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Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.

Le café est un des produits qui a le plus flambé dans les rayons des supermarchés, 13% sur un an et même 15% de hausse sur les quatre premiers mois de 2024. Quelles que soient les formes ou les qualités. Et si l’inflation se calme sur de nombreux produits alimentaires, pour le café, c’est une autre affaire.

Noir, serré et amer, ça pourrait être une des façons de décrire l’avenir du marché du café pour les prochaines années. Nous devons nous attendre à le payer de plus en plus cher. Dans une tasse de café, il y a un concentré bien torréfié de toutes les questions de l’époque et de toute la géopolitique mondiale.

Le café, c’est une dizaine de gros producteurs sur la planète, En tête, Brésil, Vitenam, Colombie, Indonésie et Ethiopie, et quelques plus petits. C’est un produit tropical, qui voyage et qui, avec la crise covid puis la guerre en Ukraine a subi le renchérissement du transport, de l’énergie et des emballages. Mais ça, c’est le lot commun de tout le panier de la ménagère. On y ajoute un effet de monnaies, eh oui, gringo, le café se négocie en dollars, et le dollars va mieux.

La flambée des cours est surtout due aux difficultés de production.

Les cours du café ont plus que doublé en 2022, que ce soit pour l’Arabica, ou le robusta. On en est maintenant à deux années de tasse à moitié vide. La récolte a été été mauvaise en 2021 au Brésil, premier producteur mondial.  Une sécheresse et trois épisodes hors du commun de gel, un quart de la production perdu. Stocks mondiaux très bas à la fin de l’année. 2022 : pas mieux, le phénomène climatique la Niña a affecté l’Amérique centrale et la Colombie, trop de pluie, peu de fleurs, une récolte catastrophique, la pire en dix ans.

Un avant goût d’un futur bien corsé.

Les cours se sont stabilisés, la suite à court terme va être directement dépendante des récoltes de 2023, elles s’étalent de novembre à mars ou de septembre à mai selon les zones de production, on n’a pas de visibilité. Mais c’est surtout après que ça se corse.

Le café, n’est pas seulement victime des événements climatiques extrêmes, des coups de tabac de la météo, mais aussi du réchauffement climatique. C’est un arbuste d’altitude, il a besoin d’air frais, 18/20 degrés. Très sensible aux variations de température. D’ici à 2050, la moitié des des surfaces actuelles de caféiers seront sans doute devenues trop chaudes. Soit on devra remonter les cultures, soit renoncer.

Pendant ce temps, la demande de café ne fait que croître.

De façon régulière et constante. On a consommé 9.9 millions de tonnes en 2021 dans le monde. Ce sera 30% de plus d’ici à la fin de la décennie.

Ce qui est intéressant, c’est que la consommation de café est liée au développement. Plus les pays sont riches, plus les habitants en boivent. C’est un signe de l’évolution de la prospérité. Les régions où la consommation progresse le plus, c’est la Chine – ce qui est évident -  et plus surprenant l’Afrique. Population qui croit , niveau de vie aussi.

Comment offre raréfié et demande croissante vont se rejoindre, certainement avec des prix  hauts. On ne lit pas l’avenir dans le marc de café, mais pour les consommateurs, le coup sur la cafetière des derniers mois n’est sans doute qu’un avant goût.