Licenciement économique : les règles bientôt assouplies ?

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La ministre du Travail Myriam El Khomri. © MARTIN BUREAU / AFP
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EMPLOI - Le gouvernement réfléchit à une réforme du licenciement économique, qui pourrait être facilité.

Ce sera probablement l’une des dernières grandes réformes du quinquennat Hollande. Censé notamment simplifier le Code du travail, le projet de loi El Khomri, du nom de la ministre du Travail, est pratiquement prêt. Ne reste plus que quelques arbitrages à effectuer d’ici sa présentation officielle attendue pour la première moitié du mois de mars. Sauf que ces derniers détails à régler sont loin d’être anodins : d’après Les Echos, le gouvernement envisagerait notamment d’inclure dans cette loi une réforme des licenciements économiques. Objectif annoncé : simplifier et faciliter les licenciements dans l’espoir que cela encourage les embauches.

Le licenciement économique aujourd’hui. Un licenciement économique est bien plus avantageux qu’un licenciement classique ou qu’une rupture conventionnelle puisqu’il protège davantage à la fois l’employeur et l’employé. Ce dernier peut alors bénéficier d’un Contrat de sécurisation professionnelle (CSP) et recevoir environ 100% de son ancien salaire en allocations pendant un an.

Sauf qu’un licenciement économique est soumis à des conditions strictes : pour l’invoquer, l’entreprise doit prouver qu’elle rencontre des difficultés (secteur en crise, perte de contrats, mutation technologique, etc). Les employeurs y réfléchissent donc à deux fois avant de procéder à un licenciement économique, de crainte que la justice juge que les conditions ne sont pas réunies. Le gouvernement envisage donc deux pistes pour mettre fin à cette incertitude.

Première piste : préciser le licenciement pour le rendre incontestable. Lorsqu’un licenciement économique est contesté, le juge dispose d’une grande marge de manœuvre : il peut par exemple estimer que l’entreprise n’était pas vraiment en difficulté et annuler le caractère économique du licenciement. Cette marge d’appréciation du juge est considérée par certaines entreprises comme une épée de Damoclès.

Pour mettre fin à cette incertitude, le gouvernement réfléchit donc à préciser davantage les conditions nécessaires à un licenciement économique : si la loi est plus détaillée, le juge aurait alors moins de liberté d’interprétation et l’employeur plus de certitudes. C’est d’ailleurs le choix fait par l’Espagne en 2012 en explicitant la notion de difficultés économiques : il faut trois trimestres consécutifs de baisse du chiffre d’affaires par rapport à l’année précédente.

Deuxième piste : invoquer la compétitivité pour licencier. L’autre piste envisagée par le gouvernement, toujours d’après Les Echos, serait d’accorder encore plus de liberté à l’employeur en l’autorisant à licencier au seul motif qu’il souhaite restaurer la compétitivité de son entreprise. Un motif qui permettrait de justifier une grande partie des licenciements.

Un dossier trop explosif pour être ouvert ? Au regard de la nature des réformes envisagées, rien ne dit que le gouvernement passe à l’action tant le sujet est sensible. D’abord auprès des travailleurs eux-mêmes, ensuite auprès des syndicats, qui y sont catégoriquement opposés. Par principe, les syndicats estiment en effet que faciliter les licenciements n’a jamais encouragé les embauches. Le détail des mesures envisagées ne va pas les rassurer davantage : par effet d’aubaine, les entreprises pourraient être tentées d’utiliser leurs marges de manœuvre pour rentrer dans les cases du nouveau licenciement économique.

 

Ce que prévoit la loi El Khomri

Le projet de loi porté par la ministre du Travail doit être l’un des derniers chantiers législatifs du gouvernement. Son objectif : simplifier la création d’emploi en flexibilisant le marché du travail tout en apportant de nouvelles sécurités. Autrement, cette loi est censée être un premier pas vers la "flexisécurité".
Cette réforme doit s’articuler autour de grands principes :
- Le Code du travail serait réécrit pour être simplifié
- Les 35 heures seraient un peu plus détricotées, avec des heures supplémentaires moins bien payées 
- Le dialogue social en entreprise serait réformé : la loi pourrait instaurer un référendum d’entreprise pour débloquer la situation lorsque les syndicats ne sont pas d’accord entre eux et bloquent un nouvel accord
- La formation bénéficierait d’un coup de pouce, avec une priorité accordée aux chômeurs de longue durée afin qu’il se forme à de nouveaux métiers
- Réforme de la médecine du travail : 
- Le compte personnel d’activité serait mis en place
- Les TPE et PME bénéficieraient de nouvelles aides
- Les indemnités prud'homales seraient plafonnées, comme le prévoyait la loi Macron