Gibraltar : Londres et Madrid s'écharpent

Le conflit larvé qui oppose l'Espagne au Royaume-Uni autour de Gibraltar, un territoire de sept kilomètres carrés cédé à la Grande-Bretagne en 1713, peuplé de 30.000 habitants, a rebondi fin juillet autour de la question des droits de pêche dans les eaux entourant le rocher.
Le conflit larvé qui oppose l'Espagne au Royaume-Uni autour de Gibraltar, un territoire de sept kilomètres carrés cédé à la Grande-Bretagne en 1713, peuplé de 30.000 habitants, a rebondi fin juillet autour de la question des droits de pêche dans les eaux entourant le rocher. © Reuters
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Charles Carrasco avec Marie Billon à Londres et AFP , modifié à
L'Espagne envisage d'imposer une taxe de 50 euros à l'entrée et à la sortie du "Rocher". Le Royaume-Uni monte au créneau.

L’INFO. Au cœur de ce conflit : Gibraltar, un petit bout de terre, de… seulement 7 km2. Mais les enjeux économiques sont bien supérieurs sur le "Rocher" où le PIB par habitant est l’un des plus élevés au monde. Vendredi, le ton est encore monté entre la Royaume-Uni et l’Espagne sur la question de la souveraineté de ce territoire et de ses droits de pêche. Après un entretien avec le roi Juan Carlos, le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy a d’ores et déjà annoncé qu’il envisageait "toutes les mesures nécessaires", toutes "les mesures légales et proportionnées" pour défendre ses intérêts concernant Gibraltar dans le cadre de la loi. "Notre priorité est de discuter, négocier et trouver un accord" sur Gibraltar "et de ne pas prendre de décisions qui ensuite, à un moment déterminé, seront irréversibles", a-t-il affirmé.

Dans ce dossier, l’Espagne ne veut rien lâcher. Le ministre des Affaires étrangères José Manuel Garcia Margallo a réaffirmé vendredi au journal ABC que l'Espagne envisageait d'imposer une taxe de 50 euros à l'entrée et à la sortie de Gibraltar. Une taxe qui toucherait les habitants du "Rocher" qui vont chaque jour travailler en Espagne.

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© Reuters

Des blocs de béton. Le conflit larvé qui oppose l'Espagne au Royaume-Uni autour de Gibraltar, un territoire cédé à la Grande-Bretagne en 1713, peuplé de 30.000 habitants, a rebondi fin juillet autour de la question des droits de pêche dans les eaux entourant le "Rocher". Sans annonce préalable, Gibraltar a construit un récif artificiel composé de blocs de béton coulés en Méditerranée pour empêcher les incursions de pêcheurs espagnols. Officiellement, c’était pour encourager le développement de la faune sous-marine. Problème : Madrid et Londres estiment que les eaux qui bordent le "Rocher" leur appartiennent.

"Ce problème est né parce que les 24 et 25 juillet un remorqueur de Gibraltar a jeté dans l'eau de la baie d'Algeciras 70 blocs de bétons d'environ un mètre cube et demi, d'où sortent des barres de fer de cinquante centimètres de long et plusieurs centimètres d'épaisseur", a souligné Mariano Rajoy, parlant "d'atteinte évidente à l'environnement". Selon les pêcheurs espagnols, les blocs de béton pourraient endommager leurs filets.

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© Reuters

Des contrôles renforcés. L’Espagne a répondu par la politique de "l’escargot" à la frontière qui la sépare de Gibraltar. De longues files d'attente se sont formées à la frontière et Gibraltar affirme que l'Espagne a multiplié les contrôles douaniers en représailles. Le dernier week-end de juillet, les automobilistes ont pu attendre jusqu’à six heures sous le soleil méditerranéen pour franchir la frontière. Madrid rétorque que ces contrôles sont obligatoires, puisque Gibraltar comme le Royaume-Uni, n'appartient pas à l'espace Schengen, et qu'ils sont nécessaires pour lutter contre la contrebande. "Nous pouvons et nous devons effectuer des contrôles comme ceux qui ont été faits au cours des derniers jours", a encore assuré Mariano Rajoy. "Nous devons veiller à ce que tous les citoyens remplissent leurs obligations fiscales et à ce que soient respectées les normes environnementales de l'Union européenne", a-t-il ajouté.

Une flotte la semaine prochaine. Dans ce contexte, plusieurs médias espagnols s'inquiétaient vendredi de l'envoi, la semaine prochaine par le Royaume-Uni, d'une flotte devant participer à des manœuvres de routine en Méditerranée, prévues de longue date et baptisées Cougar 13. "Cameron intimide Rajoy avec la visite de sa flotte à Gibraltar", titrait le quotidien de centre droit El Mundo. L'Espagne a autorisé à cette occasion le porte-avions HMS Illustrious à faire escale sur sa base navale de Rota, située en baie de Cadix, dans le sud du pays.

La "Une" de journal El Mundo :

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© Capture El Mundo

Selon le ministère britannique de la Défense, l'une des frégates participant à cette flotte, le HMS Westminster, fera elle escale à Gibraltar.  Rappelant que de nombreux navires britanniques avaient fait escale à Rota ces dernières années, Mariano Rajoy a estimé que "les relations bilatérales avec le Royaume-Uni étaient bonnes" avant de conclure : "nous voulons qu'elle continuent à l'être, et cela n'a rien à voir avec un sujet ponctuel et concret comme ce qui se passe actuellement à Gibraltar, où j'espère qu'il sera fait preuve de sens commun, qu'un accord sera cherché dans le dialogue".