Les bénéfices du mois sans alcool pour la santé sont aussi bien "physiques que psychiques" selon Michel Reynaud. 3:56
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Séverine Mermilliod , modifié à
Michel Reynaud, professeur honoraire de psychiatrie et d’addictologie, est président du Fonds actions addictions. Au micro d'Europe 1, il a défendu le "Dry January" ou "janvier sec", le mois sans alcool lancé par des associations que le gouvernement a finalement refusé de soutenir.
INTERVIEW

Et si vous tentiez le défi du "0 alcool" pendant un mois ? Michel Reynaud, professeur honoraire de psychiatrie et d’addictologie et président du Fonds actions addictions, fait le "Dry January" ou "janvier sec" pour la deuxième année. D'après lui, si le gouvernement a renoncé à soutenir cette action lancée par une trentaine d'associations, malgré ses nombreux bénéfices, c'est la faute du lobby de l'alcool.

Des bénéfices physiques et psychiques 

"Le Dry January permet surtout de percevoir toutes les circonstances où l'on boit, et ce pourquoi on est amené à boire. Il y a des intérêts physiques, mais l'intérêt psychique est plus important encore", assure le professeur sur Europe 1. "Vous analysez votre consommation et vos moments de consommation. Est-ce pour se détendre en rentrant chez soi ? Pour s'endormir ? Parce que vous prenez du fromage ou de la viande ?"

Les bénéfices d'un mois sans alcool sont nombreux et se constatent aussi, selon Michel Reynaud, physiquement. "Vous vous sentez plus détendu, vous dormez mieux, et vous vous sentez mieux concentré. Vous perdez un peu de poids, à condition de ne pas se précipiter sur le chocolat pour compenser. Vous avez une plus jolie peau. La tension baisse, car l'hyper-consommation d'alcool est l'une des premières cause d'hypertension."

En outre, vous ferez des économies d'argent. Pour les vainqueurs du défi, les associations constatent aussi "des bénéfices à six mois, car on sait que ceux qui font ce "dry January" diminuent en moyenne leur consommation d'un verre par jour", précise le professeur.

"Le vin fait tellement partie de notre culture" que l'on "refuse de voir les dangers"

Alors pourquoi le gouvernement a-t-il renoncé à soutenir la campagne via Santé publique France ? Selon Michel Reynaud, c'est à cause du lobby du vin et de l'importance de ce produit pour les Français. "Le vin fait tellement partie de notre culture, notre richesse, nos plaisirs... C'est l'une des premières parts de nos importations et bénéfices à l'extérieur", rappelle-t-il. "Alors on se dit qu'il faut le préserver et on refuse de voir l'essentiel des dangers".

"Par ailleurs le lobby de l'alcool fait tout pour bloquer les mesures efficaces", note-t-il, alors qu'un éditorial de la Revue du vin de France regrettait récemment que des associations "fassent régner la peur en associant le vin à la mort et au cancer". 

Pour le président du Fonds action addictions, c'est bel et bien le cas : "Le vin est associé à la mort, au cancer, comme tous les alcools. Aux violences conjugales, aux violences faites aux enfants... C'est le meilleur psychotrope, le plus subtil, et en même temps le plus dangereux. Ce que nous voulons c'est que les Français perçoivent cette partie-là et choisissent en connaissance de cause."

"La viticulture et le lobby de l'alcool en général, sous la couverture du bon vivant, des consommations d'esthètes par les gens qui boivent du vin cher et de qualité, masquent le gros buveur - c'est-à-dire des gens qui boivent des vins pas chers", affirme par ailleurs Michel Reynaud. "On sait que 80% de l'alcool vendu est acheté par 20% ; soit par les gros buveurs à risques et/ou dépendants, et ils [les lobbys] ont besoin de cette population là."

Ce mois sans alcool s'adresse surtout aux buveurs importants, mais pas aux personnes dépendantes qui, elles, doivent s'orienter vers des plateformes d'écoute.