Ce qui joue pour (et contre) le candidat Macron

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Emmanuel Macron est candidat à l'élection présidentielle. Mais pour aller au bout, ce sera très compliqué. © PHILIPPE LOPEZ / AFP
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Désormais officiellement candidat à la présidentielle 2017 depuis mercredi, l’ex-ministre de l’Economie aura quand même de sacrés obstacles sur sa route.

On le sentait venir depuis plusieurs semaines, c’est désormais officiel : Emmanuel Macron est candidat à l’élection présidentielle de 2017. L’ancien ministre de l’Economie l’a annoncé mercredi matin à Bobigny. L’homme bénéficie certes d’une popularité certaine. De là à s’installer à l’Elysée en mai prochain, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir, et de nombreux obstacles à franchir. Il devra se doter d’un programme, se positionner sur des sujets de société, asseoir en somme sa "présidentialité". Et ce n’est pas gagné.

  • Jeune, mais pas si néophyte

Emmanuel Macron sera probablement, sur la ligne de départ, le plus jeune candidat à l’élection présidentielle, à seulement 38 ans (39 en décembre prochain). C’est l’une de ses forces, celle qu’il met en avant : il ne fait pas partie de la vieille classe politique et incarne donc un renouveau que nombre d’électeurs appellent de leurs vœux. Son côté provocateur, franc-tireur, même quand il était ministre du gouvernement, explique sans doute en grande partie sa popularité. Il y a un revers à cette médaille. Jamais le fondateur d’En marche ! ne s’est confronté au suffrage universel. Jamais il n’a disposé d’un mandat électif. Et par conséquent, jamais il n’a mené une campagne. Commencer par la plus difficile d’entre elles, celle pour l’élection présidentielle, a tout d’une gageure.

En outre, l’ancien ministre n’est pas si néophyte en politique. Pendant cinq ans, en tant que conseiller du candidat puis du président Hollande, ensuite en tant que secrétaire général adjoint de l’Elysée, et enfin comme ministre de l’Economie il a été partie prenante de la vie politique française. Une partie prenante qu’il a tenté de relativiser mercredi, en ciblant la vacuité d’un système politique bloqué et qu’il a peu éprouvée de l’intérieur.

 Par ailleurs, il ne s’est pas totalement affranchi des villes règles de communication politique, en témoignent ses deux couvertures de Paris Match en compagnie de son épouse.

  • Un positionnement politique peu clair

L’homme se revendique ni de droite, ni de gauche. Ce n’est pas le premier à chercher à s’émanciper de ce clivage qui, mine de rien, structure la vie politique française depuis plus de deux siècles. Le pari est osé, et ne s’est d’ailleurs jamais révélé payant. Economiquement, Emmanuel Macron est clairement libéral. Il veut libérer les entreprises des 35 heures, trouve que la loi Travail de Myriam El-Khomri, si décriée par la gauche de la gauche, ne va pas assez loin, estime que les jeunes Français devraient rêver de devenir milliardaires.

Sur les sujets sociétaux, en revanche, Emmanuel Macron se positionne plutôt à gauche. Il est favorable au mariage gay, et s’est dit clairement opposé à la déchéance de nationalité, quand le sujet était brûlant dans l’actualité. En clair, Emmanuel Macron peut donc plaire, mais aussi déplaire, à droite comme à gauche. Il veut croire que c’est une force, mais ça peut aussi être une faiblesse.

Par ailleurs, les positions d’Emmanuel Macron ne sont pas encore déterminées sur les sujets essentiels tels que la politique étrangère, la lutte contre le terrorisme, la sécurité. Sur ces sujets sensibles, il devra se positionner. Et ainsi prendre le risque de perdre des soutiens au passage.

  • Ça dépend aussi de ses adversaires

La réussite d’Emmanuel Macron dépend aussi de l’identité de ses adversaires. Face à Manuel Valls, qui lui dispute la ligne social-libéral, il perdra des points. Il a tout à gagner à une candidature de François Hollande. De l’autre côté de l’échiquier politique, l’ancien ministre de l’Economie gagnerait à affronter Nicolas Sarkozy, plus radical, plutôt qu’Alain Juppé, plus positionné au centre. Cela explique d’ailleurs le timing de son annonce de candidature, qui ne doit rien au hasard. Emmanuel Macron espère que certains électeurs centristes renonceront à aller voter pour le maire de Bordeaux, précipitant sa défaite et lui laissant ainsi la place libre au centre. Attention toutefois, car si Nicolas Sarkozy venait à l’emporter, François Bayrou serait très probablement candidat. Et lui disputerait donc les voix centristes.

  • Derrière lui, un mouvement, mais pas un parti

En Marche ! revendique près de 100.000 adhérents. Une belle réussite, mais qu’il est difficile de comparer aux autres partis politiques. Car l’adhésion au mouvement est simple et surtout gratuite. Ces adhérents ne sont donc pas forcément des militants en puissance, prêts à arpenter le terrain, coller des affiches, frapper aux portes pour convaincre. Et la présidentielle ne fait pas tout. Ensuite, il y aura les législatives. Difficile de penser aujourd’hui qu’En Marche ! bénéficie de candidats suffisamment crédibles et puissants pour s’installer à l’Assemblée.

Par ailleurs, Emmanuel Macron se félicite d’avoir déjà levé 2,7 millions d’euros sous forme de dons. C’est à la fois beaucoup, et très peu. Pour mener une campagne présidentielle, il en faudra beaucoup plus. Pour rappel, le plafond des dépenses est fixé à environ 16 millions d’euros pour le premier tour. Il faut encore trouver quelques millions pour mener une campagne de qualité. Et sans véritable parti pour assurer ses arrières, cela s’annonce compliqué. Il en est de même pour la collecte des fameuses 500 signatures pour pouvoir se présenter.

  • Dans les sondages ? Du bon et du moins bon

Certains résultats d’enquêtes peuvent inciter les partisans d’Emmanuel Macron à l’optimisme. Selon un sondage Harris Interactive publié mardi, l’ex-ministre arrive deuxième dans la liste des personnalités qui incarneraient le mieux la fonction présidentielle, avec 38% de réponses positives. Seul Alain Juppé (56%) le devance, et François Fillon (38% également), rivalise. Dans le dernier baromètre Ifop Paris Match, Emmanuel Macron se classe au septième rang des personnalités politiques les plus populaires, à 49% d’opinions positives, en hausse de quatre points.

Mais quand il s’agit d’intentions de vote, la donne est différente. Dans les différents sondages, venus des différents instituts, Emmanuel Macron se situe entre 14 et 18% des intentions de vote, en fonction de qui sont ses adversaires. Largement insuffisant pour franchir le premier tour. Une déclaration de candidature à la présidentielle change en général la donne des sondages. Reste à savoir si ce sera à la hausse ou à la baisse.