Taxer à 75% : oui, mais comment ?

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avec Olivier Samain
Avant de présenter le texte dans le projet de loi de finances 2013, Bercy doit le rendre "acceptable".

A quoi ressemblera la taxe de 75% sur les revenus au-dessus d'un million d'euros ? Nul ne le sait encore. La mesure annoncée par le candidat Hollande le 27 février sur TF1 fait chauffer la matière grise au ministère des Finances. Bercy doit mettre sur pied cette mesure "symbolique" sous quinzaine, afin qu'elle soit intégrée dans le projet de loi de finances qui sera présenté au conseil des ministres le 26 septembre.

En faire une "taxe intelligente"

Principal enjeu de la réflexion : rendre la mesure "acceptable" politiquement et juridiquement par le Conseil constitutionnel. Pour le premier point, Pierre Moscovici a réclamé une "taxe intelligente", dans une interview aux Echosjeudi. Le ministre de l'Economie et des Finances souhaite aussi que cette nouvelle taxe ne "décourage pas l'activité économique" et ne provoque un "exode des cadres et des chefs d'entreprise".

Plusieurs pistes sont donc étudiées pour faire passer la pilule chez les plus riches. La première consiste à reporter le seuil d'un million d'euros au niveau de chaque individu, et non plus au foyer fiscal dans son ensemble. Ce qui ferait passer la limite à deux millions pour un couple. En clair, si l'un des membres du foyer fiscal perçoit 1,5 million d'euros, et l'autre 300.000 euros (ou moins), le foyer échappe à la taxation de 75%.

Autre mesure possible : un lissage des revenus exceptionnels. Déjà autorisée aujourd'hui, cette mesure permet à quelqu'un qui touche ponctuellement de gros revenus d'étaler ses impôts sur plusieurs années. C'est le cas notamment des acteurs qui ont connu une année faste.

Ne pas faire une taxe confiscatoire

Mais le plus épineux concerne l'aspect juridique du texte. En effet, pour qu'il n'ait aucune chance de se faire retoquer par le Conseil constitutionnel, Bercy ne doit pas créer une taxe confiscatoire. Or le Conseil constitutionnel n'a jamais clairement défini précisément ce qu'il entendait par "confiscatoire".

Néanmoins, il a donné un indice en août en validant le collectif budgétaire 2012, acceptant de fait la contribution exceptionnelle sur la fortune parce qu'elle était prévue pour cette seule année et était donc "exceptionnelle".

Eviter le retour du bouclier fiscal

Même si Jérôme Cahuzac a assuré que cette taxation de 75% ne serait pas éternelle et durerait seulement le temps du désendettement, difficile pour Bercy de la faire passer pour exceptionnelle. Autre piste qui pourrait être envisagée : l'instauration d'un plafonnement. Mais cela s'apparenterait à une nouvelle version du bouclier fiscal honni de la gauche, ce que veulent éviter le socialistes.

Reste que, comme il s'agit avant tout d'un symbole, cette taxe n'ayant pas pour objectif principal de faire rentrer de l'argent dans les caisses de l'Etat, le ministère des Finances a toute latitude. Seule obligation : qu'elle soit intégrée au projet de loi de finances 2013, pour que la promesse du candidat Hollande soit tenue.