La vie est un long fleuve tranquille, en vrai, au Japon

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avec AFP , modifié à
L'HISTOIRE DU JOUR - Un Tokyoïte a été dédommagé après avoir été échangé avec un autre à sa naissance.

C’est une histoire qui rappelle étrangement le scénario du film d’Etienne Chatillez. Mais ce n'est pas dans le Nord de la France, mais au Japon, cette-fois, que les deux bébés ont été échangés à la naissance. Un tribunal de Tokyo a ordonné à un hôpital de payer 38 millions de yens, soit 281.000 euros, de dommages et intérêts à un sexagénaire tokyoïte reconnu victime d'un échange à la maternité qui lui a valu une vie de pauvre alors que sa famille d'origine était plutôt aisée.

Il travaille dans une usine et va à l’école la nuit. Né en 1953, l'homme, dont l'identité n'a pas été dévoilée, n'a pas connu ses vrais parents, aujourd'hui décédés. La maternité où il a vu le jour l'a confié par erreur à une mère et un père qui n'étaient pas les siens.

Devenu fils d'une famille avec laquelle il n'avait aucun lien génétique, il a perdu son père non biologique à l'âge de 2 ans et a dû étudier dans une école de nuit tout en travaillant en usine pour subvenir à ses besoins. "Il aurait dû vivre dans une famille enviable, mais a souffert dans une famille pauvre", a déclaré son avocat.

Le doute des parents. A l'inverse, celui qui, né à peu près au même moment, a involontairement pris sa place, a pu suivre un beau parcours scolaire jusqu'à l'université. Les trois jeunes frères de ce dernier ont cependant toujours douté de l'identité exacte de celui qui était censé être leur aîné, mais était si différent. A plusieurs reprises, ils disent avoir entendu leurs parents s'interroger sur leur plus grand fils envers lequel ils ressentaient une sorte de malaise.

Extrait culte de La vie est un long fleuve tranquilled’Etienne Chatillez:

Leurs soupçons ont été confirmés par des tests d'ADN en 2009. Ils ont ensuite vérifié les dossiers de la maternité et ont découvert l'identité de leur véritable plus grand frère en 2012. Les deux bébés étaient nés à 13 minutes d'écart.

Des larmes chaque jour. Lorsqu'il a appris avoir été victime d'une erreur, l'intéressé, dit "avoir pleuré tous les jours pendant des mois sur la dureté de son existence alors qu'il aurait dû bénéficier d'un bon environnement familial". Les trois frères, avec leur vrai aîné, ont alors déposé une plainte demandant à l'hôpital de payer 250 millions de yens (1,85 million d'euros) de dommages et intérêts.

Le jury a certes réduit le montant des dédommagements, mais reconnu que le plaignant avait effectivement subi un préjudice qui méritait réparation. "Il n'a eu aucun contact avec sa vraie famille pendant une longue période et n'a aucune chance de communiquer avec ses vrais parents qui sont déjà morts", a souligné le juge.

En colère contre l'hôpital, l'intéressé se dit aussi plein d'affection pour la mère qui l'a éduqué. "Je voudrais revenir 60 ans en arrière", a-t-il déclaré à la chaîne de télévision NHK de façon anonyme et sans montrer son visage. L'hôpital réserve pour le moment sa réponse à la décision du tribunal. L'une des explications à cette erreur réside dans le nombre très élevé de naissances dans cette période du début des années 1950 au Japon.