Justice des mineurs : l'Assemblée donne son feu vert au gouvernement pour réformer par ordonnance

Nicole Belloubet avait annoncé mercredi sa volonté de solliciter du Parlement une habilitation pour réformer l'ordonnance de 1945
Nicole Belloubet avait annoncé mercredi sa volonté de solliciter du Parlement une habilitation pour réformer l'ordonnance de 1945 © JACQUES DEMARTHON / AFP
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avec AFP , modifié à
L'amendement de dernière minute habilitant le gouvernement à prendre une ordonnance a été adopté par 33 voix contre 18 et 1 abstention.

L'Assemblée nationale a donné vendredi son feu vert au gouvernement pour réformer par ordonnance le texte fondateur de la justice des mineurs, malgré les protestations des oppositions qui dénoncent un dessaisissement du Parlement.

L'amendement de dernière minute habilitant le gouvernement à prendre une ordonnance a été adopté par 33 voix contre 18 et 1 abstention. La ministre de la Justice Nicole Belloubet avait créé la surprise mercredi à l'Assemblée en annonçant sa volonté de solliciter du Parlement une habilitation pour réformer l'ordonnance de 1945, en passant par le projet de réforme judiciaire en cours d'examen. Les députés des oppositions ont immédiatement dénoncé un "dessaisissement" de la représentation nationale et les professionnels un "coup de force".

Coproduction. Vendredi, dans un climat houleux, la ministre a tenté de désamorcer ces critiques en proposant aux parlementaires une forme de coproduction de l'ordonnance et en expliquant vouloir maintenir les fondamentaux du texte de 1945. "J'ai entendu les inquiétudes et les incompréhensions de l'opposition sur le choix de la méthode", a assuré la garde des Sceaux dans l'hémicycle, au moment de défendre son amendement.

Créer un groupe composé de députés et de sénateurs. "Je ne veux pas modifier l'âge de la majorité pénale" (atténuation de responsabilité pénale entre 16 et 18 ans), "je ne veux pas revenir sur la double vocation du juge des enfants" (juge des mineurs en danger et juge des mineurs délinquants) ni sur "la prééminence des mesures éducatives", a-t-elle lancé, comme un message pour rassurer les professionnels. Et "je propose une méthode originale qui nous permettra d'avancer en travaillant avec les élus de la représentation nationale", a ajouté la garde des Sceaux en proposant "la création d'un groupe de contact ou d'une délégation", composée de députés et de sénateurs, "pendant la phase d'élaboration de l'ordonnance". La ministre a enfin proposé "de laisser un temps suffisant au Parlement pour pouvoir modifier l'ordonnance une fois que celle-ci aura été déposée", appelant les députés à "retenir une méthode pragmatique pour mener une réforme qui n'a que trop tardé". "C'est un travail de coopération que je souhaiterais conduire avec vous", a-t-elle insisté. 

Un texte maintes fois amendé et devenu illisible. Nicole Belloubet n'a cependant pas convaincu les oppositions qui ont marqué leur hostilité à la méthode - à l'exception de l'UDI-Agir favorable au travail de coopération - et ont condamné la réforme dans l'urgence d'un texte aussi important. L'ordonnance du 2 février 1945 sur "l'enfance délinquante" pose comme grands principes l'atténuation de la responsabilité en fonction de l'âge, la recherche de réponses éducatives et le recours à des juridictions spécialisées. Amendé une quarantaine de fois, ce texte fondateur est devenu au fil du temps un millefeuille difficilement lisible, qu'aucun gouvernement n'est parvenu à réformer profondément.