Police Conflans Sainte Honorine Collège Attentat Samuel Paty 3:03
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Gladys Laffitte, Jean-Rémi Baudot, édité par Mathilde Durand , modifié à
Après l'attentat de Conflans-Sainte-Honorine, le gouvernement passe aux actes. Plusieurs opérations de police sont en cours concernant des individus connus des services de renseignements ou qui ont posté des messages haineux sur Internet. Deux structures sont également dans le viseur de l'exécutif : le CCIF, collectif décrié contre l'islamophobie, et BarakaCity. 
DÉCRYPTAGE

"Pas une minute de répit pour les ennemis de la République". Sur Europe 1 lundi, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin détaillait les mesures prises lors du Conseil de défense de dimanche, deux jours après l'attentat de Conflans-Sainte-Honorine, où un professeur a été tué pour avoir montré des caricatures de Charlie Hebdo. Le gouvernement entend frapper fort. Des opérations de police ont donc été lancées dès lundi contre des dizaines d'individus sur l'ensemble du territoire, notamment dans l'Oise. Ces derniers n'ont pas forcément de liens, mais appartiennent à la mouvance islamiste. 

Des visites policières en cours 

Dès 6 heures, les personnes concernées ont reçu la visite de policiers mais également d'autorités judiciaires. Certains sont déjà connus des services de renseignements, pour des prêches radicaux par exemple, et sont inscrits au FSPRT, le Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste. Ce fichier recense les personnes connues et suivies pour radicalisation, à différents degrés.

Mais tous les individus visités ne sont pas forcément fichés. Certains ont été visés car ils ont publié des messages haineux sur les réseaux sociaux, surtout depuis l'assassinat du professeur Samuel Paty, vendredi dernier. Des contenus qui font l'apologie du terrorisme ou qui justifient l'action de l'assaillant, un jeune homme de 18 ans, né à Moscou d'origine tchétchène. Quatre-vingts enquêtes ont été ouvertes.

Des associations dans le viseur

Les opérations de police visent les particuliers mais également les associations. Dans le viseur du gouvernement, BarakaCity ou encore le CCIF, le collectif contre l'islamophobie en France. Deux structures que Gérald Darmanin indiquait vouloir dissoudre en conseil des ministres. Selon les premiers constats de l'enquête, le CCIF avait été saisi par le père d'une des collégiennes de Conflans, furieux que le professeur d'Histoire-Géographie montre des caricatures du prophète Mahomet dans un cours sur la liberté d'expression.  

Le ministre de l'Intérieur classe cette organisation dans la catégorie des "ennemis de la République" et indique qu'elle est "manifestement impliquée" dans les évènements qui ont conduit la décapitation de Samuel Paty.

Le collectif contre l'islamophobie en France a été créé en 2003. Son objectif : apporter une aide juridique aux personnes victimes d'actes illégaux, jugés islamophobes. Mais l'association, qui dénonce régulièrement une "islamophobie d’Etat", est souvent taxée de faire la promotion du communautarisme voire d’empêcher tout discours critique sur l’Islam. Autre source de malaise : sa proximité avec la mouvance des Frères Musulmans.

La classe politique fracturée sur le CCIF

La classe politique est fracturée sur cette question. Une partie de la gauche s’est régulièrement affichée aux côtés du CCIF, souvent sur des slogans antiracistes comme le NPA, les Insoumis ou encore Europe Ecologie. Le 10 novembre 2019, une grande marche contre l’islamophobie, organisée par le CCIF, avait réuni plus de 13.000 personnes à Paris tout en créant la polémique, car elle s’était terminée par des cris d'Allahou Akbar.

Le député Insoumis de Seine Saint Denis, Alexis Corbière était à cette marche. Il prend aujourd'hui ses distances, tout en appelant à la prudence. "La manifestation à laquelle j'ai participé, il y avait des drapeaux français, des slogans comme 'Laïcité on t'aime, tu dois nous protéger'. Qu'en marge de cette manifestation, il ait été tenu des propos, que je n'ai pas entendu, c'est une chose, mais en rien ce n'était le mot d'ordre sur lequel cette manifestation a eu lieu. S'il y a des liens, un engrenage qui a mené à cet acte violent, les responsables doivent être sanctionnés et même pourquoi pas l'association doit être dissoute. A ce stade il faut qu'il y ait un cadre légal à tout cela. Si Gérald Darmanin pense qu'il existe, moi je ne dispose pas de ces éléments", détaille l'élu.