L'économie française devrait connaître une forte décélération en 2023. 1:34
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Barthélémy Philippe avec AFP / Crédit photo : MAEVA DESTOMBES / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP , modifié à
L'Insee a indiqué jeudi que l'économie française devrait connaître une forte décélération en 2023, les prix élevés continuant de freiner la consommation des ménages malgré un refroidissement attendu de l'inflation. Le produit intérieur brut (PIB) enregistrerait une hausse de 0,6% sur 2023 après une progression plus dynamique en 2022.

L'économie française devrait connaître une forte décélération en 2023, les prix élevés continuant de freiner la consommation des ménages malgré un refroidissement attendu de l'inflation, notablement dans l'alimentation, a indiqué jeudi l'Insee. En dévoilant pour la première fois ses prévisions annuelles, l'Institut national de la statistique a dressé le constat d'une dégradation conjoncturelle, avec des moteurs de la croissance tournant au ralenti, l'une des rares embellies venant de l'inflation qui devrait poursuivre un reflux amorcé au printemps.

L'inflation s'établirait à 5% en moyenne annuelle

Le produit intérieur brut (PIB) enregistrerait une hausse de 0,6% sur 2023 après une progression plus dynamique de 2,5% en 2022. Cette prévision est similaire à celle de la Banque de France mais plus pessimiste que celle du gouvernement (1%). En moyenne annuelle, l'inflation s'établirait à 5%, contre 5,2% l'an dernier. Mais le ralentissement de l'inflation n'implique pas une baisse des prix. Ceux-ci continueront à progresser, participant au coup de frein de l'activité puisque l'inflation grève la consommation des ménages.

Celle-ci reculerait de 0,2% en 2023 (après +2,1% en 2022), alors qu'elle contribue habituellement à faire tourner l'économie française. Elle fléchirait au printemps, surtout dans l'alimentation dont les prix connaissent des envolées à deux chiffres, avant de rebondir légèrement à la faveur du ralentissement des prix.

La consommation des ménages en territoire négatif, une première depuis 2012

C'est la première fois depuis 2012 que la consommation des ménages passe en territoire négatif, à l'exception de l'année de la pandémie en 2020. Autre maillon faible de la croissance: les investissements des ménages, dans l'immobilier notamment, comme ceux des entreprises marqueraient le pas, sous l'effet de taux d'intérêts élevés après le resserrement monétaire musclé opéré par la Banque centrale européenne (BCE) pour juguler l'inflation.

Le commerce extérieur, grâce aux exportations, soutiendrait lui la croissance. Il y a "cette inflation qui pèse sur la demande intérieure, et puis les premières conséquences du resserrement monétaire sur l'économie réelle", a résumé Julien Pouget, chef du département de la conjoncture de l'Insee, lors d'une conférence de presse. "L'inflation (...) reste relativement élevée, même si elle a amorcé un reflux", a-t-il ajouté.

La hausse des prix dans l'alimentation devrait ralentir

La hausse des prix à la consommation, qui touche directement les ménages au portefeuille, devrait poursuivre le repli amorcé au printemps pour s'établir à 4,4% en décembre sur un an. Elle avait ralenti à 5,1% en mai après 6% en janvier. Elle profiterait d'une forte accalmie des prix de l'énergie qui s'étaient envolés après le déclenchement de la guerre en Ukraine. Surtout, la hausse des prix dans l'alimentation ralentirait nettement grâce au reflux des cours des matières premières agricoles et de l'énergie. Après +14,3% sur un an en mai, l'inflation devrait ainsi être quasi divisée par deux en décembre (+7,4%). En moyenne annuelle, ils seraient 11,8% plus élevés qu'en 2022.

L'Insee souligne que l'évolution des prix alimentaires dépendra toutefois aussi du résultat des renégociations commerciales entre les distributeurs et l'industrie agro-alimentaire, rouvertes sous la pression du gouvernement, qui souhaite voir les étiquettes baisser dans les supermarchés.

L'industrie agroalimentaire relève ses marges

Autre facteur susceptible d'influencer leur évolution : le taux de marge des entreprises du secteur, qui a fortement augmenté après avoir souffert durant la crise sanitaire. L'industrie agroalimentaire a relevé ses marges, qui avaient souffert pendant la crise sanitaire, ce qui tire à la hausse les prix de production, souligne en substance Olivier Simon, chef de la division synthèse conjoncturelle. Les produits manufacturés ralentiraient également, à l'inverse des services du fait des hausses de salaires. Le secteur deviendrait la principale composante de l'inflation devant l'alimentation en fin d'année.

Le ralentissement des prix, combiné à une augmentation des revenus, permettrait une stabilité du pouvoir d'achat des ménages. Le taux d'épargne resterait à un niveau élevé, 18%. Dans ce contexte de croissance modeste, l'emploi resté jusqu'ici très dynamique pourrait ralentir d'ici la fin de l'année. Mais compte tenu d'une progression moins forte de la population active, le taux de chômage se stabiliserait à 7,1%.

Dans le détail pour 2023, après une hausse de 0,2% au premier trimestre, le PIB progresserait de 0,1% au deuxième (révisé en baisse) et troisième trimestres, puis de 0,2% sur les trois derniers mois de l'année.