François Clemenceau revient chaque matin sur un événement international au micro d'Europe 1 Bonjour.
Face à Trump, l’Europe qui se prend en main : la ministre française des Armées, Florence Parly, a lancé hier avec huit autres partenaires européens l’Initiative européenne d’intervention.
Autant dire tout de suite que c’est une bonne nouvelle pour l’Europe. Cela faisait des années que sur les questions militaires, on se plaignait de l’incapacité de l’Union européenne à agir ou alors à le faire mais trop lentement. Beaucoup, au sein des 27, se disait que s’il fallait se projeter vite à l’extérieur de nos frontières pour agir au nom de l’Europe, la France ou le Royaume Uni, parfois les deux, le feraient très bien. D’abord parce qu’ils en ont les capacités et puis parce que pour beaucoup, l’Allemagne notamment, c’est compliqué de faire intervenir son armée sur des missions qui ne sont pas purement nationales. Ou bien alors, la majorité, souvent les mêmes, s’en remettait à l’OTAN, comme si cela allait de soi puisque l’Alliance est sensée agir au nom de la défense collective de ses membres. Alors bien sûr, les choses ont progressé depuis les années 90, il y a eu de plus en plus d’opérations européennes, en Méditerranée, pour sauver les migrants et lutter contre les trafiquants, dans l’Océan Indien contre les pirates, au Mali ou en Centrafrique pour faire de la formation. Mais il faut bien dire que le plus souvent, ces missions étaient longues à se mettre en place et lourdes à coordonner.
Alors que vient changer cette Initiative européenne d’intervention ?
Presque tout. Vous avez aujourd’hui neuf pays qui ont signé et la porte reste ouverte. Des poids lourds militaires comme la France, l’Allemagne et le Royaume Uni en noyau dur. Auxquels on ajoute l’Espagne, les Pays Bas, la Belgique, le Danemark, l’Estonie et le Portugal, tous membres de l’OTAN (autrement dit avec l’habitude de l’entrainement et des missions à l’extérieur) et tous prêts à mettre, au cas par cas, une partie de leurs forces en commun pour agir sur des opérations décidées par l’Union européenne. Ce n’est donc pas une armée européenne, ni un état-major, mais une sorte de pacte pour générer des forces rapidement et de façon très souple et très rapide pour agir. Pas forcément pour aller se battre, mais pour aller sauver des vies lors de catastrophes naturelles, se mettre à la disposition des Nations Unies, ou s’entraider en cas de coup dur, peut-être en cas d’attentats terroristes ou d’attaques informatiques. L’idée est de s’entrainer ensemble, d’échanger nos officiers, de partager nos doctrines d’intervention pour être plus mobiles et plus forts.
Et j’imagine qu’à Washington, on regarde tout cela d’un œil très méfiant.
C’est vrai qu’on a jamais aimé à l’OTAN que l’Europe s’invente des modèles d’autonomie. On souhaite que l’Europe paye davantage pour l’OTAN, pas qu’elle devienne autonome pour se passer de l’OTAN et encore moins en profiter pour ne plus acheter de matériel de défense américain. Quand Emmanuel Macron et Angela Merkel parlaient d’autonomie stratégique européenne face à Donald Trump, c’est à cette initiative qu’ils pensaient. Pour être moins dépendants et surtout plus musclés pour agir en fonction des seuls intérêts européens.