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Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.

Où l'on reparle de Didier Raoult. Une tribune parue hier lundi dans le Monde, et signée par plusieurs organisations médicales fait grand bruit. Elle exhorte les pouvoirs publics à réagir face à ce qu'elles appellent de " graves manquements" à l'IHU Méditerranée et de celui qui en fut le patron jusqu’en septembre dernier. Des accusations sérieuses.

D'autant plus sérieuses que seize de ce qu'on appelle les "sociétés savantes" portent ce texte. Parmi elles, la société de pharmacologie, de cardiologie, de réanimation.

Elles dénoncent une vaste étude clinique menée sur à Marseille, par Didier Raoult, sur plus de 30 000 patients au moment de la crise Covid. Les résultats en ont été publiés en avril dernier, dans une version qui n’a pas été relue par d'autres spécialistes, ce qu'on appelle un preprint. Cette étude  est qualifiée dans la tribune  de “plus grand essai thérapeutique sauvage connu à ce jour"

Essai thérapeutique sauvage ? Qu'est-ce que ça veut dire ?

 On a, selon les signataires, réalisé à l'IHU de Marseille une essai clinique massif, consistant à prescrire systématiquement un antipaludéen devenu célèbre, l'hydroxychloroquine et un antiviral, l'azithromicine. Et cela, toujours selon le même protocole,  y compris sur des patients asymptomatiques. Selon les signataires, les prescriptions ont eu lieu sans base pharmacologiques solides, et en l'absence de toute preuve d'efficacité.

On a là toutes les caractéristiques d’une étude... mais elle n'a jamais reçu aucune autorisation de l'Agence nationale du médicament. Elle a été réalisée en dehors de tout cadre légal ou éthique, mais aussi en dehors de toutes les autorisations de mise sur le marché des molécules concernées. Si l'on résume la tribune : des dizaines de milliers de personnes ont servi de cobayes, à leur insu, à de la recherche clandestine.

C'était une crise sanitaire, est -ce que cela ne justifie pas qu'on relâche un peu les règles ?

 Le problème, c'est que cette étude a été poursuivie plus d'un an après la démonstration, par de nombreuses autres études, de l'inefficacité, voire de la dangerosité des prescriptions massivement réalisées à Marseille. L'hydroxychloroquine, par exemple, cause, selon d'autres grands essais thérapeutiques, une hausse de 13% du risque d'être intubé et de décéder. Pour Didier Raoult, tous les autres  travaux truqués, seuls les siens, pourtant dénoncés pour leur méthodologie douteuse sont corrects. Il a raison contre le monde entier.

Pour les sociétés médicales, un énorme scandale sanitaire

On peut regretter qu'elles n'aient pas protesté plus tôt, mais elles sont excédées de voir qu’ il n'y a pas de conséquences pénales, pas de réaction des tutelles universitaires à des manquements qui sont décrits comme anciens, récurrents.

Le mal fait est considérable...

La médecine spectacle du professeur Raoult n’a pas seulement endommagé la crédibilité scientifique. Elle a alimenté les chapelles complotistes les plus délirantes en période covid – et elle les alimente toujours. Elle a fait perdre un temps et un argent considérables dans la lutte contre a pandémie, en laissant croire à des traitements fantasques et en dénigrant les vaccins.  Et pourtant, pourtant, des scientifiques des médecins, alertaient dès 2020 sur les méthodes Raoult. Sur les trous et les résultats de sa méthode. Ils n'ont pas été écoutés. Ils ont été harcelés, traînés dans la boue par les équipes de l’IHU., dans l’indifférence des institutions médicales. Elles réagissent enfin.