L’échec des villes vertes en Chine

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Laure Dautriche, envoyée spéciale en Chine, avec M.D , modifié à
A Tianjin, dans l’Est de la Chine, personne ne veut venir habiter dans le nouveau quartier écolo, trop éloigné des commodités.
REPORTAGE

Pour désengorger la capitale et les grandes villes chinoises - où le taux de pollution est parfois jusqu’à trente fois au-dessus des recommandations de l’OMS - la Chine est en train de construire des dizaines de quartiers "écolo", des villes vertes. Il y en existe six-cent en Chine. Il s’agit d’extensions artificielles des villes, en dehors des villes. Des quartiers qui fonctionnent parfois avec 20 % d’énergies renouvelables. Bref, un modèle pour le pays. Mais petit hic, ces quartiers ont beaucoup de mal à attirer les habitants et les entreprises.

A Tianjin, dans l’Est de la Chine, une cité modèle a poussé au milieu d’une zone industrielle très polluée et d’immenses usines. Une sorte de mirage. Les immeubles sont entourés d’arbres et d’éoliennes. L’éclairage public fonctionne avec des panneaux solaires. Mais les gratte-ciel sont vides et les grands boulevards déserts. Car dans ce nouveau quartier il n’y a ni commerce, ni école.

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La guerre de l’immobilier. Alors dès que quelqu’un s’aventure dans la zone, quatre ou cinq agents immobiliers l’abordent aussitôt pour proposer d’acheter un appartement. "Regardez, venez, c’est juste-là, de l’autre côté de la rue, il faut traverser, venez visiter", lance une dame à un visiteur. "Non regardez ici, moi je vous propose un appartement au 6e étage, avec un balcon et bien en-dessous des prix du marché"», lance un autre agent immobilier. "Si vous venez habiter ici, la salle de sport est gratuite, et l’école primaire aussi, les bus électriques sont gratuits. Et un hôpital va ouvrir juste à côté l’année prochaine", annonce un troisième.

Un énorme échec. A Tianjin, si les habitants trient leurs déchets, ils cumulent des points et peuvent avoir des produits gratuits au supermarché. Le projet de cette "ville écolo" était colossal, le gouvernement chinois attendait 300.000 personnes, il n’y en a aujourd’hui que 30 000, soit 10 fois moins.

" Tant pis si mon mari met deux heures pour aller travailler le matin "

"Ici c’est beaucoup moins pollué que les villes autour, mais ce n’est pas ça le plus important pour nous", explique la mère de la famille Zhang, arrivée dans le quartier il y a six mois. "On m’a juré qu’il y aura bientôt ici un très bon lycée pour ma fille. Alors tant pis si mon mari met deux heures pour aller travailler le matin. Et puis, ici, on a pu acheter un appartement, et ça c’est impossible pour nous dans une grande ville. Les logements sont un peu moins chers et on reçoit une subvention de l’Etat", poursuit-elle.

Tianjin est un exemple parfait de ce que fait la Chine en ce moment. Une course à l’urbanisation, tout en tentant de prendre en compte l’enjeu climatique. Ces quartiers sont la vitrine "écolo" de la Chine.