Macron ou la tentation hégémonique

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Antonin André, chef du service politique d'Europe 1
La toute-puissance dont fait montre le président de la République fait de l'ombre à l'opposition et aux médias.

Emmanuel Macron assume la restauration d’une présidence puissante, gaullienne. En octobre, dans une interview à Challenges, il est le premier qui s’est annoncé en "président jupitérien". Une fois élu, il assume le pouvoir absolu de l’exécutif que lui confère la Constitution de la Cinquième République. Du même coup, il s’expose au procès en autoritarisme.

Un risque de démesure. Après avoir affaibli les partis politiques traditionnels en levant un armée de marcheurs pour prendre possession de l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron serait menacé par l’"hybris", un excès d’orgueil qui le conduirait à museler l’opposition, à refuser de répondre aux journalistes, à ne s’en remettre qu’au jugement du peuple le jour venu, estimant que le suffrage universel l’affranchit de son obligation, en tant que garant des institutions, de faire vivre sinon une opposition au moins une contradiction politique ou médiatique.

Une opposition bafouée ? "Les droits de l’opposition n’ont jamais été autant piétinés", a lancé Christian Jacob le président du groupe les Républicains. Et il a raison. Emmanuel Macron n’est pas Vladimir Poutine comme le prétend Jean-Luc Mélenchon, mais il y a effectivement de mauvais signaux envoyés par la nouvelle majorité qui s’en remet à chacun de ses actes à son chef. Les six vice-présidents de l’Assemblée nationale sont préemptés par En Marche! et le MoDem. Les trois postes de questeurs, qui outre des avantages financiers ont entre leur main la gestion du budget de l’Assemblée nationale, sont eux aussi monopolisés par des hommes du président. La promesse de respecter l’opposition semble vite effacée.

De l'autoritarisme... au populisme. Et ce procès en hégémonie du président est aussi alimenté par la tenue du Congrès. Le Président convoque, assène et s’en va. Irresponsable devant les parlementaires, il leur assigne leur feuille de route, sans avoir l'obligation de se soumettre à leur approbation. Logiquement l’opposition dénonce la tentation hégémonique, c’est le jeu politique. Le prochain procès sera sans doute celui du populisme, contre un président qui s’est appuyé sur le peuple pour dégager les partis politiques traditionnels et qui entretient donc un lien direct avec le peuple, se passant très bien, par exemple, des interviews et questions des journalistes.