Suicide ou crime ? Le docteur Muller clame son innocence

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avec AFP , modifié à
L'ancien médecin légiste comparaît pour la troisième fois devant une cour d'assises pour le meurtre de son épouse.

Le procès. Il clame toujours son innocence, défendant mordicus la thèse du suicide. Jean-Louis Muller, déjà condamné à deux reprises à 20 ans de prison pour le meurtre de son épouse, comparaît depuis lundi pour la troisième fois devant une cour d’assises. L'ancien médecin légiste s’est présenté libre devant les jurés à Nancy, comme lors de ses deux premières comparutions où aucune preuve formelle n'avait pu être établie contre lui. "Vous avez farouchement nié, c'est encore votre position ?", lui a demandé la présidente de la cour d'assises, Marie-Cécile Thouzreau, à l'ouverture de la première audience. "Je suis innocent", a répondu l'accusé, costume sombre et fines lunettes. "C'est une affaire extrêmement difficile. Nous avons deux semaines pour en débattre complètement. Je réserverai mes commentaires à la Cour et aux jurés", avait déclaré peu avant son nouvel avocat, l'un des champions de l'acquittement Eric Dupond-Moretti, ajoutant avoir l'intention de se "faire entendre". Le procès doit durer jusqu'au 31 octobre.

Une victime, un suspect, mais pas de preuves. Dans la soirée du 8 novembre 1999, le corps de Brigitte Muller, une documentaliste de 42 ans, est retrouvé au sous-sol du domicile conjugal à Ingwiller dans le Bas-Rhin. Elle présente une plaie béante à la tête et le 357 Magnum de son époux se trouve à ses pieds. Le parquet concluant à un suicide, l’affaire avait été à l’époque rapidement classée. Mais les proches de la victime avaient ensuite obtenu la réouverture du dossier, rejetant la thèse d’un acte désespéré. Jean-Louis Muller avait alors été mis en examen pour meurtre, en 2001, avant d’être renvoyé devant les assises en 2007. Et ce contre l'avis du parquet général de Colmar qui avait jugé les charges insuffisantes. De fait, aucune preuve formelle n'a jamais pu venir étayer l'accusation, qui se base sur d'innombrables expertises, souvent contradictoires et parfois fluctuantes, mais qui ont malgré tout emporté par deux fois la conviction des jurés populaires, en 2008 et 2010, devant les assises du Bas-Rhin puis du Haut-Rhin.

Les investigations avaient malgré tout révélé un climat houleux dans le couple. Selon des proches, Brigitte, qui venait de rencontrer un autre homme, envisageait de quitter son époux. Parmi les autres éléments à charge contre Jean-Louis Muller : la faible présence de particules de résidus de tir découvertes sur son épouse alors que des traces de poudre avaient été retrouvées sur lui.

Une défense déroutante. Lors des deux premiers procès, l'attitude de Jean-Louis Muller avait parfois décontenancé, voire agacé, d'aucuns le jugeant arrogant. L'ancien médecin légiste avait carrément refusé de s'exprimer lors de son second procès, pour protester contre l'absence de reconstitution du drame lors de l'instruction. Titulaire d'un diplôme de médecine légale et auteur d'une thèse sur "les effets des projectiles de petit calibre", cet amateur d'armes à feu était lui-même inscrit sur la liste des experts de la Cour d'appel de Colmar au moment du drame.

Les convictions d’une famille. Quelques jours avant l'ouverture des débats, l'un des avocats des parties civiles, Maître Michael Wacquez, a confié son optimisme à l’AFP : "nous sommes sereins, bien que peinés que la famille de la victime soit obligée d'affronter un troisième procès". Et de soutenir : "certes, nous n'avons ni d'aveux, ni d'éléments matériels incontestables, mais nous avons une accumulation de charges. Lorsqu'on additionne tous les éléments ça conduit à une culpabilité, telle que deux cour d'assises l'ont déjà reconnue". Jean-Louis Muller encourt une peine de 30 ans de réclusion criminelle.