selon XR), Lyon (1.500) et Bordeaux (90), "en recouvrant leur QR code pour les rendre inutilisables", et ainsi empêcher le déblocage des appareils à l'aide du smartphone de l'utilisateur, a indiqué XR dans un communiqué.

Aérien : le court et moyen-courrier touché         

Jeudi, les compagnies aériennes avaient réduit de 20% leur programme de vols aux aéroports de Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly, Beauvais, Lyon, Marseille, Toulouse et Bordeaux. Chez Air France, 30% des vols intérieurs et 15% des moyen-courriers ont été supprimés. Pour vendredi, Air France a également annoncé l'annulation de 30% de ses vols intérieurs et de près de 10% de ses vols moyen-courrier.

51,15% d'enseignants grévistes dans le primaire

Plus d'un fonctionnaire sur quatre était en grève jeudi à 18 heures (26% exactement), selon les services du secrétaire d'Etat Olivier Dussopt, tandis que la CGT estime à 45% le taux de grévistes dans la seule fonction publique d'Etat. Dans l'enseignement primaire, 51,15% d'enseignants grévistes ont été recensés, et 42,32% dans le secondaire, selon les chiffres du ministère de l'Education nationale. Les chiffres officiels sont toutefois bien inférieurs à ceux communiqués par les syndicats, qui évoquent de 70% a 75% de grévistes. 

Le gouvernement rapporte également 13,76% de grévistes dans la fonction publique territoriale et 18,9% dans les hôpitaux (dont 8,7% d'absents et 10,2% de personnels assignés).

Le gouvernement se dit serein

Face à cette mobilisation, pas question pour le gouvernement d'afficher quelque inquiétude que ce soit. Emmanuel Macron est "calme et déterminé" face au mouvement de contestation, a indiqué l'Elysée mercredi. Par ailleurs, "l'architecture générale" de la réforme sera annoncée en milieu de semaine prochaine par le Premier ministre, Edouard Philippe. Ce dernier a d’ailleurs salué jeudi après-midi la bonne organisation des manifestions et rendu "hommage aux organisations syndicales", à l'issue d'un déplacement au ministère des Transports, à Paris.