Maroc : "oui" massif au référendum

© MAXPPP
  • Copié
avec Catherine Boullay et AFP , modifié à
Plus de 98% des votants ont approuvé les réformes constitutionnelles proposées par le roi.

Le "oui" l'a emporté massivement vendredi au Maroc. Le ministre de l'Intérieur s'appuyant sur des résultats quasi définitifs, a annoncé dans la nuit que 98,5% des votants approuvaient la nouvelle constitution.

Près de 73% des Marocains se sont déplacés pour voter. Ce taux de participation particulièrement élevé peut être interprété comme un vote de confiance en faveur du souverain Mohamed VI.

Vers une "une transition en douceur"

Ce référendum pourrait être déterminant pour l'avenir du régime marocain. "Le Maroc tire les leçons de ce qui s’est passé dans la région. Le Maroc ne veut pas du tout se retrouver dans la même situation que la Tunisie, la Libye, la Syrie et veut opérer une transition en douceur, dans le calme, veut avoir sa propre révolution, sa révolution pacifique", avait analysé Mansouria Mokhefi, le chef du service Maghreb à l'IFRI, avant le scrutin.

"Quand vous parlez aux chauffeurs de taxi, aux serveurs dans les restaurants, quand vous parlez à la classe dirigeante, voilà ce que vous entendez. C’est vraiment le sentiment général au Maroc aujourd’hui même parmi ceux qui sont descendus manifester dimanche dernier après le discours du roi pour exprimer leur insatisfaction", poursuit-elle.

"Le but est le même pour tous. Le Maroc fera tout pour éviter la violence et donc essayera de trouver les moyens dignes, pacifiques, modérés, élégants vers une transition démocratique que tout le monde souhaite", conclut Mansouria Mokhefi.

Plus de pouvoir pour le Premier ministre

Confronté au printemps arabe, qui a mis fin au long règne des dirigeants tunisien et égyptien, Mohammed VI a présenté un projet de nouvelle constitution censée renforcer le rôle du Premier ministre et du parlement, mais où le souverain reste omniprésent dans le jeu politique.

Le nouveau texte prévoit que le Premier ministre, issu du parti vainqueur aux élections, pourra dissoudre la chambre des représentants, ce qui était du seul attribut du roi avant le projet de réformes. Le roi conserve cependant le contrôle de secteurs clés : défense, affaires religieuses, ainsi que les nominations à caractère stratégique comme les gouverneurs des provinces qui représentent le ministère de l'Intérieur.

Pas de véritable débat

Cette réforme n'établit pas pour autant une véritable monarchie parlementaire réclamée par le Mouvement de jeunes du 20 février, porte drapeau la contestation dans la rue, et qui boycotte un projet "octroyé" par le roi.

Malgré l'importance de l'enjeu, les Marocains ont disposé de quelques jours seulement pour réfléchir aux réformes. La campagne officielle a singulièrement manqué de tonus et s'est faite à sens unique, en faveur du ‘oui’ et en l'absence d'une campagne pour le ‘non’, les opposants appelant majoritairement au boycott.

La plupart des partis politiques ainsi que deux grands syndicats ont appelé à voter pour le projet, à l'exception de trois formations de gauche qui ont appelé à boycotter le scrutin. "Il s'agit d'un ‘octroi’ qui vient par le haut. Le roi répond aux revendications pour des réformes, mais il le fait à sa manière, et selon son calendrier", a indiqué Khadija Mohsen-Finan, chercheuse spécialiste du Maghreb.

"Et, il n'y pas eu de demande ferme (pour un débat) de la part des partis politiques, intellectuels et juristes, associés au projet" de constitution, a-t-elle regretté, estimant que ces derniers auraient pu faire cette demande "pour laisser le temps au débat". "Visiblement le Palais cherche à faire passer sa réforme au forceps, sans laisser à la société civile le temps de s'organiser", soutient Ahmed Benchemsi, chercheur à l'Université Stanford, aux Etats-Unis, dans un point de vue publié dans le journal parisien Le Monde.