AZF : un an ferme pour le directeur du site

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avec agences , modifié à
Serge Biechlin et Grande Paroisse ont été condamnés. Pas Total.

 L'explosion de l'usine AZF a été la pire catastrophe industrielle française depuis la seconde guerre mondiale. Onze ans après le drame qui a fait 31 morts et des milliers de blessés dans la Ville rose le 21 septembre 2001, la cour d'appel de Toulouse a condamné lundi l'exploitant de l'usine Grande Paroisse, une filiale du groupe Total, et son ex-directeur, Serge Biechlin, pour homicides involontaires "par négligence ou imprudence". En revanche, le groupe total et son ex-PDG ne sont pas poursuivis.

• Qui la cour désigne-t-elle pour responsables ?

Les responsables de cette catastrophe sont l'ex-directeur de l'usine ainsi que la filiale de Total exploitant celle-ci ,Grande paroisse. Serge Biechlin a donc été condamné à trois ans de prison dont deux ans avec sursis et 45.000 euros d'amende. S'il effectuera la partie ferme de sa peine, soit un an de prison, sous le régime de la semi-liberté, la cour est allée au-delà des réquisitions de l'avocat général (18 mois avec sursis et 15.000 euros d'amende). Cette décision a été motivée, selon le président de la cour d'appel, par le fait que "Biechlin a contribué à créer la situation qui a provoqué le dommage et n'a pas pris les mesures permettant de l'éviter : ces fautes ont exposé les salariés et la population à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait pas ignorer".

De son côté, la société administratrice de l'usine et filiale de totale, Grande Paroisse, écope de la peine maximale, soit 225.000 euros d'amende.

• Quelle est la cause de la catastrophe ?

salariés AZF blessés 930x620

En désignant les coupables de la catastrophe, la cour a également tranché sur la cause du drame : un accident chimique dû au mélange d'un produit chloré, le DCCNA,  avec du nitrate d'ammonium. Deux produits incompatibles qui se sont rencontrés à cause d'une mauvaise gestion des déchets toxiques.

Malgré l'absence de preuves matérielles, La cour a donc suivi l'accusation et la piste retenue par les experts judiciaires en écartant ainsi toutes les autres thèses, notamment celle d'une première explosion sur un site voisin de l'usine, avancée dans un rapport publié en août par la revue Préventique, spécialisée dans le droit du danger et le management du risque.

• Pourquoi Total est mis hors de cause par cette décision ?

Plusieurs parties civiles avaient demandé que le groupe Total et son ancien PDG, Thierry Desmarest, soient également poursuivis pour qu'une éventuelle sanction ne se limite pas à l'échelon subalterne. La cour d'appel a estimé que cette demande était irrecevable compte-tenu, de fait, de la responsabilité imputée à Grande Paroisse et Serge Biechlin. La ligne de défense  commune de Thierry Desmarest et Total a donc été validée : le fonctionnement d'une usine d'une filiale de Total, rachetée deux ans avant la catastrophe, ne remontait pas jusqu'à eux.

• Quelles suites sont envisageables ?

L'usine de AZF à Toulouse, 21092011, 930620

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Au terme de la lecture du délibéré, l'avocat de Grande Paroisse et de Serge Biechlin, a prévenu : " c'est une affaire qui ne fait que commencer". Me Daniel Soulez Larivière,  qui a qualifié cette décision de la cour d'appel comme "plus passionnelle que rationnelle", a également annoncé sa volonté de former le jour-même un pourvoi en cassation contre ces deux condamnations. Le conseil s'est dit prêt à aller jusqu'à la cour des droits de l'Homme de Strasbourg. Me Soulez Larivière veut maintenant lire l'intégralité des 600 pages de l'arrêt qui doit être transmis aux parties, mais a déjà déclaré: "si on est condamné à défaut d'autre cause, c'est un problème constitutionnel car on ne peut pas dire aux gens: démontrez qui a fait cela sinon vous êtes considérés comme coupables". "On ne peut pas sous prétexte qu'on est une filiale de Total se voir infliger un traitement différent d'un simple particulier", a ajouté le conseil.