Jean Jouzel fait partie des signataires de la tribune dans Le Monde. 1:41
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Anaïs Huet
Un projet de décret prévoit de réduire drastiquement les budgets de la recherche. Une décision qui pourrait avoir de graves conséquences selon le climatologue Jean Jouzel.
INTERVIEW

"Les budgets étaient sanctuarisés, c'est un véritable coup de massue", a dénoncé Jean Jouzel sur Europe 1 mardi matin. Avec sept autres grands chercheurs, celui qui a reçu le Prix Nobel de la paix en 2007 avec le Giec (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) a publié lundi une tribune dans Le Monde pour dénoncer les coupes budgétaires qui vont durement affecter la recherche. 

Un risque pour les jeunes scientifiques. "On parle de plus de 250 millions d’euros de coupes dans les ministères de la Recherche et de l’Ecologie", a précisé Jean Jouzel. Un projet de décret a en effet été présenté en commission des finances de l'Assemblée nationale, mercredi dernier, annulant 256 millions d'euros de crédits sur la mission "recherche et enseignement supérieur". Dans la tribune du Monde, ces huit grands noms de la recherche n'ont pas hésité à comparer cette décision à un "suicide scientifique et industriel". "La recherche, c'est une dynamique, une attractivité vis-à-vis des jeunes scientifiques", a souligné le climatologue, qui craint que la nouvelle génération se détourne de ces métiers. "Ils passent déjà un temps fou à écrire des projets de recherche qui n'obtiennent pas de financement. Le taux de réussite est inférieur à 10%", s'est-il alarmé.

Un décalage avec d'autres pays en pointe. Le risque est aussi de "décrocher" par rapport à d'autres pays, européens ou non, qui soutiennent ardemment la recherche. Dans leur tribune, les scientifiques notent le décalage. Alors que le CEA, le CNRS, l'INRA et Inria vont perdre 134 millions d'euros, "le gouvernement américain vient de décider de doubler son effort dans le domaine des recherches sur l'énergie". C'est aussi, pour Jean Jouzel, un "message extrêmement négatif sur l'écologie", quelques mois après la COP21.

L'importance de la recherche fondamentale. Selon le climatologue, ce décrochage pourrait aussi avoir des conséquences importantes à long terme. "Il y a toujours des recherches dont on a le sentiment qu’elles ne servent pas à grand-chose", a-t-il soutenu, citant son propre exemple. "Quand on a commencé à étudier les glaces polaires il y a 40 ans, nous n'imaginions pas qu'elles serviraient autant. Dans le long terme, la recherche fondamentale sert toujours". 

>> L'interview de Jean Jouzel en intégralité sur Europe1.fr