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Laetitia Drevet
30 ans après la chute du Mur de Berlin, des inégalités sociales et économiques entre Est et Ouest se font toujours sentir, affirme l'historien Nicolas Offenstadt au micro d'Europe 1.
INTERVIEW

"Une république avalée." Le 9 novembre 1989, la chute du mur de Berlin signe la fin de RDA, et la réunification des deux Allemagne. Réunification... ou annexion par la RFA, l'Allemagne de l'Ouest ? 30 ans après, la question se pose encore. "Ce débat a lieu en Allemagne depuis les années 1990", affirme l’historien Nicolas Offenstadt, auteur du Pays disparu, sur les traces de la RDA (Stock), au micro d'Europe 1.

 

"Toute une partie des gens était alors critique du processus", souligne le spécialiste, rappelant que certains parlent alors en Allemagne de l'Est de "colonisation", voire, pour certains observateurs français, de "kohlonisation", référence à Helmut Kohl, chancelier ouest-allemand qui a pris la tête de l'Allemagne unifiée. "L’Allemagne de l’Est a été une dictature de surveillance policière mais aussi de protection. Il n'y avait pas de chômage, une protection sociale généralisée, l'accès à la culture à moindre coût ou gratuit. Ses habitants sont passés de ce monde-là à la précarité et au chômage", souligne Nicolas Offenstadt. 

"Véritable ressentiment"

Aujourd'hui, certains politologues attribuent le succès électoral de l'extrême droite en ex-Allemagne de l'Est à un sentiment de "déclassement" par rapport aux citoyens de l'Ouest. "Il y a toujours plusieurs facteurs pour expliquer les phénomènes électoraux. Mais il est vrai que plus les gens de l’Est se sentent comme des citoyens de seconde classe, plus il votent pour les partis d'extrême droite", explique l'historien. Car 30 ans après le contraste persiste : en 2018, un salarié de l'Ouest gagnait en moyenne 3.339 euros brut par mois, contre environ 2.600 euros à l'Est, selon l'Agence fédérale pour l'emploi. 

Nicolas Offenstadt évoque un "véritable ressentiment" nourri par l'idée d'avoir été "avalés par l'ouest". "La chute du Mur et l'émancipation des nations après 1989 s'est aussi faite avec creusement des inégalités et une division territoriale."