L'économiste Alain Minc était l'invité de Sonia Mabrouk, mardi sur Europe 1. 3:50
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Pauline Rouquette , modifié à
Laissée en suspens durant la crise du Covid-19, la réforme des retraites est de nouveau sur la table et pourrait être le dernier chantier du quinquennat Macron. Invité d'Europe 1, mardi, l'économiste Alain Minc estime qu'un relèvement de l'âge de départ en retraite est "le seul signe de sérieux que la France peut envoyer au monde".
INTERVIEW

"La question n'est pas de savoir si la loi sera votée en novembre 2021, mais de savoir ce que le candidat Macron assume en terme de réforme des retraites", affirme Alain Minc, économiste et essayiste invité d'Europe 1, mardi.

Mise de côté durant la crise sanitaire, la réforme des retraites pourrait être le dernier grand chantier du quinquennat d'Emmanuel Macron. Cependant, la refonte systémique présentée avant la pandémie n'est plus d'actualité, remplacée par le projet d'un simple relèvement de l'âge de départ.

"Je suis convaincu que nous sommes dans l’urgence d’envoyer le signe du passage à 64 ans", insiste l'économiste, y voyant là le "seul signe de sérieux" que la France puisse envoyer au monde.

"On fait la réforme pour ceux qui permettent aux fonctionnaires français d’être payés"

"Il y a des élections en Allemagne, le candidat CDU a de bonnes chances de gagner et l’Allemagne va redevenir économiquement un peu orthodoxe", développe l'économiste. "Nous avons, économiquement, merveilleusement géré cette passe difficile, mais à guichets ouverts", poursuit-il, "il va falloir envoyer au monde un signe de sérieux, et c'est le seul signe de sérieux qui a des conséquences majeures".

Pour autant, Alain Minc refuse d'user de raccourcis selon lesquels la France ferait cette réforme pour les autres. "On fait la réforme pour ceux qui permettent aux fonctionnaires français d’être payés", soutient-il, ajoutant que la France est le principal emprunteur européen. "Il y a une confiance dans la France, mais il faut empêcher qu’elle ne s’érode", avance l'économiste, qui assure qu'"une réforme des retraites simple, même douloureuse, correspond au bon sens".

"Rester à des choses simples"

"C'est le bon sens parce que ça colle à l'espérance de vie", insiste l'économiste. "Quand la retraite a été inventée au 19ème siècle par Bismarck, quand vous comparez l'espérance de vie et l'âge du départ à la retraite et si vous appliquez les critères à aujourd'hui, vous verriez que l'âge de départ en retraite devrait être 84 ans. Nous n'en sommes pas là."

Récemment, le rapport Blanchard-Tirole sur les grands défis économiques dit que cette réforme des retraites ne peut être menée sans d'autres évolutions sur le marché du travail pour les seniors actifs, et sans l'assortir d'une réforme du système de santé pour soutenir les travailleurs.

"Il faut revenir à des choses simples" répond Alain Minc, qui affirme que les économistes Jean Tirole et Olivier Blanchard souhaitent que la réforme soit reprise avec un délai, même raccourci. "Moi, j'étais pour cette réforme avec ce qu'on appelle la clause du grand père, c'est à dire elle s'applique pour les gens qui entrent aujourd'hui sur le marché du travail", dit-il. "Est ce que vous avez le souvenir de ce qu'était le calcul de votre propre retraite au moment du pseudo projet de réforme ? En aucun cas, car c'était d'une complexité incroyable".

Après la crise sanitaire, il faut "rester à des choses simples", achève Alain Minc. "Et le passage de 62 à 64 ans, c'est quelque chose que tout le monde peut comprendre, à défaut de l'aimer ou de l'approuver."