Pour se faire entendre, les éleveurs de porc sortent les bonnets roses

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AGRICULTURE - Confrontés à des difficultés persistantes, les éleveurs bretons ont décidé de "marketer" leur combat avec une icône : le bonnet rose. Effet visuel garanti.

Malgré des opérations coup de poing, des appels aux autorités publiques et des tables rondes à répétition, rien n’y fait : les éleveurs de porc restent confrontés à de graves difficultés. La profession a donc décidé de se doter d’un emblème pour populariser son combat, les bonnets roses, avec l’espoir d’avoir le même impact que les bonnets rouges bretons, ceux-là même qui avaient fait plier le gouvernement. Vêtus de ce couvre-chef, les éleveurs se sont rassemblés jeudi pour se faire entendre et préparer leurs futures actions.

"On est face à des drames humains chaque jour". Au moins un millier d'éleveurs de porcs bretons en difficulté se sont rassemblés jeudi dans une commune emblématique pour la profession : Plérin, où est fixé le cours du porc qui fait référence pour le reste du pays. Et malgré la couleur rose arborée, l’ambiance n’était pas à la fête. "On est face à des drames humains chaque jour et on n'a pas les moyens de faire face", a déclaré à l’AFP Didier Lucas, président de la branche départementale du syndicat FNSEA.

Un sombre constat confirmé par le préfet de région : "je crains que l'on aille au-devant de difficultés qui vont se traduire par des manifestations et troubles à l'ordre public", a prévenu Patrick Strzoda. Et ce dernier d’ajouter qu’entre l’été 2015 et fin janvier, ses services auront "traité 1.000 dossiers d'éleveurs porcins en termes d'aide à la trésorerie, d'aide à la restructuration de la dette. (…) Pour bon nombre, malheureusement, ce ne sera (...) pas suffisant pour éviter des cessations d'activités".

Un problème inchangé : le prix du porc jugé trop bas. Le nœud du problème reste une nouvelle fois le prix payé aux éleveurs, qui est inférieur à leurs coûts de production. Jeudi, le kilo était acheté 1,087 euro alors que ce dernier coûte au moins 1,40 euro à produire. Si l’Allemagne vend sa production à un prix similaire à celui pratiqué en France, les coûts de production y sont moins élevés. Quant aux deux autres principaux producteurs européens, l’Espagne et les Pays-Bas, ils pratiquent des prix bien inférieurs grâce à des coûts de revient là aussi moindres, selon les données de l’Ifip, l’institut du porc.

La filière française demande donc un accord pour faire remonter le prix du kilo entre 1,40 et 1,50 euro. Problème : un accord similaire conclu cet été a rapidement été abandonné, une partie des acheteurs ayant refusé de jouer le jeu et l’un des principaux producteurs ayant accepté de vendre en-dessous du prix convenu. De plus, la Commission européenne a ouvert une enquête sur cet accord, estimant qu’il pourrait représenter une atteinte à la concurrence. Les éleveurs proposent donc une autre série de mesures pour regagner des marges de manœuvres : obtenir des baisses de charges sociales ou de normes afin d’abaisser leurs coûts de production.

Parier sur le label "Élevé en France". En attendant, les éleveurs espèrent que le consommateur français sera prêt à payer un peu plus si la viande qu’il achète était élevée dans l’Hexagone. Encore faut-il que cela soit indiqué sur les étiquettes, ce qui est trop rarement le cas : la grande distribution et surtout l’industrie agroalimentaire s’y opposent, estimant qu’il s’agit d’une usine à gaz. Car si 90% de la viande de porc consommée en France provient de l’Hexagone, c’est beaucoup moins le cas lorsqu’il s’agit de charcuterie et de plats préparés.

Les éleveurs de porc réclament donc que le gouvernement publie un décret rendant cet étiquetage obligatoire. Et s’ils ne sont pas entendus, leur menace est claire : ils n'accepteront plus aucun contrôle de l’administration dans leurs élevages.