Le secteur automobile a-t-il tourné la page de la crise ?

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Dans une usine du groupe PSA. © SEBASTIEN BOZON / AFP
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Des ventes en nette hausse, de nouveaux modèles, de nouvelles technologies : en apparence, l’automobile a surmonté la crise de 2008

Avec des immatriculations en hausse de 2,5% en septembre, les constructeurs automobiles français peuvent aborder le Mondial de l’automobile avec le sourire. D’autant que les annonces enflammées se multiplient : Renault présente une gamme totalement rénovée, une première, tandis que PSA a officiellement surmonté ses difficultés et fait figure de bon élève en matière de fraude aux émissions polluantes. Officiellement, la crise de 2008 appartient donc au passé. Mais si le secteur automobile cesse de perdre du terrain, a-t-il pour autant retrouvé ses niveaux d’avant-crise ?

Au niveau mondial, les ventes repassent la cinquième. Les constructeurs automobiles ont retrouvé le sourire depuis peu et cela se retrouve dans les discours. C’est notamment le cas de Carlos Ghosn, PDG de l’alliance Renault–Nissan, qui renoue avec des objectifs ambitieux depuis qu’il a secouru le japonais Mitsubishi : "L'objectif d'intégrer le Top 3 mondial serait atteint. La place de numéro un mondial n'est pas une priorité. Mais sur le fond, c’est tout à fait atteignable", a-t-il assuré. Même optimisme chez Toyota, qui ambitionne de réaliser cette année ses "meilleures ventes depuis 2008" en Europe, ou encore chez Volkswagen, dont le patron Matthias Müller a déclaré fin août espérer "redevenir rentable peut-être dès 2016" malgré le scandale du "dieselgate".

L’optimisme est donc de retour dans le secteur et c’est surtout une question de chiffres : après avoir calé en 2008 et 2009 à cause de la crise économique provoquée  par les subprimes, la courbe des ventes automobiles a repris son ascension. L’an dernier, il s’est ainsi vendu 66,3 millions de véhicules particuliers, alors que ce chiffre était tombé à 49,5 millions d’unités en 2009. En six ans, les ventes ont donc bondi de près de 33%.

Une embellie très contrastée selon les zones. Si le marché automobile mondial est clairement repassé dans le vert depuis 2010, ce rétablissement cache de profondes disparités. En effet, vu d’Asie, la crise de la fin des années 2000 est passée quasi inaperçue sur le marché automobile : les ventes n’ont jamais chuté et ont même été multipliées par deux entre 2008 et 2015. De même, les marchés ont retrouvé leurs niveaux d’avant-crise en Amérique du Nord ou encore en Afrique.

En revanche, la situation est tout autre en Europe. Si les derniers mois ont été bons, le marché automobile ne s’est toujours pas remis de la crise de 2008, malgré une aide temporaire de nombreux États sous forme de prime à la casse. En 2015, il s’y est vendu 16,4 millions de véhicules particuliers, contre 19,6 millions en 2007. L’Amérique du Sud rencontre, elle, des difficultés plus récentes depuis que les cours des matières premières ont flanché.

En France, le secteur automobile reste convalescent. Ce décrochage européen s’observe également en France, où les ventes ont chuté de près de 20% entre 2009 et 2013, avant de se reprendre. Si la situation s’est depuis améliorée, les immatriculations n’ont toujours pas retrouvé leurs niveaux d’avant-crise. Mais le pourront-elles un jour ?

En effet, à la différence d’un continent asiatique en forte croissance économique et démographique, le marché européen est presque saturé : la population y croit bien plus lentement et dispose très souvent déjà d’un véhicule. Les constructeurs automobiles l’ont bien compris, en réduisant leurs effectifs (75.000 emplois supprimés entre 2008 et mi-2016 selon l’Insee), en fermant plusieurs sites de productions européens (dont l’emblématique PSA Aulnay) et en multipliant les accords de compétitivité. Ils ont également délocalisé et investi dans des pays en plein développement. Un chiffre symbolise ce désinvestissement du Vieux continent : depuis la crise, la production automobile française a chuté de 40%, deux fois plus vite que les ventes.

Mais l’Europe est peut-être en train de reculer pour mieux sauter : le scandale du "dieselgate" a en outre obligé les constructeurs à accélérer leur travaux sur des motorisations moins polluantes (hybride, électrique, hydrogène) et des usages nouveaux (voiture connectée, autonome). De quoi prendre de l'avance sur la voiture de demain ?