Petit précis des relations entre l'Élysée et les médias

Emmanuel Macron entouré de journalistes en Allemagne, lundi 15 mai. AFP
Emmanuel Macron entouré de journalistes en Allemagne, lundi 15 mai. © AFP
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Thibaud Le Meneec , modifié à
Emmanuel Macron est critiqué pour avoir choisi les journalistes qui le suivent au Mali, vendredi. L’occasion de revenir sur les relations entre le pouvoir et les journalistes autour de quelques mots-clés.

Et si le premier couac du quinquennat Macron était une maladresse avec les médias ? Jeudi, plusieurs rédactions, dont Europe 1, ont relayé une tribune rappelant au nouveau président qu’il n’avait pas à choisir les journalistes qui l’accompagnent, après que l’Élysée a décidé de sélectionner directement ceux qui le suivraient au Mali, vendredi, ce qu’elle a ensuite démenti. Voyages officiels, pools, confidences "off"... Les relations entre l'Élysée et les journalistes sont souvent fantasmées. Europe1.fr se penche sur les concepts familiers qui lient la présidence et les journalistes politiques.

#Cour de l’Élysée

Le deuxième bureau de nombreux journalistes et photographes ? C’est en tout cas dans la cour de l’Élysée que les ministres viennent souvent, à la sortie du Conseil des ministres, répondre aux questions des médias, qui y réalisent nombre de duplex pour les chaînes d’info en continu. Jeudi, les journalistes et les photographes ont pourtant été priés d’évacuer les lieux après l’arrivée des membres du gouvernement. Fronde des médias, critiques dans les rédactions. Porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner a indiqué que la cour serait ouverte dès la semaine prochaine, tout en rappelant les ministres à la discrétion : "Les journalistes ne manqueront pas de continuer à poser des questions sur ce qui s'est dit et ce qui est fait, mais il appartiendra à chacun des ministres de veiller au respect de ce qui se discute au sein du Conseil des ministres."

#Voyages officiels

La routine, ou presque, des journalistes politiques. Régulièrement, le chef de l’État se rend à l’étranger lors d’un déplacement couvert par les grands médias nationaux de la presse écrite, de la radio et de la télévision. "Parfois, il nous arrive d'affréter un avion de délégation pour transporter les journalistes", note Gaspard Gantzer, ancien conseiller en communication de François Hollande de 2014 à 2017. Mais les rédactions payent, dans la très grande majorité des cas, leurs billets. Lors de ces voyages officiels, ou VO, les journalistes demandent systématiquement à parler au président de la République. Ce qui est alors à l’appréciation des conseillers du chef de l’État.

François Hollande avec des journalistes, lors d'un déplacement en Suisse, en avril 2015. (AFP)

© AFP

#Pools

Ce mot anglais correspond à une pratique très fréquente pour les médias. Sur un déplacement où les communicants veulent réduire la présence physique de journalistes et éviter la cohue, il est mis en place un pool : un journaliste ou un photographe suit le président pour l’ensemble de ses confrères, à qui il transmet les éléments qu’il a récoltés. "La règle, c’est que ça tourne, c’est-à-dire qu’un même média ne va pas être celui qui gère le pool à chaque déplacement. En revanche, pour la télé, c’était TF1 et France 2 en alternance", précise Gaspard Gantzer.

#Conférences de presse

Un président, ses ministres et plusieurs dizaines de journalistes, réunis à intervalles réguliers dans la salle des Fêtes de l’Élysée. La Vème République est familière de ce rituel formel qui permet au chef de l’Etat de s’expliquer auprès des médias sur sa politique. L’exercice réserve parfois des moments particuliers, comme lorsque François Hollande donne en 2014 des nouvelles de sa compagne à l’hôpital ou quand Nicolas Sarkozy déclare en 2008 qu’avec "Carla, c’est sérieux".

#Interviews

Souvent demandées, rarement accordées. "On refusait 99% des demandes d’interviews", estime Gaspard Gantzer, chargé de faire le tri et d’établir le plan de communication de la présidence. "L’idée était de cibler des médias pour que ça ait du sens", détaille-t-il, quelques jours après avoir quitté le Château. Pour l’heure, la nouvelle équipe en place tente de raréfier la parole du président, sur la lancée des dernières semaines de campagne où Emmanuel Macron commençaient à se faire rare dans les médias. Mais le couple continue d'apparaître, malgré lui peut-être, sur les couvertures de la presse people, qui ont participé à le faire connaître du grand public.

#Off

Y a-t-il pratique plus consubstantielle du journalisme politique ? Le off, pour off the record, consiste pour un homme ou une femme politique à distiller une information ou une confidence à un journaliste sous couvert d’anonymat, de manière à libérer sa parole, en principe. Très courant sous François Hollande qui en raffolait, le off devrait être bien plus rare sous la nouvelle présidence. Cette pratique est en effet honnie par les conseillers d’Emmanuel Macron, qui appliquent les méthodes de Barack Obama dans ce domaine. Lequel, sous couvert d’une communication cool, la verrouillait en fait à double tour.

 

Un trident de communicants pour protéger Macron

Sibeth Ndiaye, Sylvain Fort, Michèle Marchand. Trois noms peu connus, trois personnages dans l’ombre, mais trois communicants très présents autour d’Emmanuel Macron. Avec une mission : contrôler au maximum l’image du nouveau chef de l’Etat, déclinée selon le périmètre de chacun. La gestion des relations avec la presse pour Sibeth Ndiaye, ancienne collaboratrice de Dominique Strauss-Kahn et premier rempart entre Emmanuel Macron et les journalistes. La stratégie globale de communication pour Sylvain Fort, qui a travaillé à la BNP Paribas avant de rejoindre le fondateur d’En Marche!. Enfin, le contrôle de l’image pour Michèle Marchand, papesse des paparazzis et du papier glacé. Ferme, sans fioritures, implacable avec les médias qui publient des informations qui déplaisent, la communication du président Macron veut se démarquer à tout prix de celle de son prédécesseur, François Hollande.