Sauver les palmiers français du charançon rouge ? Trop tard, tranche l'Anses

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Introduit autour de 2006 via des cargaisons de palmiers à bas prix importées d'Egypte, le charançon produit des larves qui détruisent le palmier de l'intérieur. © VALERY HACHE / AFP
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avec AFP , modifié à
Selon un rapport publié mercredi, l'"aveu d'échec" face aux ravages du charançon rouge découle d'un "problème d'organisation collective et de volonté politique". Seul un contrôle et une sélection des spécimens à protéger semble désormais possible.

Il est déjà trop tard pour sauver tous les palmiers de la Côte d'Azur et du pourtour méditerranéen, estime l'Agence de sécurité sanitaire (Anses) qui recommande mercredi de protéger les spécimens qui le méritent ou qui peuvent l'être contre l'insecte qui les ravage, le charançon rouge. Le rapport, rédigé par un groupe d'experts à la demande du ministère de l'Agriculture, conclut à la quasi-impossibilité d'éradiquer le charançon dans les six départements du littoral méditerranéen et la Corse : il a tellement proliféré depuis 10 ans que le combat serait perdu d'avance.

Stabiliser l'épidémie, un objectif ambitieux... Introduit autour de 2006 via des cargaisons de palmiers à bas prix importées d'Egypte, le charançon produit des larves qui détruisent le palmier de l'intérieur. Dans la zone dite méditerranéenne, "l'objectif réaliste le plus ambitieux serait de stabiliser la population de charançon rouge du palmier et de réduire son impact sur la mortalité des palmiers, tout en contrôlant aussi longtemps que possible son aire d'extension géographique (...)", estime l'Anses, en soulignant que "le coût sera élevé".

... ou bien limiter la protection à une poignée de palmiers. Seconde alternative, selon l'Anses, pour les Pyrénées-Orientales, l'Aude, l'Hérault, le Gard, les Bouches-du-Rhône, le Var et les Alpes-Maritimes et la Corse : "envisager de limiter la protection à certains palmiers, notamment pour leur importance patrimoniale et proposer des espèces végétales de remplacement pour les zones non protégées". Autrement dit, planter d'autres arbres.

Lesquels ? L'Anses n'en dit rien, pas plus qu'elle ne tranche entre les vertus des méthodes de traitement, chimique ou biologiques (on utilise un champignon ou des vers pour s'attaquer au nuisible ou à ses larves), évoquant six combinaisons préventives possibles.

"Un problème d'organisation collective". "C'est un aveu d'échec. Faute d'organisation, on entérine la faillite et c'est dramatique", a réagi Michel Ferry, expert auprès de la FAO, l'agence de l'ONU pour l'agriculture et l'alimentation : "la lutte contre ce ravageur n'est pas un problème technique mais un problème d'organisation collective et de volonté politique comme en témoigne l'exemple des Canaries, ou celui des oasis où il a pu être éradiqué".

Les Canaries, un combat qui a porté ses fruits. Le rapport revient en détail sur l'exemple réussi des Canaries. L'Anses parle de "résultat exceptionnel", "fruit d'une réaction très rapide", "centralisée" et dotée de "moyens lourds". Les palmiers ont été géo-référencés, inspectés visuellement par un personnel formé capable de détecter le moindre symptôme, abattus dans les 24 heures quand leur assainissement complet semblait impossible. Dans les zones infestées, des traitements insecticides ont été massivement appliqués pour réduire la pression du charançon et protéger les palmiers sains, des pièges à phéromones déployés, et un embargo décrété. La crise financière de 2008 a été un atout inattendu : l'urbanisation touristique a marqué le pas, contribuant à éviter l'importation de palmiers d'ornement infestés dans l'archipel, selon le rapport.