Inversion de la courbe du chômage : le timing se resserre pour le gouvernement

Alors que le gouvernement se voulait optimiste, le chômage est reparti à la hausse en août.
Alors que le gouvernement se voulait optimiste, le chômage est reparti à la hausse en août. © ALAIN JOCARD / AFP
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Clément Lesaffre , modifié à
A un peu plus de sept mois de la prochaine présidentielle, le gouvernement n'a plus beaucoup de temps pour espérer inverser durablement la courbe du chômage.

En 2012, quand François Hollande avait promis d'inverser la courbe du chômage en un an, le pari paraissait risqué. Il a de fait fallu attendre le début de l'année 2016 pour sentir les premiers frémissements favorables. A un peu plus de sept mois de la fin de son mandat, il reste peu de temps au chef de l'Etat pour tenir sa promesse. Il s'était d'ailleurs montré optimiste après les bons chiffres de juillet (-0,5% de demandeurs d'emploi sans activité) mais ils suivaient deux mois de hausses légères. Les chiffres de Pôle emploi pour le mois d'août douchent l'enthousiasme du gouvernement : 50.200 demandeurs d'emploi de plus dans la catégorie A (+1,4%), deuxième plus forte hausse du quinquennat. La perspective d'une inversion durable s'éloigne donc encore un peu plus.

Une courbe encore très volatile. "Il est communément admis que l'inversion de la courbe du chômage correspond à trois mois consécutifs de baisse de la catégorie A de Pôle emploi (demandeurs d'emploi sans aucune activité, ndlr)", explique Xavier Timbeau, directeur principal de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Un phénomène qui ne s'est jamais produit depuis l'arrivée de François Hollande au pouvoir. Il s'en est cependant approché cette année avec deux baisses en mars et en avril, immédiatement remises en cause par deux mois de hausse. Idem cet été : baisse en juillet, forte hausse en août. "Avant de pouvoir parler d'inversion, il faudrait déjà qu'on observe une stabilisation. Or ce n'est pas le cas, la courbe est encore très volatile", rappelle l'économiste.

Pourtant, il y a bien eu ces derniers mois des signes pour soutenir l'optimisme de François Hollande, notamment le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT), publié par l'Insee. Après un plus haut à 10,2% au troisième trimestre 2015 (en France métropolitaine), il est redescendu à 9,6% mi-2016, le plus bas niveau du mandat du Président socialiste. "Ces chiffres, complétés par les 150.000 emplois créés dans le secteur marchand ces six derniers mois, laissaient penser qu'une tendance à la baisse était en train de s'installer. Les mauvais résultats d'août à Pôle Emploi indiquent que ce n'est finalement pas le cas", analyse Xavier Timbeau.

Mission quasi-impossible. Alors y a-t-il encore une chance de voir la courbe du chômage s'inverser dans les mois qui viennent ? Le directeur de l'OFCE a du mal à rester optimiste : "Techniquement, c'est toujours possible. Il y aura forcément des baisses qui viendront compenser la forte hausse du mois d'août. Mais c'est difficile d'imaginer un scénario de revirement dans un laps de temps aussi court." Selon lui, François Hollande est allé un peu trop vite en besogne quand il affirmait en juin que l'inversion de la courbe du chômage était un fait indiscutable. "Ses déclarations risquent de se retourner contre lui à la fin."

Le précédent Jospin. La fin justement, ce pourrait être la prochaine échéance présidentielle, si l'actuel président de la République décide de se représenter. Comme à chaque fois, le chômage sera un thème majeur de la campagne. "Le problème est que dès le début, François Hollande a conditionné sa candidature à l'inversion de la courbe. Sur ce point, il n'a donc pas encore la légitimité pour se présenter", avance Xavier Timbeau. Par ailleurs, l'évolution du chômage sur les derniers mois joue un rôle crucial lors de la présidentielle. "L'exemple de Jospin en 2002 est encore dans toute les têtes, remémore l'économiste. Le chômage avait baissé en 2001 mais était reparti à la hausse en 2002 et cela a forcément pesé dans la balance."