"Sodoma", le sulfureux livre sur l'homosexualité au Vatican

L'auteur se montre plus indulgent avec le pape François qu'avec ses prédécesseurs.
L'auteur se montre plus indulgent avec le pape François qu'avec ses prédécesseurs. © FILIPPO MONTEFORTE / AFP
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Antoine Terrel , modifié à
Dans un livre à paraître le 21 février, le journaliste Frédéric Martel enquête sur la place de l'homosexualité au Vatican, et sur l'hypocrisie d'une partie de sa hiérarchie. 

C'est le livre par lequel le scandale pourrait à nouveau arriver au Vatican. Dans un ouvrage à paraître le 21 février aux éditions Robert Laffont, Sodoma, le journaliste Frédéric Martel en explore les arcanes, et y décrit "l'omniprésence d'homosexuels", y compris au sein de l'entourage proche des différents papes, et ce alors que cette orientation sexuelle reste condamnée par l'Eglise.  

Dans son livre de 600 pages, dont la sortie est prévue en huit langues, Frédéric Martel a interrogé "près de 1.500 personnes, dont 41 cardinaux, 52 évêques et monsignori, ainsi que 45 nonces apostoliques", écrit Le Point, qui en publie les bonnes feuilles. 

"Une communauté homosexuelle parmi les plus élevées au monde". "Le Vatican, c'est Fifty Shades of Gay", déclare l'auteur, provocateur, interrogé par l'hebdomadaire, martelant que "le Vatican a une communauté homosexuelle parmi les plus élevées au monde". Et de décrire "un immense réseau de relations homophiles ou homosexualisées, polymorphes, dominées par le secret, la double vie, le mensonge". 

Plus qu'au grand nombre d'homosexuels au sein du clergé, l'auteur s'intéresse à leur omniprésence au plus haut de la hiérarchie de l'Église, et donc à l’hypocrisie du système ecclésiastique. "Il y a de plus en plus d'homosexuels lorsqu'on monte dans la hiérarchie catholique. Dans le collège cardinalice et au Vatican (...) l'homosexualité devient la règle, l'hétérosexualité l'exception", écrit Frédéric Martel. Et selon le journaliste, les prélats les plus ultraconservateurs au sein du Vatican sont pour la plupart homosexuels ou homophiles. "Les prélats qui tiennent les discours les plus homophobes et traditionnels sur le plan des mœurs s'avèrent eux-mêmes en privé homosexuels ou homophiles, étant ces fameux 'rigides' hypocrites dénoncés par François", écrit-il. 

Alors que l'Église est affaiblie par les nombreuses révélations de cas d'abus sexuels par des prêtres, Frédéric Martel dénonce "la loi du silence". Car selon lui, la volonté de cacher leur sexualité pousserait certains prêtres ou évêques à taire ou couvrir des cas d'abus sexuels chez d'autres religieux. "S'il couvre un prêtre soupçonné d'abus, c'est d'abord pour se protéger lui-même", explique le chercheur au Point. "Une puissante culture du secret a été construite pour cacher l'homosexualité d'une majorité de prélats, et c'est cette culture qui a permis à des abuseurs d'être protégés par une loi du silence qui n'a pas été érigée pour eux".   

Le pontificat de Jean-Paul II critiqué. L'auteur ne se prive pas non plus d'égratigner les pontificats de Paul VI, Jean-Paul II, et Benoît XVI. Le pape polonais, notamment, est décrit comme un souverain pontife sous le mandat duquel "une véritable guerre contre les gays a été lancée". "Ironie de l'histoire : la plupart des acteurs de cette campagne sans bornes contre les homosexuels l'étaient personnellement", raconte-t-il.  

Sur Benoît XVI, qu'il décrit en "dandy homosexualisé", l'ouvrage explique que "les règles étaient claires : 'tu es homophobe à l'extérieur et à l'intérieur, tu peux plus ou moins pratiquer'". 

En revanche, Frédéric Martel se montre plus indulgent envers le pape François. "Jamais un pape n'a témoigné, en fait, d'une telle empathie pour les homosexuels et ce qu'il appelle les "périphéries'". En 2013, il avait notamment eu cette phrase historique : "Si une personne est gay et cherche le Seigneur avec bonne volonté, qui suis-je pour juger?". 

Le pontificat du pape argentin n'est pourtant pas épargné par les polémiques, et François lui-même a fait polémique à plusieurs reprises par ses déclarations. En décembre, dans un livre d'entretien, le souverain pontife se disait notamment "inquiet" du nombre de prêtres et de religieux gays, estimant que l'Église catholique risquait d'être gagnée par la "mode" de l'homosexualité. En août, le Vatican avait dû corriger la déclaration du pape, qui avait recommandé le recours à la psychiatrie lorsque des parents constatent des penchants homosexuels dès l'enfance chez leur progéniture.