"Djihad médiatique" : le mystère Farouk Ben Abbes

Farouk Ben Abbes comparait libre devant le tribunal correctionnel de Paris.
Farouk Ben Abbes comparait libre devant le tribunal correctionnel de Paris. © Thomas SAMSON / AFP
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avec AFP
Belgo-Tunisien de 32 ans, Farouk Ben Abbes comparaît libre pour association de malfaiteurs à visée terroriste. Il nie les faits qui lui sont reprochés et parle de fantasme.

Cité dans plusieurs dossiers antiterroristes mais jamais condamné, Farouk Ben Abbes, figure de l'islamisme radical jugé à Paris pour avoir administré un site djihadiste de référence dans les années 2000, a dénoncé jeudi des "fantasmes" à son encontre.

"Les partisans de la vérité". Le Belgo-Tunisien de 32 ans comparaît libre depuis mercredi devant le tribunal correctionnel pour association de malfaiteurs à visée terroriste, au côté de deux autres hommes. Un quatrième prévenu est en Syrie. Tous sont jugés pour avoir administré à la fin des années 2000 le site djihadiste francophone de référence Ansar al-Haqq, "Les partisans de la vérité", désormais fermé. Et surtout accusé d'y avoir incité au combat armé, dans un "djihad médiatique" prôné notamment par Al-Qaïda.

Une grande responsabilité, "avec le recul". Dans ce dossier ancien, jugé de manière "beaucoup trop" tardive de l'aveu de la présidente du tribunal, Farouk Ben Abbes est accusé d'avoir traduit et diffusé sur ce forum de la propagande djihadiste, entre 2007 et 2009, alors qu'il séjournait en Egypte puis dans la bande de Gaza. A-t-il cherché à endoctriner, à recruter ? Il a soutenu que ses publications n'avaient toujours eu un but qu'informatif, tout en affirmant "mesurer aujourd'hui la responsabilité qui a été la (sienne), avec le recul".

Pas d'"éléments matériels" ? Mais si l'on connaît aujourd'hui le rôle fondamental d'internet et des messageries instantanées dans les départs massifs pour la Syrie, Farouk Ben Abbes a demandé à être jugé au regard du contexte de cette époque où le djihad se menait à Gaza ou au Waziristan : "Je regrette énormément de choses, mais je ne veux pas non plus qu'on donne à mes actes une portée qu'ils n'avaient pas". Pour ses avocats, nulle part dans le dossier n'apparaît l'élément "matériel" nécessaire à des poursuites pour association de malfaiteurs terroriste.

Une définition personnelle du djihad. Ce petit homme aux airs sages et au discours très construit a longuement insisté sur sa définition du "djihad" : une "résistance", "le droit à une population de se défendre en cas d'agression". Ni "attentats", ni "exportation des combats". C'est dans cette optique qu'il assure être parti pour Gaza, entre 2008 et 2009, mener un "djihad humanitaire". Il s'était trouvé là-bas au contact d'un groupe djihadiste palestinien lié à Al-Qaïda, "L'Armée de l'islam", qu'il n'a jamais intégré, a-t-il soutenu.

Ben Abbes a concédé une "grosse part d'erreur dans (son) activité", "avoir transposé ailleurs" ce qu'il voyait à Gaza, "avoir vu Al-Qaïda comme des résistants en occultant ce qu'ils faisaient à côté". "Il y a énormément de choses qui se disent sur moi, ça a construit un personnage, des fantasmes", a-t-il affirmé.