Rokhaya Diallo évincée du CNNum : "Mounir Mahjoubi a reculé devant une petite pression des réseaux sociaux"

Rokhaya Diallo
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Invitée d'Europe 1, la militante antiraciste est revenue sur son éviction polémique du Conseil national du numérique.
INTERVIEW

La présidente Marie Ekeland et la quasi-totalité des membres du Conseil national du numérique (CNNum) ont claqué la porte après la mise à l'écart de Rokhaya Diallo, épinglée pour certaines de ses déclarations, notamment sur le voile ou la lutte contre le racisme. "Je crois que les positions que je défends, notamment sur les questions de racisme, ne font pas l'unanimité, mais c'est le propre du débat démocratique. Il semblerait que les personnes qui ne sont pas d'accord avec mes propos aient fait pression sur une partie du gouvernement et ce gouvernement, au lieu de rester sur la nomination initiale, a demandé ma mise à l'écart", a expliqué mercredi la militante antiraciste, au micro d'Europe 1 Bonjour.

Confronter des avis contradictoires. Dès lors, il n'était plus possible que le Conseil national du numérique perdure en sa composition actuelle, "dans la mesure où Marie Ekeland a proposé un projet cohérent autour de trente personnalités, dont moi, qui s'appelait 'Penser demain' et qui consistait à réfléchir sur le numérique pour demain", affirme Rokhaya Diallo. "Marie Ekeland avait proposé un projet très audacieux, qui était un projet de réconciliation et de dialogue et qui, peut-être, était trop en avance par rapport à ce qu'est la France aujourd'hui. Peut-être que l'on n'est pas encore prêt aujourd'hui, en France, à discuter avec des personnes qui ont des avis contradictoires".

Le renoncement de Mounir Mahjoubi. La militante ne mâche pas non plus ses mots à l'égard de Mounir Mahjoubi, le secrétaire d'Etat au numérique, qui "avait validé" sa présence, avant finalement de l'écarter. "Il me connait, il connait mes idées", pointe-t-elle. "Je crois que ce n'est pas tant ma présence qui posait problème que les réactions qu'elle suscitait. Malheureusement, le secrétaire d'Etat au numérique a reculé devant ce qui n'était qu'une petite pression sur les réseaux sociaux, et dont je n'ai pas pu avoir la preuve parce qu'elle était surement off-line. Ça donne le sentiment qu'il souhaite une Conseil national du numérique aux idées proches du gouvernement", a encore déploré Rokhaya Diallo. Elle évoque aussi la haine en ligne dont elle a été l'objet : "J'ai été ciblée par des menaces de mort de la fachosphère, et des injures racistes suite à ma nomination".

Des prises de position polémiques. Rokhaya Diallo a notamment été critiquée par de nombreux politiques, comme la député LR Valérie Boyer, pour avoir considéré le port du voile islamique en France comme un marqueur de féminité. "Je considère que chaque femme peut librement disposer de son corps et que, si elle choisit de le couvrir ou de le découvrir, il n'y a pas de raisons de l'empêcher de le faire. Il y a de nombreux vêtements, de nombreux attributs qui marquent la féminité et pour moi le voile en est un parmi d'autres", a-t-elle encore défendu au micro d'Europe 1.

"En France, on vit dans un pays où il y a un énorme tabou sur les questions raciales", ajoute-t-elle. "Ce que je dis, je ne suis pas la seule à le penser. Il se trouve que l'on est très très peu à pouvoir s'exprimer sur le racisme dans les médias, mais ce n'est pas en fermant le couvercle sur des propos dérangeants que l'on avance", conclut Rokhaya Diallo.