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Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.

C’était une des promesses de la municipalité parisienne : on allait pouvoir se baigner en plein air cet été à Paris ! Espoirs douchés...

La baignade urbaine à Paris, c’est un vieux fantasme. Ca voudrait dire que la ville est enfin devenue ce havre écolo qui nous est si souvent promis...Mais dans les faits, les expériences de cet été ont toutes bu la tasse.

La  mairie avait prévu d’ouvrir à la baignade au Canal Saint-Martin, épicentre du boboland parisien, tous les dimanches de l’été. La première séance, le 9 juillet a dû être annulée, l’eau était polluée. Et ensuite, la cata. Des neufs dimanches de baignades, deux seulement ont pu avoir lieu.  Pareil, un peu plus loin, sur le canal de l’Oucq, ou quatre bassins sont normalement ouvert à la baignade. Eux aussi ont été le plus souvent fermés. Et je ne vous parle même pas de la Seine, qui n’a pu cet été accueillir aucune des trois épreuves test  de natation pour des JO de l’an prochain.

Raisons sanitaires...

Il faut avoir le cœur bien accroché pour se baigner dans le canal de l’Ourcq ou dans le Canal Saint –Martin, dont les rives se transforment l’été en lieux de beuveries et les eaux en poubelles à pique-nique. Ce n’est pas qu’une impression.

Si la baignade a été interdite, c’est à cause des bactéries fécales qui barbotent dans les eaux parisiennes. Escherichia coli et entérocoques, avec des taux qui dépassent de loin les normes admises. A la clé, infections urinaires et gastriques, infections de la peau en cas de lésions.

Et le plus grand risque c’est d’attraper une leptospirose. Une maladie bactérienne, potentiellement mortelle, qui se transmet par les urines et les cadavres des rats. Ca calme assez radicalement les envies de baignades.

Est-ce qu’on va finir par y arriver à se baigner en plein Paris? En 1998, Jacques Chirac, maire de Paris, avait promis qu’il y piquerait une tête, il ne l’a jamais fait.

On en parle depuis des décennies. Ca paraît compliqué. Il y a des facteurs impondérables qui peuvent rendre les eaux bactériologiquement dangereuses. La météo, la température élevée, les orages, et la surpopulation des baigneurs, il y a tout pour créer les conditions d’un bouillon de culture. Et ça, ça ne va pas s’arranger avec le réchauffement climatique. Autant dire que pour les JO, il faut croiser les doigts bien fort, parce que selon le comité Paris 2024, il n’y a pas de plan B si la Seine n’est pas praticable au moment des épreuves.

Et puis on paie, dans les eaux de Paris, l’incurie générale de la mairie.

Oui, et sa pratique quotidienne de la pensée magique et de la politique du “yaka”. Yaka vouloir se baigner dans la Seine pour que ce soit possible. Mais se donner les moyens, c’est autre chose.

On retrouve dans les eaux de la Seine et des canaux tout ce qui relève du mauvais entretien, du délabrement de Paris en quasi-banqueroute. Les trottoirs pas nettoyés, les détritus qui jonchent le sol. Les rats qui prolifèrent et contre lesquels on ne veut plus agir. Tout ce qui n’est pas ramassé, toutes les saletés qui s’accumulent dans les herbes qui ne sont plus coupées au nom de la biodiversité, eh bien quand il pleut fort, ça bouche les canalisations, ça fait déborder les égouts, et tout ça, eaux de pluies, eaux usées, polluants, huiles, crasse termine dans la rivière. C’est pourtant limpide : On en peut pas avoir une rivière propre dans une ville sale.

C’est d’autant plus rageant qu’en amont de Paris, pour préserver la qualité des eaux de consommation, le syndicat Eaux de Paris a réalisé un très gros travail avec les agriculteurs qui cultivent en bord de Seine, pour baisser drastiquement les usages d’engrais, de pesticides. Il y a eu de gros effort, c’est novateur, c’est efficace. Mais ce sont des efforts ruinés par le fait que la ville part à vau-l'eau. Et pour ça, Anne Hidalgo ne peut s’en prendre qu’à elle-même. Elle se met le bec dans l’eau toute seule.