Crimée Ukraine 2:32
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avec AFP , modifié à
Au 187e jour de la guerre en Ukraine, des responsables ukrainiens ont annoncé qu'une contre-offensive était lancée pour reprendre la ville de Kherson aux forces russes dans le sud du pays, au moment où plus au nord, une mission de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) était attendue pour sécuriser la centrale de Zaporojjia. Europe 1 fait le point sur la situation.
L'ESSENTIEL

"Les forces armées ukrainiennes ont lancé leur offensive dans plusieurs zones dans le sud. Nous demandons aux résidents de Kherson de suivre les consignes de sécurité : rester près des abris et loin des positions russes", a écrit le chef de l'administration régionale de Kherson, Yaroslav Yanuchevytch sur Telegram. "Nous croyons dans l'armée ukrainienne!", a-t-il conclu.

Au moment où une mission de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) était attendue pour sécuriser la centrale de Zaporojjia, au centre de toutes les tensions, des responsables et médias ukrainiens ont annoncé lundi qu'une contre-offensive était lancée pour reprendre la ville de Kherson aux forces russes dans le sud du pays, au 187e jour de l'invasion russe de l'Ukraine.

Les informations à retenir :

  • Une mission de l'AIEA en route vers la centrale de Zaporijia
  • "Cette mission sera la plus dure de l'histoire de l'AIEA", estime Dmytro Kouleba
  • Une contre-offensive ukrainienne en cours dans la région de Kherson
  • Le Kremlin appelle à faire "pression" sur l'Ukraine pour réduire la tension autour de Zaporijia
  • L'ONU a appelé à cesser toute activité militaire aux alentours de la centrale

"Le début de la fin de l'occupation de Kherson"

"Aujourd'hui, il y a eu de puissantes attaques d'artillerie sur les positions ennemies (...) sur l'ensemble du territoire de la région occupée de Kherson. C'est l'annonce de ce que nous attendions depuis le printemps : c'est le début de la fin de l'occupation de la région de Kherson", a annoncé à la télévision ukrainienne Serguiï Khlan, député local et conseiller du gouverneur régional. Il a assuré que les forces ukrainiennes avaient "l'avantage" sur le front Sud après des frappes répétées ces dernières semaines sur des ponts et un barrage sur le fleuve Dniepr, destinées à gêner la logistique de l'armée russe.

Des médias ukrainiens avaient plus tôt cité la porte-parole du commandement "Sud" de l'armée ukrainienne, Natalia Goumeniouk, affirmant que les forces de Kiev attaquaient "dans de nombreuses directions" sur ce front, visant à repousser les forces russes sur la rive gauche du Dniepr. Le groupement militaire ukrainien "Kakhovka" a lui assuré sur Facebook observer la retraite d'une unité de combattants séparatistes prorusses de leurs positions dans la région. Ces affirmations étaient invérifiables de source indépendante.

"Kherson est ukrainienne. Notre Kherson est debout", a lancé le chef de cabinet du président ukrainien, Andriy Yermak, sur Twitter. Les troupes russes s'étaient emparées dès le début de l'invasion de l'Ukraine de Kherson, ville de 280.000 habitants située sur le Dniepr dans une région stratégique aux portes de la péninsule de Crimée, annexée par Moscou en mars 2014. Depuis plusieurs semaines, les forces ukrainiennes disaient préparer une contre-offensive pour reprendre Kherson, mais n'avaient jusqu'à présent rapporté que la conquête de dizaines de villages.

Moscou dit avoir fait échouer des offensives ukrainiennes

L'armée russe a affirmé lundi avoir repoussé des "tentatives d'offensive" ukrainiennes dans les régions de Kherson et Mykolaïv, dans le sud de l'Ukraine, tout en assurant avoir infligé "de lourdes pertes" aux forces de Kiev. "Cette nouvelle tentative d'opérations offensives de l'ennemi a lamentablement échoué", a déclaré le ministère russe de la Défense dans un communiqué.

Arrivée de la mission de Zaporijjia dans les prochains jours

La contre-offensive ukrainienne survient au moment où l'AIEA a annoncé envoyer une mission vers la centrale nucléaire de Zaporijjia, où elle doit arriver dans les prochains jours après des semaines de bombardements et des craintes d'accident majeur. Le directeur général de l'AIEA, Rafael Grossi, conduit lui-même cette mission, d'au moins une dizaine de personnes, pour l'inspection de la centrale occupée par l'armée russe sur la ligne de front.

"Le jour est venu, la mission de l'AIEA vers Zaporijjia est désormais en route. Nous devons protéger la sécurité de l'Ukraine et de la plus grande centrale d'Europe", a-t-il écrit sur Twitter, précisant que la mission arriverait sur place "plus tard cette semaine". Rafael Grossi réclamait depuis plusieurs mois de pouvoir se rendre sur les lieux, avertissant du "risque réel de catastrophe nucléaire".

"Cette mission sera la plus dure de l'histoire de l'AIEA en raison de l'activité de combat menée par la Russie sur le terrain", a estimé lundi le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba en déplacement à Stockholm.

