Sa femme a voté Trump, il se retrouve expulsé au Mexique

Roberto Beristain dans la "Maison du migrant" à Ciudad Juarez, ville frontalière des Etats-Unis, au Mexique.
Roberto Beristain dans la "Maison du migrant" à Ciudad Juarez, ville frontalière des Etats-Unis, au Mexique. © HERIKA MARTINEZ / AFP
  • Copié
avec AFP , modifié à
L'épouse, séduite par la promesse de Trump renvoyer les immigrés criminels, ne pensait pas que son mari, arrivé en 1998 aux Etats-Unis, pourrait être expulsé.

Arrivé aux Etats-Unis il y a 20 ans, le Mexicain Roberto Beristain s'est marié, a eu trois enfants et ouvert un restaurant. Son épouse américaine, séduite par la promesse d'expulser les délinquants, a voté pour Trump, mais c'est son mari qui a été expulsé. "On pensait que (Donald Trump) allait être un bon président car on voulait être en sécurité, et ses promesses d'expulser les criminels nous plaisaient, mais je ne pensais pas que ça finirait comme ça", déclare Roberto, 43 ans, assis dans la Maison du migrant à Ciudad Juarez, au nord du Mexique. Arrêté en février de l'autre côté de la frontière, faute de pouvoir présenter des documents en règle, il a passé deux mois dans des centres de rétention et a été expulsé lundi dans la nuit vers cette ville frontalière, où il ne compte ni famille, ni amis. Il porte le même pantalon sombre et la même doudoune noire que lors de son interpellation.

Elle pensait que son mari serait à l'abri. "Je me sens trahi (...) car ils (les autorités, ndlr) expulsent des gens biens, qui payent leur impôts et n'ont jamais commis un délit de leur vie", dénonce-t-il. Depuis son arrestation, son histoire, semblable à celles de beaucoup d'autres clandestins, a pris du relief lorsque sa femme Helen, originaire de Mishawaka, dans l'Indiana, a reconnu publiquement avoir voté pour Donald Trump. Elle avait été attirée, raconte-t-il, par la promesse du candidat Républicain de renvoyer vers le Mexique les "bad hombres" ("individus nuisibles"), en référence aux immigrés latinos narcotrafiquants, violeurs ou criminels. Et pensait que son mari serait à l'abri, ce dernier ayant un casier judiciaire vierge, sans même une infraction au code de la route à son actif. "Ce qui m'a le plus fait mal c'est que (ma famille) me voit arrêté, comme si j'étais un criminel, et je ne veux pas que mes enfants gardent cette image de moi, je veux le meilleur pour eux", assure Roberto, la voix brisée, en attendant un appel de son avocat.

"C'est injuste". Parti de Mexico il y a deux décennies, il était entré illégalement en 1998 aux Etats-Unis. "Là, j'ai connu ma femme, on a eu trois enfants et je suis devenu ce que je n'étais pas au Mexique, une personne responsable", raconte-t-il.  Il a épousé Helen il y a 17 ans. Puis Maria, 15 ans, Jasmine, 14 ans, et Demetri, 8 ans, sont nés sur le sol américain. Au prix de beaucoup d'efforts et de travail, il a fini par acheter un restaurant à Indianapolis. "J'ai fait partie d'un programme où, si pendant 10 ans tu ne commettais pas de délits, tu candidatais à un permis de travail et à (un numéro de) sécurité sociale, tu pouvais acheter une affaire", détaille Roberto. "C'est injuste que l'on fasse cela à des personnes travailleuses. Je paye mes impôts et j'ai des enfants américains", mais "cela n'a pas eu d'importance à l'heure de m'arrêter".

Rattrapé après plus de 15 ans. Les problèmes avec l'administration américaine ont commencé au cours de vacances au Canada en 2000. "Par erreur, on s'est retrouvé à un endroit des chutes du Niagara où on n'aurait pas dû être, et on m'a demandé des documents que je n'avais pas", poursuit le Mexicain. S'en est suivi l'envoi d'un ordre de sortie volontaire du territoire, qu'il n'a pas respecté, puis d'un ordre de déportation. Car malgré son mariage et son travail, Roberto continuait de vivre avec un statut de résident provisoire. Il espérait obtenir bientôt sa résidence permanente. Il a été interpellé le 6 février, en se rendant à son rendez-vous annuel avec les agents de l'immigration, juste après l'entrée en vigueur des nouvelles règles de l'administration Trump.  Roberto ne perd pourtant pas espoir : il fait confiance à ses avocats américains pour résoudre son cas et pouvoir retrouver sa famille.