La vie imaginaire de Pierre Bodein au menu de son procès

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
Invité à évoquer sa vie devant la Cour d'assises du Bas-Rhin, Pierre Bodein, accusé de trois meurtres et deux viols qu'il nie en dépit de multiples indices, dont des traces d'ADN, s'est présenté vendredi en victime de la discrimination, des médias, de la police et des psychiatres.

Après dix semaines de procès, vendredi, c'était le dernier jour du procès de Pierre Bodein, ou Pierrot le fou, accusé de trois meurtres et de deux viols. "Je rappelle, et c'est incontestable, ça, que vous êtes né le 30 décembre 1947 à Obernai", commence le président Bernard Meyer. Cela, Pierre Bodein, ne le conteste pas. Pour le reste, ce presque sexagénaire arrange ses souvenirs. Son père héros de la Seconde guerre mondiale ? Il avait quitté la Marine en 1937. La déportation de la famille durant cette même guerre ? Tout au plus une évacuation sur Tarbes, précise le président. Les relations adultérines entre son père et sa belle-soeur ? Son "papa" et sa "maman" s'adoraient, affirme de son timbre voilé ce solide gaillard grisonnant. Onzième d'une fratrie de seize - huit garçons et huit filles -, Pierre Bodein est décrit par un instituteur comme le plus intelligent de la famille, même s'il n'est "guère intéressé" par l'école qu'il fréquentera jusqu'à 14 ans. Jeune homme, on le dit beau garçon et "bon danseur". "Je le suis encore", s'empresse-t-il d'ajouter. C'est lui pourtant qui tombera dans la délinquance, dès 1969, et sera condamné à huit reprises dont la dernière, à 20 ans de prison. Est-ce à cause d'un grave accident de vélomoteur qui lui a occasionné plusieurs jours de coma en 1965 comme on le pense dans sa famille ? Le dossier médical ne fait état que d'un traumatisme crânien et d'une plaie suturée à la main gauche. Pierre Bodein a un début d'explication, lui qui avoue que c'est "moche" de braquer une banque, un "crime" qu'il reconnaît au contraire de ceux dont il est accusé et des viols pour lesquels il a déjà été condamné. Dans la famille, logée rue de la Loi à Obernai, les trois aînés sont partis "sans donner leur paye". Lui a dû subvenir aux besoins de la famille, comprend-on. "Ça a fait de moi un voleur. On m'appelait le père Noël", raconte-t-il. Ce fils de vanniers, nom donné en Alsace à un groupe de nomades sédentarisés, accuse aussi la "discrimination" qui a "toujours existé en Alsace" à l'encontre des siens. Et dans son cas tout particulièrement. "J'ai été gravement médiatisé depuis 2004", s'insurge-t-il en évoquant la date de sa dernière arrestation, trois mois après sa remise en liberté conditionnelle. A partir de 1970, il alternera séjours en prison et internements en hôpital psychiatrique, ce qui l'empêchera pas d'avoir quatre enfants de trois femmes différentes. Pour certains experts, c'est un psychotique. Pour d'autres, un simulateur. "Ils ne sont pas honnêtes. J'ai toujours été responsable de mes actes", clame Bodein, qui a aussi une explication pour ses épisodes régressifs ou délirants : "C'est à cause des médicaments".