La Russie se félicite de la prochaine inspection de la centrale

Accusée par Kiev d'avoir positionné des pièces d'artillerie sur le territoire de la centrale pour pilonner ses positions, et de chercher à poser des obstacles "artificiellement" à la mission de l'AIEA, la Russie a affirmé se féliciter de la prochaine inspection. "Nous attendions cette mission depuis longtemps. Nous considérons qu'elle est nécessaire", a déclaré le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, appelant à "faire pression sur la partie ukrainienne pour qu'elle cesse de mettre en danger le continent européen en bombardant la centrale".

L'opérateur ukrainien Energoatom a néanmoins affirmé que les forces russes, "se préparant à l'arrivée de la mission de l'AIEA, mettent la pression sur le personnel de la centrale pour les empêcher de révéler des preuves des crimes de l'occupant".

"La souveraineté ukrainienne sur la centrale ne doit pas être contestée"

Dans une déclaration lundi, les pays du G7, "profondément préoccupés" par les risques d'accident nucléaire à Zaporijjia, ont demandé la garantie de l'accès "en toute liberté" du personnel de l'AIEA à la centrale. "La souveraineté ukrainienne sur cette centrale ne doit pas être contestée", a lui aussi souligné le président français Emmanuel Macron.

"L'infrastructure de la centrale a été endommagée et il existe des risques de fuite d'hydrogène et de pulvérisation de substances radioactives", avait alerté samedi Energoatom. Par ailleurs, selon l'opérateur "10 habitants ont été blessés", dont quatre employés de la centrale, dans des bombardements au cours des dernières 24 heures à Energodar, localité dont dépend la centrale.

Kiev et Moscou s'accusent mutuellement de bombarder les abords

La centrale de Zaporijjia, où sont situés six des 15 réacteurs ukrainiens, a été prise par les troupes russes début mars, peu après le lancement de l'invasion le 24 février. Kiev et Moscou s'accusent mutuellement de bombarder les abords complexe, au bord du fleuve Dniepr, et de mettre le site en péril. Le ministère russe de la Défense a encore affirmé lundi qu'un drone armé ukrainien avait été abattu au-dessus de la centrale, et que les forces ukrainiennes avaient tiré huit obus sur des zones résidentielles d'Energodar, dont deux à proximité de la centrale, faisant des blessés.

Kiev accuse en retour les forces russes de mettre en péril elles-mêmes les installations nucléaires. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a réclamé lundi des sanctions contre le groupe russe Rosatom pour le "chantage aux radiations" exercé par Moscou, lors d'une intervention vidéo lors d'un conférence en Norvège.

La mairie de Zaporijjia a indiqué distribuer depuis le 23 août des comprimés d'iode aux habitants dans un rayon de 50 km autour de la centrale, à prendre en cas d'alerte aux radiations. Les habitants, lundi, s'y préparaient au pire. "Vous savez, on a connu l'accident de Tchernobyl, la menace était déjà très grande, mais on a survécu, Dieu merci. Aujourd'hui, la menace est totale, à 100%", disait Kateryna, une retraitée.

L'UE va étudier la suspension d'un accord sur les visas

Après l'adoption de sanctions économiques et personnelles contre les membres du régime russe, les ministres européens des Affaires étrangères, qui doivent se réunir mardi et mercredi à Prague, vont étudier la suspension d'un accord de 2007 prévoyant des facilités de délivrance de visas de court séjour aux ressortissants russes, a indiqué lundi à l'AFP un diplomate européen. Les bombardements russes n'ont pas cessé sur la ligne de front qui s'étend du nord au sud.

Les autorités locales évoquent notamment des frappes dans les régions de Kharkiv (nord-est), Mykolaïev (sud) où elles ont fait deux morts et cinq blessés, et Dniepropetrovsk (centre), où elles ont fait un mort. Dans son allocution quotidienne, Volodymyr Zelensky a dit vouloir reprendre "toutes les régions sous occupation russe", y compris la Crimée, annexée par la Russie en 2014. Le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin accueillera une nouvelle fois le 8 septembre en Allemagne ses homologues des pays alliés pour organiser le soutien occidental aux capacités militaires ukrainiennes.

Un cadre de l'occupation russe, ex-député ukrainien, tué par balles

Un ancien député ukrainien pro-Zelensky, Alexeï Kovalev, passé du côté des forces d'occupation russes dans la région de Kherson, a été tué par balles, ont indiqué lundi les enquêteurs russes.

"Le chef adjoint de l'administration militaire et civile de la région de Kherson, en charge des questions agricoles, Alexeï Kovalev, est mort après avoir été blessé par balles", a indiqué le Comité d'enquête russe sur son compte Telegram. "L'attaque a été menée à son domicile, le 28 août. Une jeune femme qui vivait avec le défunt a également été victime des malfaiteurs", a ajouté le Comité, chargé en Russie des principales affaires criminelles, sans fournir plus de détails.

Ces derniers mois, plusieurs fonctionnaires nommés par les Russes dans les territoires ukrainiens qu'ils ont conquis ont été blessés ou tués lors d'attentats. Alexeï Kovalev, 33 ans, avait été élu en 2019 député dans la région de Kherson et avait rejoint le groupe du président Volodymyr Zelensky au Parlement ukrainien. Après l'offensive du Kremlin fin février et la conquête de la région de Kherson, il avait rejoint l'administration d'occupation. Fin juin, il avait survécu à une autre tentative d'assassinat.