Élections américaines : Tim Kaine et Mike Pence, les candidats du fond

© Paul J. Richards / AFP
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Anaïs Huet
Tim Kaine et Mike Pence, respectivement colistiers d'Hillary Clinton et de Donald Trump, sont ceux qui ramènent un peu de politique dans une campagne décidément très axée sur les attaques personnelles.

Ils apparaissent aux yeux des observateurs de la vie politique américaine comme "de bons garçons". Tim Kaine, sur le ticket d'Hillary Clinton et Mike Pence, sur celui de Donald Trump, mènent une campagne à la fois pugnace et courtoise. Bien loin des tirs à boulets rouges qu'échangent depuis des mois leurs candidats respectifs.

De la politique, enfin. L'unique débat des colistiers le 4 octobre a été "excellent dans sa tenue, tant sur le fond que sur la forme, et dans lequel on a parlé politique", affirme Jean-Eric Branaa, spécialiste des États-Unis et maître de conférence à l'université Paris 2. "Très peu de gens l’ont regardé : 36 millions, comparé aux 84 millions qui avaient regardé le premier débat entre Clinton et Trump, le 26 septembre. Et pourtant, ceux qui ont regardé ce débat étaient contents d’entendre parler, enfin, de politique. C’est vraiment ce qui manque du côté des deux candidats principaux", juge Jean-Eric Branaa. Car entre les révélations de déclarations misogynes de Donald Trump et les affaires d'e-mails d'Hillary Clinton, les deux "top of the tickets" n'expriment que brièvement leurs idées pour le pays. "Hillary Clinton n’a pas pu développer sa campagne car Donald Trump a fait de la politique un show", avance le spécialiste des États-Unis.

Un ancrage local. Mais si l'on ne se focalise que sur le duel entre les deux aspirants à la Maison-Blanche, d'autres élections se jouent également le 8 novembre :  élections législatives fédérales, élections des gouverneurs, élections des représentants à l'assemblée de chaque État, élections municipales, etc. C'est principalement là que se concentrent les propositions qui concernent directement les citoyens américains dans leur quotidien. "Trump et Clinton donnent les grandes directions, mais de très loin", affirme Jean-Eric Branaa. L'implantation locale des deux colistiers - Tim Kaine est l'ancien gouverneur de Virginie et Mike Pence est gouverneur de l'Indiana - leur permet de s'exprimer bien plus concrètement. 

Pence, la caution républicaine de Trump. Les colistiers ont-ils pour autant le devoir de clarifier les positions de leurs candidats ? Oui et non. Avec un Donald Trump parfois brouillon voire caricatural sur les questions économiques et internationales, le parti républicain voulait entendre une pensée construite. Et il a pu compter sur Mike Pence, homme politique aguerri (il est actuellement gouverneur de l'Indiana) et posé, rompu à l'exercice du discours politique. "On l'a vu lors de ce débat ressusciter le parti républicain", atteste Jean-Eric Branaa. Si Tim Kaine a aussi pu avancer ses propres idées, le parti démocrate n'en éprouvait pas la même nécessité que les républicains. "Hillary Clinton est installée dans sa doctrine démocrate, Tim Kaine est seulement là pour accompagner sa pensée", précise Jean-Eric Branaa. Un schéma bien plus conforme au rôle - neutre, voire effacé - traditionnellement accordé aux vice-présidents.

 

Pas les mêmes ambitions. Entre les deux colistiers, ce ne sont donc ni les mêmes personnalités, ni les mêmes enjeux. Si de l'avis de tous aux États-Unis, Mike Pence a largement battu le démocrate Tim Kaine lors du débat les opposant, cela ne devrait pas changer le cours de l’élection. Il n'empêche que Mike Pence prend de l'épaisseur et Donald Trump l'a bien compris. A plusieurs reprises, le candidat a soutenu qu'il lui accorderait une place de choix s'il était élu. De bon augure pour le colistier, dont les ambitions présidentielles pour 2020 ne sont plus à démontrer. Selon un sondage publié le 3 octobre par CNN, Pence et Kaine recueillent chacun 40% d'opinions favorables parmi l'électorat américain. Mais un peu plus d’un électeur sur dix avoue n’avoir jamais entendu parler des deux colistiers… Il reste du travail avant le jour du scrutin, le 8 novembre.