Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
Savez-vous qu'il est possible, depuis lundi, de manger des vers en Europe ? La Commission européenne vient d'autoriser les industries alimentaires à incorporer de la poudre de larves dans certains produits.
Un règlement du 20 janvier a autorisé la mise sur le marché d'une poudre de larves de tenebrio molitor, un coléoptère, aussi connu sous le nom de ver de farine. Une autorisation donnée pour cinq ans à une startup, Nutri'Health. Pas la première fois que l’UE autorise des insectes pour l’alimentation humaine : les vers de farine ont déjà reçu une autorisation de mise sur le marché en 2021 sous forme de larves séchées ou dans des produits protéiques. Il y a aussi une autorisation pour des larves de grillons.
Mais pourquoi faire?
On pourrait en trouver dans des compotes, des fromages, des produits à base de pommes de terre. Dans des limites comprises entre 1 et 4%. Pour deux raisons : pour satisfaire une clientèle encore assez hypothétique qui veut des protéines animales mais refuse l'élevage. Ou pour des publics aux besoins alimentaires spécifiques, personnes âgées ou sportifs. Ces protéines d'insectes sont très assimilables.
Cette autorisation suscité une vague d'indignation sur les réseaux sociaux, mais aussi chez certains politiques.
Sur le thème, on veut nous faire manger des insectes de force. Alors: c’est une panique irrationnelle. Personne ne mangera des insectes de force, ou sans le savoir. La présence de cette poudre d’insectes doit clairement être indiquée, comme tous les autres ingrédients, sous l’appellation «Poudre de larves entières de Tenebrio molitor (ver de farine) traitée aux UV». C'est une obligation fixée aussi par la Commission.
Mais ça peut être dangereux ?
L'Efsa, l'agence sanitaire européenne a analysé la question, elle estime que non. Et si l'étiquetage doit être rigoureux, c'est parce que la consommation de larves peut faire courir un risque aux personnes allergiques aux crustacés ou aux acariens. On a aussi pu lire que la chitine, un composant des carapaces, n'était pas digérée par l'humain. C'est vrai. Mais nous mangeons des quantités de choses qui ne le sont pas, les peaux de tomates, certaines fibres. Ce n'est ni grave ni dangereux.
Vous avez l'air très rassurante. Vous allez manger des insectes, vous?
Moi? Non. Je vais peut être goûter, parce que je suis curieuse. Je n'en vois pas l'intérêt. La raison pour laquelle je n'ai pas envie est purement culturelle. Pour qu'un aliment soit consommé, il ne suffit pas qu'il soit consommable. Il doit aussi être accepté intellectuellement. Les larves d'insectes, les insectes, sont consommés ailleurs dans le monde mais pas en Europe, (à quelques exceptions, comme le rouge de cochenilles) car ils suscitent le dégoût. Et c'est ce que je ressens, du dégoût.
Et ce dégoût, aucune autorisation administrative de l'Europe ne peut le surmonter. Il y a une autorisation. Je doute que les industriels de l'alimentation qui fabriquent des produits grand public s'en saisissent. Le risque de faire fuir les clients est encore immense. La meilleure preuve, c’est que depuis les premières autorisations d’incorporer des insectes, il y a quatre ans, il ne s’est strictement rien passé. On avait une société précurseur, en France Ynsect. Elle est en procédure de sauvegarde