Réforme des retraites : quel avenir pour les régimes spéciaux ?

Jean-Paul Delevoye pilote discrètement la réforme des retraites.
Jean-Paul Delevoye pilote discrètement la réforme des retraites. © STEPHANE DE SAKUTIN / AFP
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Le haut-commissaire à la réforme des retraites Jean-Paul Delevoye aborde à partir de lundi, avec les syndicats, la suppression d’une partie des régimes spéciaux.

Un régime de retraite universel est-il compatible avec des exceptions ? C’est la question sur laquelle vont plancher ensemble Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire à la réforme des retraites, et les partenaires sociaux. La mise en place d’un système par points avance doucement mais sûrement et les négociateurs abordent à présent l’épineuse question des régimes spéciaux. Aujourd’hui 4,6 millions de salariés et fonctionnaires bénéficient de ces exceptions permettant de partir à la retraite avant l’âge légal de 62 ans.

Des départs anticipés, sous conditions. Au total, il existe 42 régimes spéciaux dans le privé. Le plus connu est sans doute celui des cheminots, sujet à bien des fantasmes, qui ouvre les droits à la retraite dès 57 ans. Mais pour partir avec une retraite à taux plein, il faut tout de même avoir effectué 27 ans de service à la SNCF et cotisé 43 ans. Des conditions que l’on retrouve également à la RATP. Dans certaines branches, l’âge légal de départ à la retraite tombe à 52 ans. C’est le cas des marins, qui doivent cependant avoir accompli 37,5 ans de service en mer pour toucher une retraite complète. EDF, la Banque de France, l’Opéra de Paris, la Comédie Française ou encore les agents des travaux publics de l’État disposent aussi de régimes spéciaux.

 

Certains fonctionnaires, ceux des catégories "actives" dont le métier présente un risque ou engendre des "fatigues exceptionnelles", bénéficient également de conditions de départ qui leur sont propres. Ainsi va des agents de la police nationale, qui peuvent partir dès 52 ans. Mais, dans les faits, l’âge moyen de départ à la retraite se situe plutôt autour de 56 ans. On peut aussi citer le cas des aides-soignants ou des sapeurs-pompiers, dont l’âge légal de départ est fixé à 57 ans.

Le haut-commissaire privilégie une approche ouverte. Lors de sa campagne, Emmanuel Macron était partisan d’une harmonisation des différents régimes de retraite au sein d’un système par points universel, avec "des règles communes de calcul des pensions" et fondé sur "un principe d’égalité : pour chaque euro cotisé, le même droit à pension pour tous". Une réforme radicale sur le papier mais peut-être pas autant au moment de son application. En effet, dans le document de travail envoyé par Jean-Paul Delevoye aux partenaires sociaux, le haut-commissaire à la réforme n’exclut pas de conserver certaines dérogations.

 

"La mise en place d’un système universel permet de maintenir des dispositifs particuliers, dès lors que ces dérogations reposent sur des spécificités objectives qui justifient un droit au départ anticipé", explique Jean-Paul Delevoye dans ce texte, auquel Le Parisien a eu accès. Mais il ne dévoile pas son plan. "Quels critères spécifiques à la Fonction publique ou aux régimes spéciaux seraient de nature à justifier dans le système universel des départs anticipés ?", s’interroge simplement le haut-commissaire.

Mieux prendre en compte la pénibilité. Entre les lignes, on comprend simplement que tous les régimes spéciaux ne seront pas conservés dans la future réforme des retraites, qu’il faudra faire le tri. Les syndicats ont d’ores et déjà indiqué qu’ils seraient vigilants au respect des droits des salariés concernés. "Quel que soit le statut de votre employeur, public ou privé, un métier pénible est un métier pénible", a ainsi rappelé Philippe Pihet secrétaire confédéral de Force ouvrière. La CFDT plaide, elle, pour une adaptation de la prise en compte de la pénibilité, non plus selon les catégories professionnelles, mais en fonction du poste.

Convergence des âges de départ à la retraite. Quel que soit le résultat des négociations (la réforme doit être présentée fin mai), une chose est sûre : la convergence des âges de départ à la retraite des différents régimes, engagée lors des précédentes réformes, devrait se poursuivre. Ainsi, les assurés du régime général partant à la retraite en 2045 le feraient en moyenne à 64,5 ans environ, selon le Conseil d'orientation des retraites (COR). Les assurés de la Fonction publique hospitalière ou encore des entreprises électriques et gazières convergeraient aussi à 64 ans à cette même date.