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Jean-Sébastien Soldaïni, édité par Ugo Pascolo , modifié à
A l'aube de son quatrième mandat, Vladimir Poutine est une fois de plus confronté à la constitution russe, qui n'autorise que deux mandats. La fin de l'ère Poutine vient-elle de commencer ? Qui peut espérer prendre la tête du Kremlin après lui ?
L'ENQUÊTE DU 8H

Tranquillement réélu dimanche à la tête de la Russie pour un quatrième mandat - cinq si l'on compte la parenthèse avec l'installation de son très proche ami Medvedev au Kremlin en 2008 -, Vladimir Poutine va pouvoir s'attaquer à... sa succession dans six ans. Le "tsar", qui aura 72 ans à sa sortie, en 2024, a l'intention de lâcher un pouvoir qu'il détient sans discontinuer depuis 2000. C'est en tout cas ce qu'il laisse entendre à son entourage, et cela n'est pas sans poser question.

Le problème de la succession. Car pour passer la main, encore faut-il avoir un successeur. Une bataille d'héritage se profile donc si Vladimir Poutine quitte le Kremlin en 2024. Et il va falloir faire vite pour l'homme fort de la Russie. Car s'il désigne un successeur, il a six ans pour le former, ce qui est court pour apprendre à une seule personne à gérer tous les pouvoirs concentrés aujourd'hui entre les mains de Poutine.

Mais le problème majeur, c’est ce que l’observatrice de la politique russe Alla Chevelkina appelle le "Poutine Collectiv" : "Cela représente Poutine et son entourage très proche. Ces gens-là n'existeront plus à la seconde où il quitte son poste", détaille la spécialiste. "Ce sont des gens qui aujourd'hui sont très puissants puisqu'ils dirigent les richesses de notre pays. Mais sans Poutine ils ne sont rien", analyse-t-elle. Ils risquent donc de faire pression sur le maître du Kremlin pour qu'il s'accroche au pouvoir. Pourquoi pas en créant une nouvelle institution, taillée sur mesure, et faisant de lui une sorte de Guide suprême ?

Une opposition qui a dû mal à s'organiser... Il est également très peu probable que l’opposition profite du dernier mandat théorique de Vladimir Poutine pour s’organiser, au vu des résultats des urnes. Tous les candidats qui s'opposaient à lui cumulent 25% des suffrages et personne ne veut d'alliance. Quant à l'opposant exclu de ce scrutin, Alexeï Navalny, s'il apparaît sérieux, il commence à subir des critiques : il est par exemple qualifié de "petit Poutine" pour son caractère autoritaire.

Entendu sur europe1 :
Dans les années 90, ma vie avait plus de sens car il y avait un vent de liberté et des perspectives

Et une population qui n'a jamais connu "la vraie liberté". Même son de cloche du côté de la population. D'un côté figure la génération URSS : elle a "la peur ancrée au plus profond d'elle-même par le régime soviétique", explique une femme qui a vécu 40 ans sous cette dictature. Tout comme Sacha, qui a vu trop d'espoirs douchés notamment après la Perestroïka, "Dans les années 90, ma vie avait plus de sens car il y avait un vent de liberté et des perspectives", explique-il. "Aujourd'hui, ces perspectives n'existent plus. Et ceux qui les cherchent, ne trouvent aucun moyen de sortir de cette situation", analyse Sacha.

De l’autre, il y a la jeunesse russe, qui ne semble pas avoir peur du pouvoir, qui n'est pas marquée au fer rouge du Stalinisme. "C'est vrai que nous n'avons pas peur", confiait le soir de l’élection une jeune opposante à Vladimir Poutine. "Mais nous n'avons pas encore senti ce qu'est la vraie liberté", déplore-t-elle.  Une jeunesse russe, comme marquée par la main de fer des années Poutine.