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Les cinq premiers avions de combat Rafale commandés par le gouvernement indien en septembre 2016 ont quitté la France hier. Ils devraient rejoindre leur base opérationnelle dans les jours qui viennent. Didier François explique pourquoi ils étaient très attendus 

L’Inde les attendait avec une certaine impatience mais cette fois, ça y est. Les cinq premiers avions de combat Rafale commandés par New Delhi en septembre 2016 ont quitté la France hier et devraient rejoindre leur base opérationnelle dans les jours qui viennent après un long périple aérien.

Oui, pas moins de 6.500 kilomètres de vol et dans le cockpit d’un chasseur-bombardier, même de nouvelle génération, ça reste un trajet tout à fait conséquent : sans jeux, sans vidéo et sans rafraîchissements à bord.

Ce sera donc le premier test grandeur nature de ce qu’on appelle une projection stratégique pour ces équipages indiens qui, après trois ans de formation à Mérignac près de Bordeaux, piloteront désormais des Rafale aux cocardes verte blanche, et orange de l’Indian Air Force en configuration opérationnelle sur la base aérienne des « Golden Arrows » du 17eme escadron à Ambala. Un complexe militaire important situé dans le nord de l’Inde à 200 kilomètres seulement des frontières du Pakistan et de la Chine, qui sont les deux principaux rivaux de New Delhi.

Le gouvernement indien a d’ailleurs demandé à la France d’accélérer ses livraisons après de violents incidents avec l’armée chinoise.

Tout à fait, c’était le 15 juin dernier. Pour la première fois depuis 45 ans, les troupes chinoises stationnées dans le Ladakh, région revendiquée par Pékin, ont attaqué les gardes-frontières indiens, ce qui a coûté la vie une vingtaine de soldats et provoqué une très vive tension avec New Delhi qui a placé ses bases aériennes avancées en état d’alerte maximale.

L’Inde a donc souhaité récupérer au plus vite ses Rafale, que son ambassadeur a décrit de manière assez lyrique comme "un avion rapide, agile, polyvalent et très meurtrier qui va renforcer considérablement notre puissance aérienne". Car l’état-major indien estime que pour faire face simultanément à une attaque de la Chine et du Pakistan, il aurait besoin de 42 escadrons à 18 appareils chacun, or il ne dispose à ce stade que de 31 escadrons opérationnels.

La France va lui fournir 36 Rafale biplaces, soit deux escadrons, mais l’Inde se pose très sérieusement la question de commander 114 chasseurs supplémentaires en version monoplace. On parle là d’un marché de plus de 12 milliards d’euros, ce qui est énorme.

Un marché qui pourrait être remis en cause à cause de l’épidémie de Covid-19 

Oui, parce que l’Inde est très sérieusement touchée par le virus, avec un produit intérieur brut dont la progression recule de moitié et qui va donc connaitre une baisse de moitié de son budget de la Défense en 2020. Mais cela reste un problème finalement conjoncturel. Or la France a signé avec New Dehli un partenariat de sécurité, tout particulièrement en ce qui concerne la liberté de navigation en Océan indien où transitent 75% du commerce maritime européen.Une vision stratégique partagée, et ces affaires se traitent dans le temps long.