Pour que le rattrapage soit efficace, les Français doivent consommer, selon Éric Heyer. 3:49
  • Copié
Guilhem Dedoyard
Le rebond de l'économie est-il un vrai redémarrage ou un simple rattrapage à la suite d'une année 2020 difficile ? Pour l'économiste Éric Heyer, la France est dans le second cas de figure. Cela doit inciter l'exécutif à encourager la consommation des Français et à soutenir les entreprises qui doivent l'être, selon lui. 
ANALYSE

L'économie est-elle en train de repartir ? Bruno Le Maire se veut très confiant et estime que c'est le cas. Invité dimanche du Grand rendez-vous Europe 1/Les Echos/CNews, le ministre de l'Économie s'est montré optimiste pour la croissance après Covid. Il a également tenu à affirmer son soutien à la réforme des retraites. Pourtant, pour Éric Heyer, économiste et directeur du département analyse et prévision de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la situation française doit inciter à la prudence et la période doit être consacrée à motiver les Français à consommer. "Aujourd'hui, ça va mieux, mais ça ne va pas bien", prévient-il au micro d'Europe 1, dimanche.

Selon Éric Heyer, le rebond actuellement observé est "un phénomène de rattrapage". Cela signifie d'après lui qu'on a "arrêté l'hémorragie mais on n'a pas encore rattrapé le retard" accumulé à cause de la crise sanitaire. Il souligne ainsi que l'économie française tourne encore "4 à 5% en dessous de son niveau normal", et parfois beaucoup plus dans certains secteurs.

Des faillites supplémentaires à prévoir

L'économiste estime qu'il faut être lucide sur la situation d'après-crise. "Il y aura sans doute un peu plus de faillites parce qu'elles font partie de la vie économique". Comme le rappelle Éric Heyer, "lors d'une année normale, il y a à peu près 50.000 entreprises qui font faillite". Or, en 2020, "il n'y en a que 35.000 parce qu'on a sauvé toutes les entreprises, y compris celles qui auraient dû faire faillite". Donc, le rattrapage va aussi avoir lieu concernant les faillites selon l'économiste, qui n'y voit pas une mauvaise chose. "On peut encore tenir sous perfusion un certain nombre d'entreprises, mais c'est vraiment retarder un certain nombre d'échéances."

Plutôt que des aides généralisées, Éric Heyer défend l'idée qu'il va falloir essayer de sauvegarder en priorité "les entreprises qui étaient en bonne santé avant la crise et qui ont été mises en difficulté par ces mesures prophylactiques de restrictions sanitaires". Cela implique de faire le tri "entre les entreprises qui auraient dû faire faillite et celles qui ont été mises en difficulté". L'économiste reconnaît toutefois que le processus est difficile. 

Encourager la consommation plutôt que l'épargne

L'autre élément à prendre en compte est le "point d'interrogation qu'est la sur-épargne". Elle a été chiffrée à 98 milliards d'euros en 2020. "Donc le rattrapage en 2021-2022 dépend de l'utilisation que vont faire les ménages de cette sur-épargne accumulée pendant la période de confinement", explique Éric Heyer.

Pour inciter les Français à consommer, "il va falloir que les ménages aient confiance dans l'avenir". Cela implique d'éviter les signaux négatifs "qui indiqueraient que l'on va augmenter la fiscalité, que les droits, au chômage ou à la retraite, seront inférieurs" parce que ces derniers inciteraient à épargner davantage. L'économiste estime donc que relancer la réforme des retraites comme le souhaite l'exécutif n'est pas le "meilleur message qu'il faut qu'il envoie aujourd'hui pour relancer définitivement l'économie".