Dette : un soulagement de courte durée ?

Barack Obama après son allocution.
Barack Obama après son allocution. © REUTERS
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avec Luc Evrard et agences , modifié à
DECRYPTAGE - L’accord, in extremis, sur la dette américaine est loin de tout résoudre à long terme.

Obtenu à deux jours de la date butoir fixée par le Trésor américain, l’accord à l’arrachée sur la dette américaine a été accueilli comme une bouffée d’oxygène par les marchés et la communauté internationale. Mais si le compromis dégage l’horizon à court terme, tout n’est pas réglé à plus longue échéance. Décryptage.

A court terme : la catastrophe est évitée. L’accord devrait permettre d’éviter un défaut de paiement, sous réserve d’adoption par le Congrès avant mardi minuit. Concrètement, le risque de voir l'Etat américain incapable de payer ses fonctionnaires et de rembourser ses emprunts est momentanément écarté. Un tel scénario "aurait eu un effet dévastateur sur notre économie", selon les termes du président Obama. Au-delà des Etats-Unis, les effets auraient été potentiellement catastrophiques pour l'économie mondiale, de l’avis de tous les observateurs.

Le soulagement était notable sur les marchés après l'annonce. La Bourse de Tokyo a grimpé de 1,84% à la mi-séance lundi et le dollar reprenait également du terrain. Un optimisme qui a aussi gagné les Bourses européennes qui ont ouvert en nette hausse. Les agences de notation, par contre, devraient être moins impressionnées que les marchés.

Selon un responsable américain, qui a requis l'anonymat, l'accord prévoit un relèvement du plafond de la dette d'au moins 2.100 milliards de dollars, pour permettre au Trésor de faire des emprunts après le 2 août. Le tout pour tenir jusqu'en 2013, soit après les élections.

A plus long terme : la réduction des dépenses en suspens. Une réduction de la dépense publique, de l'ordre de 1.000 milliards de dollars, a été décidée dans l'immédiat. Mais il ne s'agit pas d'un accord définitif. Dans un deuxième temps, une commission parlementaire paritaire devra déterminer - et ce avant Thanksgiving, fin novembre - 1.500 milliards de dollars supplémentaires.

Or le fait que le compromis négocié mette en place un processus en deux temps inquiète. Car dans le cas où aucun accord n'interviendrait sur des réductions budgétaires supplémentaires, un mécanisme contraignant se mettrait en place, imposant automatiquement un certain nombre de coupes, y compris pour la défense et le programme de santé Medicare pour les personnes âgées.

"A court terme, on a raison d'être soulagés (...) mais, à mon avis, cela ne règle rien sur le fond", a réagi Christian de Boissieu, le président du Conseil d'analyse économique, sur Europe 1 lundi. "Il y a pas de programme crédible de réduction du déficit budgétaire aux Etats-Unis", a-t-il déploré en notant que ni démocrates, ni républicains "n'ont de plan pour le réduire à moyen terme". "On achète du temps mais il faut le mettre à profit pour en faire quelque chose", a-t-il analysé avant de pronostiquer : "clairement la question budgétaire va être au coeur de la présidentielle de l'année prochaine".

"Cela ressemble à un remède à court terme, et il n'y a pas de solution à long terme, ce qui intéresse avant tout les agences de notation", a analysé, de son côté, Michael Woolfolk, spécialiste sur les devises chez BNY Mellon à New York.