Corse : cinq choses à savoir sur la victoire des nationalistes

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© PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP
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Si la question de l'indépendance n'est pas à l'ordre du jour, les nationalistes entendent avancer sur trois revendications. 

Les nationalistes corses, réunis par l'autonomiste Gilles Simeoni et l'indépendantiste Jean-Guy Talamoni, ont remporté dimanche une victoire historique aux élections territoriales qui leur donne les clés de la nouvelle collectivité territoriale unique qui verra le jour le 1er janvier. Après cette victoire, quels seront les chantiers des nationalistes ?

Une victoire vraiment écrasante. La liste Pè a Corsica (Pour la Corse) a enregistré un score historique, avec 56,5% des suffrages exprimés, qui va lui permettre d'obtenir une large majorité des 63 sièges que comptera la nouvelle assemblée territoriale, qui remplacera au 1er janvier les deux conseils départementaux et l'actuelle collectivité territoriale. Les nationalistes occuperont également les 11 sièges du conseil exécutif de l'Île de Beauté, son "mini-gouvernement".

Un seul bémol dans cette victoire, la faible participation. Un électeur sur deux seulement s'est déplacé pour ce scrutin, qui intervenait deux ans seulement après la dernière élection territoriale. La participation s'est établie à 52,6%, contre 67% en décembre 2015.

" Si Paris manifeste un véritable déni de démocratie, nous serons contraints de susciter des manifestations populaires en Corse. "

Vers une Corse autonome... La coalition victorieuse des autonomistes de Gilles Simeoni et des indépendantistes de Jean-Guy Talamoni a affiché comme priorité d'obtenir "dans les trois ans un statut d'autonomie de plein droit et de plein exercice et (de) le mettre en œuvre en dix ans". Il s'agit d'avoir "la dévolution d'un véritable pouvoir législatif et fiscal, reconnu aussi bien par l'Etat que par l'Union européenne", selon leur programme.

Après le scrutin, Jean-Guy Talamoni, président de l'assemblée de Corse dans l'ancienne mandature, a adressé un message au gouvernement, assurant qu'il demanderait "à Paris d'ouvrir très rapidement des négociations". "Si Paris manifeste à nouveau un véritable déni de démocratie, nous serons contraints de susciter des manifestations populaires en Corse bien sûr mais également de faire le tour des capitales européennes", a-t-il ajouté. Autrement dit, Paris sera obligé de négocier avec la Corse.

... et indépendante ? La question de l’indépendance de la Corse n’est clairement pas à l’ordre du jour. "L'indépendantisme est dans l'imaginaire collectif, mais la volonté actuelle des Corses est d'avoir davantage d'autonomie", a assuré entre les deux tours le spécialiste de l’île de Beauté Thierry Dominici. A cet égard, les "natios" visent l'obtention d'un véritable statut d'autonomie dans les trois ans et sa mise en œuvre effective dans les 10 ans. L’indépendance attendra.

Co-officialité de la langue corse. Cette demande a déjà été adoptée en mai 2013 par l'Assemblée de Corse, dont le conseil exécutif était alors présidé par l'ex-député PRG Paul Giacobbi (depuis sorti de la vie politique en raison d'affaires judiciaires, ndlr). L'objectif est d'aboutir à l'utilisation de la langue corse dans tous les domaines de la vie publique, économique et sociale (éducation, services publics, médias).

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Afin de "protéger, encourager et normaliser l'usage du corse dans tous les domaines et garantir l'emploi officiel du français et du corse à parité", la motion adoptée par l'Assemblée de Corse prévoyait un vaste plan de formation, notamment des personnels de la fonction publique. Ce dossier devra être débattu dans les prochains mois entre le gouvernement et les dirigeants corses.

Le sort des prisonniers politiques sur la table. Si la demande d’amnistie des prisonniers politiques apparaît "impossible" à satisfaire, selon Thierry Dominici, spécialiste de la Corse à l'Université de Bordeaux, reste la question du "rapprochement des prisonniers" corses afin qu'ils purgent leur peine à la prison de Borgo. Cette requête a fait l'objet de discussions débutées sous la présidence de François Hollande et qui se poursuivraient actuellement, selon les informations du Parisien.

L'appellation "prisonniers politiques" chère aux nationalistes concerne une vingtaine de détenus, majoritairement des membres du Front de libération nationale de la Corse (FLNC) et les membres du commando Erignac, parmi lesquels Yvan Colonna, Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, ont été condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité.