Ukraine 2:28
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avec AFP , modifié à
Au onzième jour de l'invasion russe de l'Ukraine, les forces armées de Vladimir Poutine se rapprochent de Kiev, rencontrant une tenace résistance et bombardant parfois des immeubles d'habitation, notamment à Tcherniguiv, à 150 km au nord de la capitale, où des dizaines de civils ont été tués ces derniers jours. 
L'ESSENTIEL

Au onzième jour de l'invasion russe de l'Ukraine, les forces armées de Vladimir Poutine se rapprochent de Kiev, rencontrant une tenace résistance et bombardant parfois des immeubles d'habitation, notamment à Tcherniguiv, à 150 km au nord de la capitale, où des dizaines de civils ont été tués ces derniers jours.

Les principales informations à retenir 

  • Nouvel échec de l'évacuation de civils à Marioupol
  • L'aéroport de Vinnytsia a été détruit par des frappes russes
  • Kiev se barricade avant l'offensive tant redoutée des Russes
  • L'Ukraine affirme que plus de 11.000 soldats russes ont péri depuis le début de l'invasion

Kiev attend l'offensive russe

Les habitants de Kiev se barricadent ou fuient avant que l'offensive tant redoutée des Russes ne se produise. Nicolas Tonev, correspondant en Ukraine pour Europe 1, raconte cet exode. "Les habitants de Kiev s'attendent à ce que la ville soit attaquée de la même façon que Marioupol", explique-t-il. "Le chauffeur avec lequel j'étais, qui sort régulièrement des personnes âgées de la ville, me disait qu'il n'avait pas vu de telles files de voitures jusqu'à présent. Il y a des heures et des heures d'attente à cause des check points. On voit les mères et les aînés tenter de jouer sur le bas côté avec les enfants les plus petits", décrit notre envoyé spécial. 

Pour le politologue Frédéric Encel, la prise de Kiev est inéluctable. "La résistance de l'armée ukrainienne, si vaillante soit elle, n'y pourrait rien en réalité", déplore-t-il sur Europe 1. "Il est assez inimaginable que la guerre s'arrête pour quelques jours ou quelques semaines sans que Poutine ait obtenu à Kiev le siège du gouvernement et de l'Assemblée, donc le siège du régime honni", poursuit-il. Frédéric Encel insiste sur l'objectif politique que représente la ville de Kiev pour Vladimir Poutine. "En revanche, sur le plan militaire, au sud du pays, ça a été très, très bien dit et rappelé par vos correspondants, on a un objectif stratégique de la part des Russes."

L'aéroport de Vinnytsia détruit par des frappes russes

Des frappes russes ont détruit dimanche l'aéroport de la ville de Vinnytsia, à quelque 200 kilomètres au sud-ouest de Kiev, a annoncé le président ukrainien Volodymyr Zelensky. "Je viens d'être informé de frappes de missiles contre Vinnytsia", une ville qui compte près de 370.000 habitants, a déclaré Volodymyr Zelensky dans une adresse vidéo sur Telegram. "L'aéroport a été complètement détruit", a-t-il ajouté. Le ministère russe de la Défense a confirmé par la suite ces frappes.

"Un aérodrome des forces armées ukrainiennes a été détruit par des armes de haute précision et de longue portée", a déclaré le porte-parole du ministère, Igor Konachenkov. Dimanche, Volodymyr Zelensky a aussi reproché aux pays occidentaux leur refus d'imposer une zone d'exclusion aérienne au-dessus de l'Ukraine et leur réticence à livrer des avions de combat à Kiev. "Nous le répétons chaque jour : fermez le ciel au-dessus de l'Ukraine, fermez-le aux missiles russes, à l'avion russe de combat, à tous ces terroristes", a-t-il lancé.

"Nous sommes des humains et c'est votre devoir humanitaire de nous protéger", a-t-il poursuivi. "Si vous ne le faites pas, si vous ne nous donnez pas au moins des avions pour que nous puissions nous protéger, on ne peut en tirer qu'une conclusion: vous aussi vous voulez qu'on nous tue lentement!"

Nouvelles menaces de Poutine

Le président russe Vladimir Poutine a souligné samedi que la Russie considérerait comme cobelligérant tout pays tentant d'imposer une zone d'exclusion aérienne au-dessus de l'Ukraine, une revendication de Kiev que l'Otan a rejetée, et a affirmé que les sanctions imposées à son pays s'apparentaient "à une déclaration de guerre". Vladimir Poutine a également mis en garde contre une éventuelle perte par l'Ukraine de son "statut d'État" si les autorités ukrainiennes ne changent pas de politique.

"Les autorités actuelles [ukrainiennes] doivent comprendre que si elles continuent de faire ce qu'elles font, elles mettent en question l'avenir du statut d'État ukrainien. Et si cela se passe, elles en seront entièrement responsables", a déclaré le maître du Kremlin. "Ces sanctions qui sont mises en place, cela s’apparente à une déclaration de la guerre", a estimé Vladimir Poutine. "Mais Dieu merci, on n'en est pas encore arrivé là", a-t-il ajouté.

Nouvel échec de l'évacuation des civils à Marioupol

Dans le sud-est du pays, à Marioupol, sur la mer d'Azov, "au milieu de scènes dévastatrices de souffrances humaines, une deuxième tentative aujourd'hui de commencer à évacuer quelque 200.000 personnes de la ville a été interrompue", selon un communiqué du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Ce couloir humanitaire devait s'ouvrir dès 12H00 locales (10H00 GMT) pour permettre l'évacuation de civils jusqu'à la ville de Zaporojie, à environ trois heures de route, selon la municipalité de Marioupol.

Mais "la colonne pour évacuer la population civile n'a pas pu sortir de Marioupol car les Russes ont regroupé leurs forces et commencé à bombarder la ville", a déclaré sur Facebook Pavlo Kirilenko, gouverneur ukrainien de la région. En matinée, le commandant séparatiste prorusse Edouard Bassourine, a accusé, cité par l'agence russe TASS, les troupes ukrainiennes de ne pas respecter le cessez-le-feu temporaire.

Marioupol est sous "blocus humanitaire" avec des "milliers de blessés" à la suite de bombardements russes, a affirmé samedi soir son maire Vadim Boïtchenko, sur Youtube. La situation y est "catastrophique": ses 450.000 habitants n'ont ni eau ni nourriture, ni chauffage ni électricité, selon Laurent Ligozat, de l'ONG Médecins sans frontières (MSF). La chute de Marioupol serait un tournant dans l'invasion russe, lancée le 24 février. Elle permettrait la jonction entre les troupes en provenance de la Crimée annexée, qui ont déjà pris les ports clés de Berdiansk et de Kherson, et celles du Donbass. Ces forces consolidées pourraient ensuite remonter vers le centre et le nord de l'Ukraine.

Diana, une habitante, a quitté la ville il y a deux jours et demi. "C'est très, très dur de garder le contact parce que la plupart des habitants n'ont plus de batterie et les centrales électriques ont été bombardées", explique-t-elle. "L'électricité a été coupée. Il n'y a qu'un opérateur qui passe à seulement quelques endroits de la ville. Ce n'est plus du tout possible de rentrer dans Marioupol. Il n'y a que des tirs et des bombes. J'ai quand même réussi à avoir une amie au téléphone, qui est encore là bas. Elle m'a dit que ça va, mais que la situation est très, très mauvaise. Ils essayent de survivre sans nourriture, sans eau courante ni électricité. C'est une situation d'horreur", décrit-elle pour Europe 1. 

Troisième session de négociations 

Un troisième round de pourparlers entre l'Ukraine et la Russie se déroulera lundi, a annoncé samedi un membre de la délégation ukrainienne, David Arakhamia. Pékin a appelé de son côté à des négociations directes entre la Russie et l'Ukraine lors d'un entretien téléphonique samedi entre le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi et son homologue américain Antony Blinken, selon un communiqué officiel chinois.

Quel bilan ? 

La Russie a annoncé mercredi que 498 de ses militaires avaient été tués en Ukraine, selon le premier bilan annoncé de ses pertes dans cette guerre, qui n'a pas été actualisé depuis. L'Ukraine et des observateurs occidentaux assurent de leur côté que le bilan est très nettement supérieur. Kiev affirme que plus de 11.000 soldats russes ont péri. L'ONU a déclaré vendredi avoir comptabilisé 331 civils tués en Ukraine, dont 15 enfants, un bilan potentiellement largement sous-évalué.

Zelensky s'est entretenu avec Biden 

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a annoncé dimanche sur Twitter s'être entretenu une nouvelle fois au téléphone avec son homologue américain Joe Biden pour discuter de "questions de sécurité", du "soutien financier pour l'Ukraine" et de "la poursuite des sanctions contre la Russie".

L'exode se poursuit

La cohue règne dans les gares des villes menacées par l'armée russe, femmes et enfants cherchant à partir après des adieux déchirants avec leurs maris et pères restant pour se battre. "Nous envoyons nos femmes et nos enfants à Lviv, peut-être plus loin, et nous restons ici (...) c'est une situation horrible", confie à Dnipro (centre) Andrey Kyrytchenko, un maçon de 40 ans. Selon l'ONU, plus de 1,5 million de personnes se sont déjà réfugiées à l'étranger depuis l'invasion de l'Ukraine, et plus d'un million sont déplacées à l'intérieur du pays. Cet exode suscite une forte mobilisation, notamment dans les Etats voisins comme la Moldavie, où le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken se trouvait dimanche, après s'être rendu samedi en Pologne.