Mort de Chirac : un bon vivant, "une machine" qui "avait besoin de carburant"

Jacques Chirac dégustant des produits régionaux lors du salon de l'Agriculture de l'an 2000.
Jacques Chirac dégustant des produits régionaux lors du salon de l'Agriculture de l'an 2000. © FRANCOIS GUILLOT / AFP
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Ugo Pascolo, avec Marion Gauthier, Jean-Luc Boujon, Caroline Baudry
La bonne chère faisait incontestablement partie de la vie de Jacques Chirac, décédé jeudi à 86 ans. Comme en politique, l'ancien président a laissé son empreinte dans les bistrots qu'il aimait fréquenter. 

C’était incontestablement un bon vivant. Outre l'homme politique et le friand de sport, c'est un grand amateur de gastronomie que la France a perdu avec le décès de Jacques Chirac ce jeudi 26 septembre

Il y a des clients qui ont le pouvoir de faire et défaire un restaurant, Jacques Chirac était de ceux-là. Il a par exemple fait la réputation de l'emblématique brasserie Lipp, au cœur du quartier de Saint-Germain-des-Prés, qui résonne encore des souvenirs de ce client. "Tout le monde sait que le président Chirac adorait la tête de veau. Et comme on prépare ce plat le jeudi, il venait souvent", explique le gérant de la brasserie au micro d'Europe 1. "Je me souviens d'une fois, il voulait un apéritif anisé avec du sirop de grenadine, mais nous n'en avions pas. J'ai donc dû courir dans un autre bistrot pour en demander", se souvient-il évoquant un client dont la tête dépassait les tablées de son rire tonitruant, et de son exigence. 

Un dîner post-G7 comme "une réunion de copains"

Dans cette salle, dès que l'on prononce le nom de Chirac, tous les habitués se retournent. Parmi eux François, un ancien collaborateur, évoque un homme qui usait de sa fourchette pour faire de la politique. C'est lui qui a fait découvrir au président le restaurant strasbourgeois "Chez Yvonne", son préféré dans "la capitale de l'Europe". "Et le jour où il est devenu président de la République, il a rencontré Helmut Kohl à Strasbourg et il l’a emmené là", glisse-t-il. 

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Jacques Chirac avec Helmut Kohl à Strasbourg, quelques jours après l'élection du président. ERIC CABANIS / AFP

Un client comme Jacques Chirac, ça ne s'oublie pas, a fortiori quand il est accompagné de Bill Clinton, John Major, Helmut Kohl, Romano Prodi. C'est la table qu'a servie Jean-Paul Lacombe, le chef de Léon de Lyon, un des plus célèbres bouchons lyonnais - deux étoiles au guide Michelin - alors que la capitale des Gaules accueillait le G7 en 1996. "Jacques Chirac était un homme extrêmement chaleureux, il nous a pris par l'épaule moi et mon épouse et nous a présentés aux présidents", se remémore-t-il.

De cette "soirée extraordinaire", il garde l'impression d'une "réunion de copains après une journée de travail qui venait manger chez un ami", mais également la décontraction de l'instant, malgré la présence des hommes les plus puissants de la planète. "Je crois que c'est l'esprit qu'il voulait donner à cette manifestation, pas trop sérieuse". Quant au menu qui a été servi ce soir-là, il y avait bien entendu "une tête de veau".

"Manger c’était très important pour lui"

Le Lipp, chez Yvonne, ou le Léon de Lyon..."Tous les restaurants étaient les restaurants de Chirac, surtout ceux dans lesquels on servait de la 'vraie nourriture'", explique de son côté le journaliste gastronomique Daniel Poujadou, qui a longtemps suivi le président dans ses déplacements. "La machine avait besoin de carburant", ajoute-t-il dans un rire. Et cette machine passée, le succès était assuré. Les clients se pressaient pour venir manger auprès du "grand Jacques".

Mais l'amour de la bonne chère ne s'arrêtait pas à la porte des différentes adresses préférées de Jacques Chirac. A l'Elysée aussi, les repas tenaient une large place. "Manger c’était très important pour lui, ça se voyait sur son visage, il souriait", confirme Bernard Vaussion, ancien chef des cuisines du palais l'Elysée, qui l'a accompagné jusqu'à ce qu'il se retire de la vie politique en 2007. "Il faisait aussi très attention à chaque repas de ne pas oublier ses petites bouteilles de Corona. Il adorait également les escargots avec une bonne dose de beurre, ça le faisait saliver", se souvient le chef. 

Parmi tous les repas et les réceptions, l'anecdote qu'il retient des années passées dans les cuisines de l'Elysée est que Jacques Chirac avait l'habitude chaque matin de faire chauffer son bol lait tout seul. Mais une fois sur le feu, il partait faire autre chose, alors forcément "le lait débordait tous les matins". 

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