Catherine, 52 ans, aidante de son compagnon : "Il fallait que je m'entoure de personnes ressources"

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Anaïs Huet , modifié à
Il y a sept ans, Catherine a dû quitter son travail pour devenir l'aidante de son compagnon, gravement handicapé. Elle témoigne dans l'émission d'Olivier Delacroix sur Europe 1.
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Cela fait sept ans que Catherine, une Niçoise de 52 ans, s'occupe nuit et jour de son compagnon, atteint d'un très lourd handicap suite à une encéphalite. Au micro d'Olivier Delacroix sur Europe 1, elle a confié la difficulté de cette prise en charge, le soutien très limité des pouvoirs publics et l'absolue nécessité de ne pas s'oublier.

"Mon compagnon souffre d'une démence assez sévère suite à une encéphalite. Depuis sept ans, il est totalement dépendant pour tous les actes de la vie quotidienne : se lever, se laver, s'habiller, manger, tout. Il a été entre la vie et la mort pendant quelques mois. Les médecins avaient très peu d'espoir. On nous avait donné trois semaines. Ça fait sept ans et il est toujours là.

Le jour où je me suis rendue compte qu'il n'était plus capable d'assurer son hygiène personnelle, où il a commencé à mal manger, j'ai pris le relais très progressivement. Je voyais qu'il n'était plus capable de faire ce genre de gestes. Je suis devenue son aidante sans le savoir. Au début, personne ne m'a dit que je l'étais. C'est moi qui l'ai découvert toute seule. Étonnamment, je n'avais jamais entendu parler de ce rôle, de ce nom d'aidante. Et pourtant, autrefois, dans une précédente vie, j'ai été aide-soignante.

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Quand l'aidant n'est pas aidé

Je n'étais déjà plus aide-soignante quand l'accident est arrivé, et ce pour des raisons personnelles. J'en avais un petit peu assez de porter aide, secours et assistance à mon prochain, étrangement… J'ai travaillé dans une grande surface. J'ai arrêté de travailler, j'ai pris ce fameux congé qui s'appelait en 2011 le 'congé de solidarité familiale', qui permettait de s'organiser pour la suite. Ce congé est de trois mois, renouvelable une fois. J'avais le choix : soit je remplissais des dossiers pour faire des demandes d'aides à domicile et je continuais à travailler, soit je me débrouillais moi-même. J'ai donc démissionné au bout de six mois. 

Ce qui accompagne cette aide financièrement ? Rien ! Ce congé n'est pas rémunéré, c'est juste une suspension du contrat de travail, qui permet à l'employé de retrouver son poste à l'issue de ce congé. C'est l'un des seuls avantages. Il y a quand même des rémunérations, dans certaines conditions très restrictives. C'est très curieux : on peut être un petit peu rémunéré pour certains actes, mais entre 3,50 et 5 euros de l'heure.

À savoir…

Selon la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), 8,3 millions de personnes aidaient un proche malade, âgé ou handicapé, en 2008 en France, dont 57% de femmes.

En 2016, la France a instauré, par la loi d'adaptation de la société au vieillissement (ASV), le "congé du proche aidant", d'une durée d'un an maximum sur l'ensemble de la carrière. Le congé de proche aidant est ouvert à tout salarié justifiant d'une ancienneté minimale d'au moins un an dans son entreprise, et ne peut être demandé que pour un certain degré de parenté avec le malade. Cette période n'est pas rémunérée par l'employeur (sauf dispositions conventionnelles ou collectives le prévoyant)

Se préserver autant que possible

Oui, être l'aidante est un engagement fort. Oui, il m'est arrivé de craquer, mais c'était il y a très longtemps. Fort heureusement, je me suis rendue compte très rapidement qu'il fallait que je m'entoure de personnes ressources, et qu'il ne fallait surtout pas rester seule. Mon compagnon est quand même atteint d'un lourd handicap psychique. C'est très compliqué parce que je ne peux pas négocier certaines choses avec lui.

Mon conseil pour ceux et celles qui sont dans mon cas : il faut s'entourer, être vigilant à ne pas trop s'oublier, à ne pas trop sacrifier, à ne pas y laisser trop de plumes."