Grève des taxis : retour sur une journée émaillée de violences

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© THOMAS SAMSON / AFP
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JOURNÉE DE MOBILISATION - Les chauffeurs de taxi ont lancé jeudi matin une grande journée de mobilisation pour protester contre l'application interdite UberPOP. Une mobilisation émaillée de violences.

Ce jeudi était une journée de mobilisation pour les chauffeurs de taxis. Des milliers de taxis en colère ont convergé dès le matin matin autour des aéroports parisiens pour dénoncer la "concurrence sauvage" de l'application mobile UberPop. Des blocages ont également eu lieu à Nice, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Lyon et Lille.  "Le but c'est d'occuper l'espace, parce qu'il y a un vrai ras-le-bol", a expliqué Karim Asnoun, de la CGT. Sauf que plusieurs rassemblements ont donné lieu à des débordements et plusieurs agressions. Le gouvernement a décidé de réagir après avoir rencontré les syndicats de taxis.

LES CINQ INFOS A RETENIR

• 2.800 chauffeurs de taxi ont manifesté jeudi partout en France

• De nombreux incidents ont été signalés à Paris notamment

• Manuel Valls condamne les violences

• La préfecture de police a pris un arrêté interdisant l'activité d'UberPOP, ce à quoi le directeur général d'Uber France a répondu que "ça ne changeait rien"

• Les véhicules UberPOP doivent être "systématiquement saisis" lorsqu'ils sont pris en flagrant délit, a annoncé jeudi soir le ministre de l'Intérieur après une réunion avec les syndicats de taxis

Les véhicules UberPop menacés de saisie. "UberPOP est un service illégal, il doit être fermé", a martelé Bernard Cazeneuve, tout en reconnaissant que seule la justice pouvait prononcer une telle fermeture. Tous les comités opérationnels départementaux antifraude se réuniront lundi sous l'autorité des préfets et des procureurs "pour mettre en place toutes les mesures permettant de réprimer l'exercice illégal de la profession de taxi", a-t-il ajouté. "La garde des Sceaux mobilisera également l'ensemble des procureurs afin que soient données des instructions fermes et précises : les véhicules des conducteurs UberPOP doivent être systématiquement saisis lorsqu'ils sont pris en flagrant délit", a prévenu le ministre.

Manuel Valls s'exprime. En marge d'un voyage officiel en Colombie, le Premier ministre a pris la parole pour "condamner avec la plus grande sévérité" des violences "inadmissibles" qui ont émaillé les manifestations. Manuel Valls a néanmoins réaffirmé que l'application UberPop était "clairement illégale". Les "auteurs (de ces violences), qui se trouvent dans les deux camps, puisqu'il y a deux camps, doivent être poursuivis et seront poursuivis", a ajouté le Premier ministre. 

Un arrêté préfectoral contre UberPop. A la demande du ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, un arrêté préfectoral a été pris jeudi après-midi contre "l'activité illicite des personnes qui utilisent des systèmes de mise en relation de clients avec des chauffeurs de véhicule en dehors du cadre de la loi". Dans le viseur du préfet : les applications UberPop, Heetch et Djump. Bernard Cazeneuve a aussi saisi le procureur de la République de Paris contre UberPop, dénonçant un "délit d'organisation d'activités illicites de transports de personnes". 

"C'est un arrêté préfectoral, on va le contester et on verra ce que donne le recours, pour l'instant ça ne change rien, UberPOP peut continuer", a réagi le directeur général d'Uber France, Thibaud Simphal, sur BFM Business, avant d'ajouter : "il y en a déjà eu dans plusieurs villes, à chaque fois on les conteste".

Plusieurs fédérations de taxi reçues à Matignon. Plusieurs fédérations de taxis seront finalement reçues à Matignon à 18h30 alors que quelques heures plus tôt, l'intersyndicale annonçait qu'elle boycottait à l'unanimité la réunion. 

2.800 chauffeurs de taxis ont manifesté. Dans toute la France, 2.800 chauffeurs de taxis ont manifesté et "une trentaine de points de blocage" étaient recensés à midi. "Deux interpellations ont eu lieu à Paris et à Roissy", a précisé une source policière. La première concerne un homme soupçonné d'avoir jeté des projectiles sur les forces de l'ordre, blessant un CRS à Paris, porte Maillot. A l'aéroport de Roissy, un chauffeur de VTC, qui a blessé légèrement un chauffeur de taxi, a été interpellé et placé en garde à vue, a-t-elle ajouté. Au total, 8 gardes à vue ont été comptabilisées dans la journée. 

Grosses perturbations à Paris. Les accès en voiture à trois terminaux de Roissy étaient bloqués et la circulation était perturbée dans certains quartiers de Paris jeudi dès 6h du matin. A Paris, d'autres endroits stratégiques comme les aéroports d'Orly, les gares ainsi que place Denfert-Rochereau et la porte Maillot (où 17 km de bouchons ont été repérés à 8h30) ont été bloqués. Sur le périphérique de la capitale, certains chauffeurs ont commencé à brûler des pneus et bloquer la circulation dès les premières heures. Dans les deux sens, dans l'ouest de Paris, il était même fermé.

Véhicules retournés, pneus brûlés,... De nombreux incidents ont été signalés en marge de la grève dans la capitale : chauffeurs (VTC et taxis) auraient été agressés, des véhicules retournés ou démolis. Un photographe du journal Libération a également été pris à partie par des chauffeurs de taxi, rapporte le rédacteur en chef du quotidien. Un camion de pompiers a dû être dépêché porte Maillot, où sont réunis les grévistes, pour prendre en charge un blessé.

Privilégiez les transports en commun. Pour éviter toutes ces perturbations, les autorités ont appelé jeudi Parisiens et banlieusards à emprunter les transports en commun. "Difficultés de circulation aux abords de l'aéroport CDG, il est conseillé d'emprunter le RER pour vous y rendre", conseille la Préfecture de police sur Twitter

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Pourquoi UberPop énerve. Après Paris, Lyon, Lille, Toulouse, Bordeaux et Nice, Uber, numéro un mondial des voitures de transport avec chauffeur (VTC), a annoncé début juin l'arrivée à Marseille, Strasbourg et Nantes de son service controversé UberPop. Le principe ? La société met en relation les clients avec des chauffeurs non professionnels, pour des tarifs défiant toute concurrence. Des chauffeurs qui ne paient ni charges, ni licence donnant le droit d'exercer, et qui ne suivent pas les 250 heures de formation nécessaire à l'exercice de la profession de taxi. Uber revendique 400.000 utilisateurs d'UberPOP en France, où le nombre de taxis est faible.

"Le gouvernement défend les voyous. "Tout le monde est chauffé à blanc et il va y avoir mort d'homme". A l'image de ce chauffeur bordelais au micro d'Europe 1, les taxis ne décolèrent pas. "On sert de vache à lait. Nous sommes les honnêtes qui payons des charges, mais c'est nous les 'enfoirés de taxis'. Le gouvernement défend les voyous. Qu'ils viennent les ministres, se lever à 5h du mat', astiquer la voiture pour aller attendre sans même savoir ce que l'on peut gagner", renchérit un chauffeur bordelais.