Hélène Kohl revient ce matin sur un événement international au micro d'Europe 1 Bonjour.
En Allemagne, à l’heure où nous parlons, Angela Merkel est encore en poste mais pour combien de temps ?
Oui même si cette crise politique est plutôt une série à épisodes, c’est bien de cela dont il est question au finale : déroulons la pelote. Si Angela Merkel n’arrive pas à endiguer très vite – dans les prochaines heures – cette crise historique avec son aile droite, elle risque de perdre sa majorité. Elle serait alors contrainte de poser la question de confiance au parlement, et si elle la perd – a priori on part pour de nouvelles élections à l’automne…
Tout ça parce qu’un parti régional n’est pas satisfait de l’accord négocié de Bruxelles ? Vu d’ici cela semble absurde.
C’est aussi absurde vu de Berlin ! Toute la journée d’hier, et une grande partie de la nuit, l’Allemagne a suivi complètement abasourdie le jeu de dupes qui se tramait en Bavière, au siège de la CSU; qui est la déclinaison locale de la CDU de Merkel. On parle de partis frères, ils siègent ensemble au parlement comme une seule et unique formation.
Mais sur la question migratoire il y avait un conflit larvé depuis des années. D’un côté la chancelière et sa ligne d’ouverture, de l’autre les Bavarois, mené par le ministre de l’Intérieur, beaucoup plus à droite et qui veulent maintenant carrément une fermeture des frontières, avec des refoulements systématiques vers l’Autriche. C’est sur ce point que s’est cristallisée la crise actuelle.
Une mesure qui sonnerait la fin de Schengen, et serait un séisme en Europe. Voilà ce qui est en jeu dans cette crise. Il ne s’agit pas seulement de la stabilité du gouvernement Merkel.
Et donc c’est un continent tout entier qui est suspendu à la décision de la CSU ?
Un parti qui ne représente que 6% des voix au niveau national en Allemagne ! Mais qui est pris au piège de sa propre surenchère contre Merkel ! Evidemment que les conservateurs Bavarois sont conscients des enjeux, et d’ailleurs ils seraient sans doute les premières victimes de cette spirale de bluff car mi-octobre il y a des élections en Bavière et les sondages sont désastreux. C’est pour cela que cette nuit quand le ministre de l’Intérieur a annoncé sa démission, le parti a été pris de panique… et il a fait machine arrière
Mais en même temps ils ont tellement souvent brandi la menace de la rupture avec Merkel qu’il en va maintenant de leur crédibilité. Si vous rajoutez à cela que Crazy Horst comme on surnomme souvent le ministre, est totalement imprévisible, qu’il déborde d’orgueil et qu’il flirte régulièrement avec le populisme, vous avez un numéro de comedia d’ell'arte pathétique, dont on pourrait rire s’il n’était pas tout simplement explosif.
Ça fait penser aux coups d’éclat à la Trump !
Tout à fait, la comparaison tient parfaitement. Ici on dit aussi que c’est une stratégie "à la Cameron", une allusion au coup de pression complètement raté de l’ancien premier ministre anglais avec son référendum sur le Brexit.