La loi Travail rêvée par la droite

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G.V. avec AFP , modifié à
La réécriture du projet de loi au Sénat permet d’avoir une idée des intentions de la droite en termes de droit du travail.

La loi Travail fait son retour lundi à l’Assemblée nationale, après un passage mouvementé au Sénat : la haute assemblée, où le parti Les Républicains (LR) est majoritaire, a revu en profondeur le texte de Myriam El Khomri. Si ces ajouts et modifications devraient être annulés dans la foulée par les députés, cette version temporaire du projet de loi a un mérite : donner un aperçu des intentions de la droite en matière de droit du travail. Retour sur les principaux points ajoutés, supprimés ou modifiés par les sénateurs LR.

Revenir sur les 35 heures. La fin des 35 heures est devenue un mantra de la droite française et les sénateurs LR n’ont pas manqué de revenir sur le sujet : ces derniers souhaitent autoriser une entreprise à revenir à la semaine de 39 heures, y compris lorsqu’aucun accord d'entreprise ou de branche n’a pu être trouvé avec les représentants des salariés. Les sénateurs veulent également autoriser les PME à proposer à leurs employés de passer au forfait jour, comme le gouvernement l’envisageait initialement avant d’y renoncer.

La droite est aussi revenue sur une réforme du travail à temps partiel. Depuis 2014, les travailleurs à temps partiel employés à long terme par une entreprise doivent se voir proposer au minimum 24 heures de travail par semaine. Un seuil que la droite souhaite supprimer.

Faciliter les licenciements. Si la première mouture du projet de loi Travail prévoyait de faciliter les procédures de licenciement et d’en réduire le coût, le gouvernement a rapidement dû reculer. Le groupe LR a rétabli ces mesures, et notamment le plafonnement des indemnités de licenciement aux prud'hommes, limitées à 15 mois de salaire maximum.

Pour la majorité sénatoriale, une entreprise devrait également pouvoir procéder à un licenciement économique dès qu’elle enregistre une baisse de chiffre d'affaires ou du carnet de commandes d'au moins 30% pendant un semestre sur le territoire français ou qu’elle perd un marché représentant au moins 30% de son activité.

Supprimer les effets de seuil pour les TPE. L’un des objectifs de la loi Travail est de renforcer la présence et le rôle de délégués du personnel dans les petites entreprises, où ils sont très rares. La majorité au Sénat a, au contraire, repoussé un peu plus loin le seuil à partir duquel une entreprise a de nouvelles obligations en termes de dialogue social : le seuil pour la mise en place de délégués du personnel est ainsi passé notamment de 11 à 20 salariés.

Réduire les prélèvements sur l’intéressement et la participation. Le Sénat a également réduit de 20% à 16% le forfait social pour l'ensemble des sommes versées au titre de la participation et l'intéressement, "afin de renforcer le pouvoir d'achat des salariés".

Ne pas généraliser le recours au délégué syndical dans les PME. Censée renforcer le dialogue social, la loi Travail prévoit de faire rentrer les délégués syndicaux dans les PME, où leur présence n’est pas obligatoire. Une réforme supprimée par le Sénat qui veut permettre la signature des accords collectifs directement avec les institutions représentatives du personnel ou, à défaut, recourir à une consultation du personnel.

Alléger le compte pénibilité. Censé mesurer la pénibilité de certains métiers pour permettre aux travailleurs concernés de partir plus tôt à la retraite, le compte pénibilité est déjà entrée en application depuis 2015 et doit monter en puissance depuis le 1er juillet, prenant en compte six nouveaux facteurs de risques (postures pénibles, manutention manuelle de charges, agents chimiques, vibrations mécaniques, températures extrêmes et bruit). Mais les organisations patronales y voient une usine à gaz. Un message bien entendu par les sénateurs : ces derniers ont proposé de le limiter à quatre facteurs, alors que la loi en prévoit à l’origine dix. Le groupe LR a également supprimé le compte d'engagement citoyen.

Supprimer la garantie jeunes. Ajoutée au projet de loi pour calmer la grogne des étudiants, ce dispositif prévoit d’offrir une dernière chance aux jeunes décrocheurs pour qu’ils bénéficient d’une formation et soit accompagné dans la recherche d’une première expérience professionnelle. Les sénateurs ont supprimé ce chapitre du projet de loi.

Proposer l’apprentissage plus tôt. Aujourd’hui, l’apprentissage est ouvert aux jeunes à partir de 16 ans. Le Sénat a proposé d’abaisser ce seuil à 15 ans.